"Je me voyais mort": un policier jugé aux assises invoque la légitime défense

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Les parties civiles estiment que le policier de 36 ans a "totalement perdu les pédales" au moment de tuer Amine Bentounsi en 2012.

"Je me voyais mort" : un policier de 36 ans jugé pour avoir tué un braqueur armé en cavale a affirmé jeudi avoir tiré pour défendre sa vie et ne toujours pas comprendre ce qu'il faisait devant une cour d'assises. Il est jugé depuis lundi à Bobigny pour "violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner", près de quatre ans après les faits.

Un braqueur en fuite. Le 21 avril 2012, une patrouille de police est avisée qu'Amine Bentounsi, recherché pour n'avoir pas réintégré la prison où il est incarcéré pour des vols à main armé, a été vu dans le centre de Noisy-le-Sec, en Seine-Saint-Denis. A sa vue, le braqueur de 29 ans, condamné trois fois aux assises, prend la fuite. Trois policiers le poursuivent, tandis qu'un quatrième, Damien Saboundjian, fait le tour du pâté de maison en voiture pour lui couper la route.

Le fugitif, qui a jeté une grenade factice sur ses poursuivants, surgit au détour d'une rue. "J'ai juste le temps de freiner, il me braque, je me recroqueville sous le volant. Je sors de la voiture, je le perds de vue et je le vois de l'autre côté de la rue, son visage et son arme pointée sur moi, comme ça", a raconté l'accusé, mimant la scène avec force gestes.

"Il a totalement perdu les pédales." Pour les parties civiles, l'histoire est tout autre : Damien Saboundjian, malgré ses dix ans d'expérience dans la police, a, sous l'effet de la panique, tué un homme qui ne cherchait qu'à fuir. La preuve, selon elles, Amine Bentounsi a reçu une balle dans le dos, et aucun témoin de la scène ne l'a vu pointer son arme sur le policier. Pour l'avocat des parties civiles, Michel Konitz, "ce n'est pas un méchant homme mais c'est quelqu'un qui a totalement perdu les pédales". "Il n'y a pas de légitime défense dans ce dossier, c'est un tissu de mensonges", a lancé de son côté Amal Bentounsi, la grande soeur d'Amine, fondatrice du collectif "Urgence : notre police assassine". "Vous avez une responsabilité vis-à-vis de cette jeunesse qui ne croit plus en la justice" et risque de s'égarer car "l'injustice crée des monstres", a-t-elle prévenu, s'adressant en particulier aux neuf jurés.

Le verdict est attendu vendredi. Le policier encourt 15 ans de réclusion.