L’Ukraine est (aussi) en pleine crise économique

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A L'AIDE - Alors que la Russie fait pression, Kiev a besoin de 35 milliards de dollars. Qui du FMI ou de l'UE mettra la main à la poche ?

L’info. L’euphorie provoquée par le départ forcé du président Ianoukovitch aura été de courte durée. A peine nommé, le nouveau président par intérim Olexandre Tourtchnivoff a tenu à souligner que le pays n’était pas sorti d’affaire : "l'Ukraine est en train de s'enfoncer dans le précipice, elle est au bord du défaut de paiement", a-t-il prévenu. En clair, le pays est menacé de faillite et estime avoir besoin de 35 milliards de dollars d'aide sur deux ans, soit environ 25,4 milliards d’euros. Reste à savoir où il va les trouver alors que la Russie menace de lui couper les vivres.

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L’Ukraine, pays à l’économie exsangue. Si la contestation qui a chassé du pouvoir le président était avant tout politique, elle a éclaté suite à un évènement économique : déjà à cours d'argent frais, Viktor Ianoukovitch avait préféré se tourner vers la Russie pour obtenir un prêt de 15 milliards d’euros, plutôt que de recevoir une aide de l’UE, cette dernière étant conditionnée à la poursuite de réformes.

Les Ukrainiens n’ont donc pas attendu la fin de la crise politique pour s’apercevoir que leur économie était en train de sombrer : ils se ruent depuis plusieurs jours dans les supermarchés pour faire le plein de produits alimentaires, tandis que les banques ont limité le montant des retraits autorisés et réduit leurs horaires d'ouverture.

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Et menacé par un coup de grâce venu de Russie. L’Ukraine est donc au plus mal et la situation risque d’empirer : après avoir reçu de la Russie un premier versement de trois milliards de dollars en décembre, le pays devait obtenir un nouvelle enveloppe de deux milliards de dollars. Mais face à l’instabilité au sommet du pouvoir ukrainien, la Russie a préféré geler ce versement en attendant que la situation se décante.

Résultat, l’Ukraine doit rembourser 13 milliards de dollars de dette et n’a même pas assez d’argent pour faire fonctionner son Etat. Sans oublier que la Russie risque de lui demander des comptes si elle décide de se rapprocher de l’UE au détriment de son voisin slave. Un sujet embarrassant lorsqu’on sait que la Russie est le premier acheteur des produits ukrainiens mais aussi le principal investisseur dans ce pays : 25% des exportations ukrainiennes partent en Russie et 32% de ses importations en proviennent, selon les chiffres du CIA Factbook 2014.

Un article publié par la Fondation Schuman évoque même une "colonisation" économique russe, précisant : "le capital russe contrôlerait près du tiers de l'économie ukrainienne, selon un think-tank du ministère russe des affaires étrangères". Moscou en est bien conscient et, sentant qu'il perd la main à Kiev, a d'ores et déjà menacé lundi Kiev d'une augmentation des droits de douane.

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Un appel au FMI en dernier recours ? Si elle décide de se réorienter vers l’Europe occidentale, l’Ukraine pourra bien compter sur un soutien de l’UE et des Etats-Unis, comme l’a souligné le G20 ce week-end. D’autant qu’une faillite de l’Ukraine aurait des conséquences sensibles sur le reste du continent. Les Européens sont donc prêts à apporter leur soutien, mais un soutien limité tant les besoins ukrainiens sont immenses et les moyens européens limités.

L’Ukraine n’aura donc pas d’autre choix que de se tourner vers le Fonds monétaire international (FMI). Le secrétaire américain au trésor a d'ailleurs déjà défini la méthode : Kiev devra engager de profondes réformes pour obtenir une aide du FMI. Sans se mettre à dos la Russie, trop influente en Ukraine pour  être négligée. Une équation périlleuse que le nouveau président ukrainien a ainsi résumée : "nous sommes prêts à un dialogue avec la Russie, en développant nos relations sur un pied d'égalité (...) et qui respecteront le choix européen de l'Ukraine".

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