Vols à l'Hôtel Drouot : cinquante personnes devant la justice

L'Hotel Drouot
L'Hotel Drouot © JEAN-PIERRE MULLER / AFP
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avec AFP , modifié à
Le procès de cinquante personnes, dont les fameux "cols rouges", chargés de la manutention et du transport d'objets destinés aux ventes de l'Hôtel Drouot, s’ouvre lundi.

L'un des plus gros scandales du marché de l'art en France arrive devant la justice. Cinquante personnes, dont six commissaires-priseurs et les fameux "cols rouges", chargés de la manutention et du transport d'objets destinés aux ventes de l'Hôtel Drouot, sont poursuivis pour de nombreux vols. Ils comparaissent jusqu’au 4 avril devant le tribunal correctionnel de Paris.

Un monopole qui datait de Napoléon III. Pour comprendre les magouilles orchestrées par les "cols rouges", il faut revenir sur l'histoire de l’Hôtel des ventes de Drouot, un temple du marché de l’art qui réunit 75 sociétés d’enchères et accueille chaque année près de 5.000 acheteurs et curieux. Avant que le scandale éclate, les fameux "cols rouges" étaient chargés de la manutention et du transport des objets d’art destinés à être vendus aux enchères au sein de l’institution.

Surnommés "les Savoyards", ces employés avaient le monopole à l’Hôtel Drouot depuis 1952, date à laquelle Napoléon III le leur avait octroyé, lors du rattachement de la Savoie à la France. Leur nombre a toujours été limité à 110. Chaque nouveau "col rouge" devait être coopté par un ancien, à qui il rachetait la fonction. Depuis l’époque de Napoléon III, leur tenue était restée immuable : une vareuse noire à bouton d’or et au fin col mao rouge sur lequel était brodé leur numéro en chiffres d’or.

Un tableau de Courbet détourné. Leur honneur, lui, n’est pas resté intact. Il vole en éclats fin 2009. Après sept ans d'enquête, les policiers de l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC) mettent au jour un système frauduleux de détournement d’œuvres d’art. L'enquête pour association de malfaiteurs révèle les pratiques de certains commissionnaires, soupçonnés de vols lors d'inventaires de succession et d'enlèvements d'objets et d'œuvres d'art destinés aux enchères.

Les policiers retrouvent notamment un tableau attribué à Gustave Courbet. Les objets étaient stockés puis mis aux enchères au célèbre hôtel des ventes parisien au profit des commissionnaires de Drouot. Selon les "flics de l’art", ces pratiques auraient débuté en 2006 et concernent plus de 6.000 objets d’art.

Des commissaires-priseurs à la barre. Outre les fameux "cols rouges", les commissaires-priseurs, parmi lesquels figurent Claude Boisgirard, Hubert Brissonneau, Philippe Lartigue ou Eric Caudron, sont également visés. Six d’entre eux sont soupçonnés d'avoir fermé les yeux sur ces agissements et d'avoir accepté de vendre des objets, dont ils connaissaient l'origine frauduleuse, pour le compte de cette corporation, regroupée au sein de l'Union des commissionnaires de l'hôtel des ventes Drouot (UCHV).

Un nouveau prestataire depuis 2010. Face au scandale, Drouot avait changé de prestataire depuis l'automne 2010, au profit de Chenue, une entreprise spécialisée dans la logistique d'œuvres d'art depuis 1760. A l'automne 2011, un site Internet avait été ouvert à destination du public et de potentielles victimes, présentant 6.000 tableaux, sculptures, pièces d'argenteries présumés détournés. Ces objets avaient été saisis par les enquêteurs de l'OCBC lors de 147 perquisitions.