Affaire du sous-marin danois : le récit glaçant du meurtre de Kim Wall

Kim Wall est morte à bord du Nautilus, sur lequel elle avait embarqué avec l'inventeur Peter Madsen.
Kim Wall est morte à bord du Nautilus, sur lequel elle avait embarqué avec l'inventeur Peter Madsen. © PETER THOMPSON / AFP
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Le 10 août au soir, la journaliste est morte à bord du sous-marin artisanal Nautilus, dans le détroit de l'Öresund, entre le Danemark et la Suède, dans des circonstances encore floues.

Un inventeur exalté et une jeune journaliste à la carrière prometteuse, à bord d'un sous-marin naviguant dans le détroit de l'Öresund, entre le Danemark et la Suède. À mesure qu'il se dessine, le scénario du crime évoque celui d'un roman policier. Le 10 août dernier, Kim Wall est morte dans le submersible privé Nautilus, où elle se trouvait seule avec le concepteur de l'engin. Dissimulés puis présentés comme un "accident" par le principal suspect, les faits sont désormais considérés comme un "meurtre" par le parquet danois. Mais restent empreints de nombreuses zones d'ombre.

"Elle était à son aise". Reporter indépendante pour de grands titres de presse internationaux, Kim Wall parcourait le monde en quête de destins singuliers, d'Haïti à la Corée du Nord. Mais le 10 août, la jeune femme choisit de revenir aux sources, pour faire le portrait du Danois Peter Madsen, inventeur d'un sous-marin de 18 m de long, baptisé d'après le roman de Jules Verne. L'ingénieur de 46 ans, robuste et touche-à-tout, entend aussi devenir un pionnier de l'exploration spatiale privée. Ambitieux, parfois décrit comme mégalomane, il a adopté le surnom de "Rocket Madsen".

Pour mieux cerner le personnage, Kim Wall choisit de monter avec lui à bord du Nautilus. Le 10 août, l'embarquement se fait à quelques kilomètres de Trelleborg, en Suède, ville natale de la journaliste. "D'aucune façon, je n'ai senti qu'elle était menacée", a raconté un témoin qui naviguait en Zodiac à proximité avant que le navire ne prenne le large, cité par LCI. "Elle a pris une photo de nous, elle était amicale, sympathique, et paraissait très agréable. Si elle avait voulu quitter le sous-marin, nous aurions pu facilement la prendre avec nous, mais mon sentiment est qu'elle était à son aise à ce moment-là."

Des versions fluctuantes. Vingt-quatre heures plus tard, son petit-ami, avec qui elle projette de s'installer en Chine, est pourtant sans nouvelles et alerte les autorités danoises. Celles-ci annoncent alors officiellement être à la recherche du sous-marin, porté disparu depuis la veille au soir dans le détroit. Rapidement, elles retrouvent sa trace à une cinquantaine de kilomètres de la capitale danoise. Le submersible est mal en point : peu avant midi, il a soudainement coulé. Son propriétaire a été secouru in extremis. Mais de la journaliste, aucune trace.

Que s'est-il passé à bord ? Seul l'ingénieur détient les clés du mystère. Dans un premier temps, ce dernier a affirmé avoir débarqué la jeune femme vivante, sur la pointe de l'île de Refshaleøen, à Copenhague, dans la soirée du 10 août. Il s'est ensuite ravisé en garde à vue, expliquant que Kim Wall avait été victime d'un "accident" et qu'il avait jeté son corps par dessus-bord. Entre temps, les premières expertises ont révélé que le sous-marin avait été intentionnellement sabordé. Pour faire disparaître des preuves ? Renfloué et passé au peigne fin, le submersible s'est révélé porteur de tâches de sang appartenant à Kim Wall.

Un tronc lesté d'une pièce en métal. Après d'intenses recherches dans la baie, les enquêteurs ont découvert, non loin de Copenhague, un tronc humain lesté d'une pièce en métal et porteur de blessures faisant penser à "une tentative de s'assurer que l'air et les gaz s'échappent du corps pour qu'il ne remonte pas à la surface". Mercredi, plus de dix jours après la disparition de la jeune femme, la police a confirmé que ces restes humains lui appartenaient, grâce à des analyses ADN. Interrogé sur ces nouveaux éléments, Peter Madsen s'est dit "soulagé" à l'idée que la vérité soit faite sur cette tragédie, selon son avocate. Mais l'inventeur, seul à bord avec la journaliste au moment des faits, n'a pas changé sa version, persistant à nier l'homicide et l'atteinte à l'intégrité d'un cadavre.