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Europe1.fr
Notre éditorialiste, Vincent Hervouet, revient sur les racines des manifestations d'ampleur qui se déroulent au Liban depuis quatre jours. 

Depuis jeudi, le Liban est paralysé par des manifestations d'une ampleur inédite, contre la corruption qui gangrène la classe politique. Les Libanais, de tous bords, sont des centaines de milliers à réclamer dans une ambiance festive un changement radical d'un système accusé de confessionnalisme et de clientélisme, sur fond de crise économique sans fin.

La foule libanaise campe dans la rue pour dénoncer la corruption. Une partie du gouvernement a déjà démissionné, et le Premier ministre, Saad Hariri, menace d’en faire autant si son plan de réformes n’est pas adopté en urgence. Tout cela a un parfum de révolution...

Ce n’est pas le printemps, c’est une Toussaint libanaise qu’attendent les manifestants. Ils veulent enterrer un régime à l’agonie, incapable de juguler la crise économique. Tout est parti jeudi d’une taxe imaginée par le ministre des Télécoms, Mohamed Choucair. Il voulait faire payer 18 centimes d’euros à ceux qui utilisent Whatsapp, c’est à dire ceux qui communiquent avec la famille au loin, c’est à dire tous les Libanais. Taxer les utilisateurs d’une messagerie gratuite, même les génies de Bercy, champions du monde de l’inventivité fiscale, n’y avaient pas pensé.

Mohamed Choucair qui a fait ses études à Paris a osé, et pour cause : la faillite menace. La dette libanaise, c’est la troisième au monde, 86 milliards de dollars. Sa taxe aurait rapporté 200 millions, mais les mauvaises langues l’ont aussitôt soupçonné de vouloir en détourner une partie.

Vous dites que parler de ministre corrompu, au Liban, c'est presque un pléonasme...

Les Libanais supportent depuis 50 ans les coupures d’eau et de courant, que Beyrouth empeste les ordures et que les ministres vivent comme des profiteurs de guerre. Les pays amis du Liban ont promis des milliards de dollars pour reconstruire les infrastructures en échange de réformes. Mais les bisbilles entre politiciens ont tout bloqué.

Les Libanais sont en rage mais l’Etat libanais qu’ils dénoncent est porté disparu. Le seul vrai pouvoir encore debout, c’est celui du Hezbollah, la milice pro iranienne. Pour la première fois, ses bureaux ont été incendiés dimanche par les manifestants.