Jean-Luc Mélenchon a décidé d'assumer des attaques répétées contre les médias. 4:01
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Thibaud Le Meneec
Invités de Culture Médias sur Europe 1, jeudi, le responsable de la communication politique de La France insoumise, Antoine Léaument, et le directeur adjoint de L'Obs, Sylvain Courage, débattent de la décision du parti de ne pas donner le droit aux journalistes de l'émission de Yann Barthès de suivre les meetings et les déplacements du député de Marseille.
ON DÉCRYPTE

C'est un épisode supplémentaire du conflit entre La France insoumise et Quotidien, diffusé sur TMC : dimanche, Jean-Luc Mélenchon a annoncé que les journalistes du talk-show de Yann Barthès ne seraient désormais plus autorisés à suivre ses meetings et ses déplacements. Le député de Marseille justifie sa décision en avançant que l'émission a permis le procès intenté à plusieurs cadres du parti, après l'épisode des perquisitions mouvementées.

Invités de Philippe Vandel dans Culture Médias sur Europe 1, jeudi, le responsable de la communication politique de La France insoumise, Antoine Léaument, et le directeur adjoint de L'Obs, Sylvain Courage, ont débattu de ces tensions toujours vives entre le parti et certains journalistes, avec plusieurs questions abordées : fallait-il que Quotidien transmette plus tôt l'intégralité des images tournées pendant les perquisitions ? La France insoumise doit-elle sanctionner les journalistes de cette manière ? Jean-Luc Mélenchon et les autres Insoumis ont-ils raison de prôner un conseil de déontologie pour les journalistes ?

LFI dénonce des "procès systématiques"

Pour Antoine Léaument, l'affaire est entendu : les journalistes de Quotidien "ne font pas du journalisme, ils font du militantisme politique" en sélectionnant les moments de la perquisition où Jean-Luc Mélenchon s'énerve contre les autorités. Et comme les collaborateurs de Quotidien "font du mal au travail de journaliste", "on a décidé de poser une limite parce qu'à un moment, on en a marre que cette émission fasse des procès systématiques", dénonce celui qui est aux commandes des outils numériques à disposition du parti.

"LFI a proposé à Quotidien de venir filmer la perquisition", précise Sylvain Courage, de L'Obs. "Il y a une part de divertissement dans ce que fait Quotidien, mais il y a aussi une part de dénonciation des artifices de la communication politique. C'est ça qui gêne beaucoup les politiques." "Ils se sont comportés comme des supplétifs de la police, (…) ils ne montrent que les pires images", s'insurge au contraire Antoine Léaument, qui n'hésite pas à comparer la décision de LFI avec celle de l'Élysée de ne plus accréditer RT Today, média directement lié au Kremlin.

" La diffusion des rushes est finalement une bonne chose "

Quotidien a diffusé l'intégralité des images de la perquisition le 11 septembre dernier, alors que la perquisition houleuse des locaux de La France insoumise a été réalisée le 18 octobre 2018, et un sujet diffusé dans l'émission le soir-même. "La diffusion des rushes est finalement une bonne chose", estime Sylvain Courage, selon qui "Quotidien pourrait peut-être faire ses sujets" d'un côté et diffuser l'intégralité des images en parallèle.

Un conseil de déontologie, "un outil" ou "un ministère" ?

Mais la tension entre La France insoumise et les journalistes ne se limite pas à un épisode isolé. Jean-Luc Mélenchon a exprimé depuis plusieurs années la nécessité de s'en prendre aux organes de presse : "Les attaques peuvent les médias peuvent servir mon combat", théorisait-il ainsi dans la revue Charles, en 2013. "Le parti médiatique est une composante clé du processus de la guerre judiciaire", a-t-il écrit dimanche, sur son blog.

L'affaire a permis à La France insoumise de relancer l'idée d'encadrer une profession malmenée dans l'opinion publique. "Le conseil de déontologie existe dans de nombreux pays. C'est un outil qu'ont les citoyens pour critiquer les médias", prône Antoine Léaument. "Jean-Luc Mélenchon voudrait encadrer les journalistes", rétorque Sylvain Courage. "On aboutit à un ministère de l'information, ce n'est pas du tout la tradition française." Cette stratégie de guerre frontale avec les journalistes peut-elle pour autant payer politiquement ? "Il voudrait prendre le dessus et commander les médias. C'est inadmissible et ça ne le mènera nulle part", prédit le directeur adjoint de L'Obs.