Ce que Salah Abdeslam a dit aux enquêteurs, au lendemain de son arrestation

Salah Abdeslam a été arrêté le vendredi 18 mars dernier, à Molenbeek.
Salah Abdeslam a été arrêté le vendredi 18 mars dernier, à Molenbeek. © AFP
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Le seul survivant des commandos du 13 novembre reconnaît sa participation, mais minimise son rôle. Il affirme ne pas connaître les kamikazes de Bruxelles. 

Abdelhamid Abaaoud ? Il ne l'a vu qu'"une seule fois". Auditionné durant deux heures au lendemain de son arrestation à Molenbeek vendredi dernier, Salah Abdeslam a adopté une position floue au sujet de son implication dans les attentats de Paris, entre incohérences et réponses elliptiques. 

Il minore son implication. Dans un premier temps, le suspect clef des attentats du 13 novembre est surtout interrogé sur son rôle présumé dans leur préparation. Lors de cette audition du 19 mars, il reconnaît avoir loué "les voitures et hôtels" ayant servi aux commandos du 13 novembre. Mais, comme l'a révélé BFMTV, Salah Abdeslam rejette la responsabilité sur son frère, Brahim, qui s'est fait exploser devant le "Comptoir Voltaire", après avoir été l'un des tueurs du commando des terrasses.

Une responsabilité imputée à son frère, Brahim... "J'ai fait ça suite à la demande de Brahim", répète-t-il aux enquêteurs. Et s'il confirme avoir déposé les trois kamikazes du Stade de France sur place, il affirme ne connaître parmi eux que Bilal Hadfi et "ignorer le rôle" des deux autres, que l'enquête n'a d'ailleurs toujours pas permis d'identifier. "Chaque fois que j'ai dû payer des choses pour préparer ces attentats, l'argent venait de Brahim", dit-il une autre fois. Selon ses dires, c'est aussi son frère qui lui a fourni sa ceinture d'explosifs, rapporte Le Monde.

... Et à Abdelhamid Abaaoud, "le responsable". Salah Abdeslam charge surtout Abdelhamid Abaaoud, chef opérationnel présumé des attentats de Paris. Il déclare savoir "de (son) frère Brahim" que "c'est lui le responsable des attentats". Il soutient par ailleurs, sans ciller, n'avoir rencontré ce Belge de 27 ans passé par la Syrie qu'une "seule fois" dans sa vie, dans la nuit du 11 au 12 novembre 2015, dans la planque louée à Charleroi et d'où sont partis les commandos du 13 novembre.

On sait pourtant que les deux jeunes hommes étaient proches, tous deux originaires de Molenbeek. En février 2015, Salah Abdeslam avait d'ailleurs déclaré aux enquêteurs : "C’est un chouette gars, je le connais depuis plus de dix ans. C’est un (de ceux) du quartier avec qui j’avais le plus d’affinités", indiquait Libération. Les deux ont même été incarcérés ensemble, en 2010, pour vols, rapporte L'Obs.

Les El Bakraoui ?"Je ne les connais pas"... Quant aux frères El Bakraoui, recherchés dans le cadre de l'enquête sur les attentats du 13 novembre, avant même d'être identifiés comme deux des trois kamikazes des attaques belges, Salah Abdeslam fournit la même réponse un peu courte. "Je ne (les) connais pas", assure-t-il d'après Le Monde, lorsqu'on lui montre une photo (pour rappel, avant les attentats de Bruxelles, mardi).

Pourtant, le parquet fédéral belge a confirmé jeudi que Khalid El Bakraoui, avait bien loué - sous un faux nom - la planque de Charleroi où sont passés les commandos du 13 novembre, et où Salah Abdeslam a déclaré avoir vu Abdelhamid Abaaoud. 

... ni Najim Laachraoui. Idem pour Najim Laachraoui, dont l'empreinte ADN a été prélevée sur des explosifs utilisés au Bataclan et au Stade de France... Salah Abdeslam affirme ne pas le reconnaître, d'après BFTMTV. Le second kamikaze de l'aéroport à avoir été identifié avait pourtant été contrôlé le 9 septembre 2015 à la frontière austro-hongroise, alors qu'il voyageait avec la fausse identité de Soufiane Kayal en compagnie de Salah Abdeslam et de Mohamed Belkaïd. Ce dernier avait alors présenté de faux papiers belges au nom de Samir Bouzid.

Quid de son implication dans les attaques de Bruxelles ? Au sujet de Mohamed Belkaïd, tué lors de la perquisition de Forest qui fut décisive dans l'arrestation de Salah Abdeslam, l'ex-fugitif raconte aux enquêteurs : "Il n'était pas content de me voir revenir. Je lui ai expliqué que je ne pouvais pas me faire sauter." Selon Le Monde, celui qui a dit en audition avoir fait "machine arrière" - alors qu'il voulait au départ se faire sauter au Stade de France - aurait dit à Abid Aberkan qu'il "manquait de liquide (explosif)" dans sa ceinture. C'est dans l'appartement de la mère d'Abid Aberkan, à Molenbeek, que l'ex-fugitif avait trouvé refuge, avant d'être arrêté vendredi. 

D'après L'Obs, Salah Abdeslam pourrait avoir tenté de se rattraper en participant à de nouveaux attentats. Etait-il au courant d'un projet terroriste, et a-t-il gardé le silence ? Si son avocat, Sven Mary, a déclaré jeudi que son client "n'était pas au courant", les enquêteurs soupçonnent désormais Salah Abdeslam d'avoir eu connaissance des attaques de Bruxelles, qui ont fait 31 morts et 300 blessés. Mais depuis mardi, le suspect reste mutique. "Il a refusé de faire la moindre déclaration", a indiqué vendredi le parquet fédéral belge.