Benjamin Netanyahou 3:39
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Guilhem Dedoyard avec AFP , modifié à
Après 12 ans de règne ininterrompu, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a été écarté par un vote de confiance du Parlement. Le géopolitologue Frédéric Encel clarifie les enjeux de ce séisme politique au micro d'Europe 1. 
INTERVIEW

Une nouvelle page de l'histoire d'Israël s'est tournée dimanche avec la fin de 12 ans de règne ininterrompu du Premier ministre Benjamin Netanyahou, écarté après un vote de confiance du Parlement à une coalition hétéroclite menée par son ancien allié Naftali Bennett. Pour Frédéric Encel, professeur à Sciences Po et spécialiste de la région, s'il est "révolutionnaire" qu'une coalition se soit formée contre le Premier ministre, celle-ci pourrait être trop hétérogène pour initier de réelles avancées sur des dossiers brulants, comme la question palestinienne. 

Qui forme cette coalition ? 

"C'est le matin du changement", a écrit dimanche matin sur les réseaux le centriste Yaïr Lapid qui a présenté cette coalition de huit partis : deux de gauche, deux du centre, trois de droite et une formation arabe. Dimanche soir, Naftali Bennett a été choisi comme Premier ministre tandis que le centriste Mickey Levy a été élu nouveau président du Parlement.

Une coalition "hétéroclite, très baroque", estime Frédéric Encel. Pour le professeur à Sciences Po, "ce qui est révolutionnaire est que cette coalition a dénominateur commun totalement nouveau, qui est l'éviction d'une personnalité, en l'occurrence d'un Premier ministre sortant". 

"Des coalitions hétéroclites, vous en avez depuis la création du pays en 1948", rappelle-t-il. "Et j'ajoute que depuis la fin des années 1980 et le début de l'émiettement, de l'atomisation de la vie politique israélienne, c'est au fond quelque chose de relativement courant", mais cette relative absence de revendications communes est inédite. Ainsi, pour Frédéric Encel, ce gouvernement va probablement "s'occuper de social, du budget, de la voirie, des investissements, dans une certaine mesure de la diplomatie, mais certainement pas du dossier israélo-palestinien", parce que leurs positions divergent trop. 

Quel avenir pour Netyanahou ?

"C'est notre destin d'être dans l'opposition et nous le saurons la tête haute. Nous allons faire tomber ce mauvais gouvernement et nous serons de retour pour diriger le pays à notre manière", a déclaré Netanyahou devant la Knesset. De fait, comme l'explique Frédéric Encel, "il rentre immédiatement dans l'opposition, pratiquement dès ce soir". En effet, rappelle-t-il, "le bloc Netanyahou : le Likoud plus les partis ultra orthodoxe représente quand même 59 députés sur 120", soit deux députés de moins que la majorité absolue.

Néanmoins, une fois son poste quitté, "il ne bénéficiera plus de l'immunité de Premier ministre et par conséquent, il va falloir s'expliquer et répondre de trois affaires notamment celle de corruption".

Cela peut-il changer la situation palestinienne ? 

"Du côté israélien, on n'a pas grand chose à attendre sur ce volet là, pour une raison très simple : elle est beaucoup trop la coalition hétéroclite. Il y a trop de différences entre les huit partis qui composent cette coalition", estime le professeur à Sciences Po.

Le porte-parole du Hamas avait expliqué que "Peu importe la forme que prendra le gouvernement israélien, cela ne change en rien la nature de nos relations avec lui, car il reste une puissance de colonisation et d'occupation à laquelle nous devons résister." Pour Frédéric Encel, ce n'est pas surprenant car "le Hamas a toujours joué la politique du pire, y compris contre l'Autorité palestinienne légale et légitime de Mahmoud Abbas".