Corruption : que reproche-t-on au préfet Alain Gardère ?

Alain Gadère
Alain Gadère © AFP
  • Copié
avec Alain Acco et AFP , modifié à
Après deux jours en garde à vue, l’ancien "grand flic" a été présenté jeudi à la justice en vue d'une éventuelle mise en examen.

Les écoutes téléphoniques sont accablantes. Après deux jours et deux nuits en garde à vue, le préfet Alain Gardère a été présenté jeudi à la justice en vue d'une éventuelle mise en examen. Le haut fonctionnaire proche de la droite est suspecté d’abus de biens sociaux, trafic d'influence, corruption et prise illégale d'intérêts. Selon une source proche du dossier, Alain Gardère a été entendu par l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), la "police des polices", "sur des faits liés à son activité au Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps) et sur des faits plus anciens". En résumé, il est reproché à cet ancien commissaire de 59 ans d'avoir rendu des services en échange de quelques cadeaux.

Dénoncé par un suspect dans une autre affaire. Le nom d’Alain Gardère apparaît, en février 2015, dans le cadre d’une enquête concernant  des entreprises soupçonnées de "travail dissimulé". Les écoutes commandées dans le cadre de ce dossier mettent alors en lumière l’implication d’un homme : Alain Gardère. A la même époque, le nom du haut fonctionnaire revient dans une autre affaire portant sur un trafic d’influence au sein de la police judiciaire parisienne. En off, lors d’un interrogatoire, un suspect se plaint d’être poursuivi, alors que des agissements plus graves sont en cours au sein de la préfectorale. Le suspect fait référence à demi-mot au train de vie d’Alain Gardère, rapporte Le Parisien.

Services contre cadeaux. Le 23 septembre 2015, une information judiciaire est ouverte contre cet ancien cadre de la préfecture de police de Paris. Dans la plus grande confidentialité, les lignes téléphoniques du préfet sont sur écoute, et les conversations enregistrées se révèlent accablantes. Elles démontreraient que, grâce à ses interlocuteurs, notamment de grosses entreprises implantées à l'aéroport de Roissy, le préfet avait un train de vie très confortable depuis plusieurs années. Le procès-verbal fait état de réservations de restaurant, de privatisations de boîte de nuit et de séjours à l’étranger, indique Le Parisien. "Les personnels sollicité apparaissent si redevables que la question du paiement ne se pose même pas", résume une source proche du dossier.

A ce stade, il ne s’agit pas d'enrichissement personnel mais au minimum de trafic d'influence. Des soupçons qui interpellent de la part de ce haut fonctionnaire, inflexible avec ses troupes, très redouté, notamment, quand il dirigeait les 30.000 policiers de l'agglomération parisienne. Un homme intransigeant, notamment avec les ripoux de la Bac nord de Marseille. A l'époque, il était préfet délégué à la sécurité, nommé par Nicolas Sarkozy qui souhaitait le récompenser de sa fidélité.

Un autre policier impliqué. A la suite de sa garde à vue, l’ancien "grand flic" avait aussitôt été suspendu de ses fonctions à la tête du Cnaps, l'instance chargée notamment de délivrer des agréments aux entreprises de sécurité privés ; et censée chapeauter et "moraliser" ce secteur économique, sous la tutelle du ministère de l'Intérieur.
Un autre policier, son directeur de cabinet au Cnaps, a aussi été déféré. Le patron d'une importante société de sécurité et de services aux aéroports et deux femmes, également interpellés mardi, ont en revanche été remis en liberté.