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Céline Revel-Dumas
Âgé de trois ans, Matthieu a vu ses parents mourir sous ses yeux. "On ne peut pas imaginer pire comme traumatisme", estime Stéphane Clerget, pédopsychiatre interrogé sur Europe 1.
INTERVIEW

Matthieu, âgé de trois ans a vu mourir sous ses yeux son père et sa mère lundi à Magnanville. Son grand frère de 10 ans était lui absent lors du drame. Les deux enfants seront "reconnus pupilles de la nation", a annoncé François Hollande mardi. Pour le pédopsychiatre Stéphane Clerget l'enfant de trois ans, sain et sauf grâce à l'intervention des policiers était "en état de stress post-traumatique des plus intenses". "On ne peut pas imaginer pire comme traumatisme pour un enfant de cet âge", explique-t-il.

"C'est absolument effroyable pour lui". Selon le spécialiste l'enfant pourrait être en état de sidération, conférant au mutisme : "Il faudra du temps pour qu'il se sente rassuré. Il s'est senti menacé lui-même". Âgé de trois ans, l'enfant "ne comprends pas", mais "en revanche, sur le plan du ressenti, c'est absolument effroyable pour lui".

Un risque pour le développement de l'enfant. L'enfant pourrait garder les souvenirs du drame à l'âge adulte, a expliqué Stéphane Clerget : "Le principe de l'état de stress post-traumatique, c'est justement la répétition du souvenir qui est totalement envahissant et qui va l'empêcher de vivre au quotidien en l'absence de prise en charge". Un stress post-traumatique "qui va même altérer son développement", précise encore le pédopsychiatre. "Ces états-là sont plus graves chez les enfants que chez les adultes, car ça touche un être en développement", révèle le médecin. 

L'espoir de l'"évitement". Issue plus favorable, l'enfant pourrait aussi ne plus se souvenir de la scène meurtrière : "Il y a des mécanismes protecteurs qu'on appelle 'd'évitements'. Dès lors, l'enfant va effacer sa mémoire pour continuer d'avancer". Le souvenir traumatisant pourrait alors revenir tel un flash à l'adolescence ou à l'âge adulte.

Sécurité affective. Pour le garçonnet désormais, "la prise en charge va être longue et doublée d'une adoption", explique le pédopsychiatre. "C'est important que les personnes qui vont le prendre en charge, ses nouveaux parents, puissent assurer une continuité affective, tels des gens pas trop âgés", espère Stéphane Clerget. Accueilli depuis le drame à l'Hôpital Necker-Enfants malades, l'enfant de trois ans pourrait retrouver son grand frère, "élément le plus stabilisant pour lui", décrypte l'expert avant de préciser : " Il va avoir besoin d'amour, d'une attention permanente, d'être au quotidien avec quelqu'un tout le temps, de ne pas rester seul, et à côté de ça suivre des soins à long terme, à la fois pour traiter l'état de stress-post-traumatique mais aussi la dépression liée à la perte".