Affaire Toscan du Plantier : la justice irlandaise refuse d'extrader Ian Bailey

Ian Bailey affaire Sophie Toscan du Plantier PAUL FAITH / AFP
Ian Bailey a toujours nié le meurtre de Sophie Toscan du Plantier. © PAUL FAITH / AFP
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avec AFP , modifié à
La justice irlandaise a refusé lundi pour la troisième fois d'extrader le Britannique Ian Bailey vers la France. Ce dernier a été condamné à 25 ans de prison pour le meurtre de la productrice française Sophie Toscan du Plantier en Irlande en 1996. 

La justice irlandaise a refusé lundi pour la troisième fois d'extrader le Britannique Ian Bailey vers la France, où il a été condamné en son absence à 25 ans de prison pour le meurtre de Sophie Toscan du Plantier en Irlande en 1996. "Je refuse la remise" de Ian Bailey à la France, a déclaré le juge Paul Burns, à la Haute Cour de Dublin. Sa décision peut faire l'objet d'un recours devant la Cour suprême.

Condamné le 31 mai 2019 en son absence par la cour d'assises de Paris, qui a délivré un mandat d'arrêt contre lui, Ian Bailey, 63 ans, a toujours clamé son innocence. Très vite suspecté par la police irlandaise, ce journaliste indépendant avait été placé deux fois en garde à vue en 1997 et 1998, mais jamais poursuivi en Irlande - où il vit toujours - faute de preuves suffisantes.

Sophie Toscan du Plantier, tuée chez elle en Irlande en 1996 

Le corps de la productrice française de 39 ans et épouse du producteur de films Daniel Toscan du Plantier - décédé en 2003 - avait été découvert au matin du 23 décembre 1996 par une voisine, en contrebas de sa maison isolée de Schull, sur la côte sud-ouest de l'Irlande. Surprise chez elle, la jeune femme avait fui dans la lande et s'était considérablement débattue. Son crâne a été fracassé par une pierre plate et un parpaing. La justice irlandaise a par deux fois refusé l'extradition de Ian Bailey, en 2012 et 2017, invoquant l'absence de réciprocité en la matière.

Lors de l'audience à Dublin en juillet, sa défense avait contesté la compétence de la justice française dans cette affaire. Son avocat David Smyth a lui étrillé des autorités françaises "murées dans leur silence", arguant qu'elles n'avaient jamais expliqué leur retard "injustifié" dans la poursuite de l'affaire 23 ans plus tard et qu'"aucune tentative n'avait été faite pour entrer en contact" avec son client. La défense avait aussi souligné que les poursuites et la condamnation françaises s'étaient basées sur l'enquête irlandaise, alors même que le procureur irlandais, qui avait "une vue d'ensemble sur cette enquête", avait refusé d'inculper Ian Bailey et reconnu "que l'affaire lui avait été préjudiciable".

Une enquête vivement critiquée

Police scientifique qui tarde à arriver sur les lieux, témoin clef qui se rétracte : dès le début, l'enquête avait été confrontée à de nombreux problèmes, le procureur irlandais de l'époque la qualifiant même de "complètement biaisée". En 2014, la famille de la victime avait qualifié cette enquête de "fiasco", dénonçant un "déni de justice". La justice française a quant à elle estimé qu'il existait "des éléments de preuves suffisants" pour condamner Ian Bailey malgré l'absence de preuve scientifique le reliant au crime - le corps de la victime avait été laissé dehors sous une bâche plus d'une journée, dans ce comté où le dernier meurtre remontait à 1922.

Ian Bailey a été vu porteur "d'égratignures significatives" sur les avant-bras, le dos des mains et le front, similaires à celles retrouvées sur le corps de la victime et pouvant correspondre à des épines de ronces. Le Britannique les a toujours imputées à la découpe d'un arbre de Noël et de dindes le 22 décembre, mais plusieurs témoins ont affirmé qu'il n'avait pas ces griffures dans la soirée, alors qu'il jouait du tambour traditionnel dans un pub, manches relevées. Il a surtout "de manière non équivoque, auprès de trois témoins, déclaré être l'auteur du crime", avait relevé la cour.

Condamné à Paris selon la procédure du "défaut criminel", Ian Bailey était privé de la possibilité de faire appel du verdict. Mais s'il se constituait prisonnier, ou s'il était arrêté, il aurait droit à un nouveau procès.