Attentats du 13 novembre : l’incroyable coïncidence qui a trompé les enquêteurs

Des policiers devant le Stade de France
Des policiers devant le Stade de France © AFP
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Pendant plusieurs semaines, les enquêteurs ont exploité une piste selon laquelle deux terroristes accompagnaient les commandos de Daech dans leurs tueries.

"Les coïncidences sont les pires ennemies de la vérité", assurait le célèbre auteur de romans policiers, Gaston Leroux. Les enquêteurs des attentats du 13 novembre lui ont donné raison. Pendant plusieurs semaines, ils ont exploité une piste selon laquelle deux terroristes accompagnaient les commandos de Daech dans leurs tueries. Une piste reposant sur une incroyable coïncidence : au moment précis où les terroristes frappaient alternativement les quatre coins de la capitale, les téléphones de deux individus bornaient dans les mêmes secteurs, au même moment, révèle Le Parisien.

Un conducteur qui part de Belgique, comme les terroristes. Le 13 novembre au soir, alors que les auteurs des attentats de Paris viennent de se diviser en deux groupes répartis en banlieue parisienne, un véhicule quitte la Belgique, où les attaques ont été orchestrées. Selon l’analyse des bornes relais, le conducteur belge passe à 18h15 devant la gare de Bruxelles-Midi. Une heure plus tard, il traverse la frontière, direction Paris. A 21h10, le véhicule est repéré sur l'autoroute, à proximité du Stade de France, où se massent 70.000 supporters venus assister au match France-Allemagne.

Le duo se retrouve dans le 11eme arrondissement. A hauteur du Stade de France, le conducteur mystère reçoit un appel. Dix minutes plus tard, un des deux kamikazes se fait exploser devant la porte D du Stade de France. S’en suit une autre explosion, à 21h30, au niveau de la porte D. A ce même moment, le véhicule belge est déjà loin. Après avoir pris la route de la place de la Nation, dans l’est de la capitale, il convoie vers l'avenue Philippe-Auguste, dans le 11eme arrondissement, où son interlocuteur téléphonique l’attend. Les deux individus se retrouvent précisément au moment où débute l'équipée meurtrière devant les terrasses du 10e et 11e arrondissement de Paris : Le Petit Cambodge, Le Carillon, La bonne bière et la Belle équipe.

Le commando des terrasses sévit durant vingt minutes, avant de déposer l’un des terroristes à la terrasse du Comptoir Voltaire, où ce dernier meurt le dos arraché par son gilet explosif. Le couple se trouve alors à trois minutes à pied du lieu de l’explosion, rapporte Le Parisien.

Avant de se retrouver à deux pas d’Abdeslam. Plus confusant encore, alors que Salah Abdeslam, le dernier membre vivant du commando des terrasses, gare sa voiture Clio place Albert-Kahn, les téléphones de deux individus mystère bornent à un kilomètre au sud, près de Barbès, dans le 18eme arrondissement de Paris. C’est là que le chemin des deux individus se dissocie de celui des terroristes des attentats de Paris. Alors que Salah Abdeslam prend la route de Montrouge, où il est récupéré par des complices, le duo reste jusqu'au dimanche dans le quartier de Barbès/Château-Rouge. Le 15 novembre, dans la soirée, le conducteur belge repart vers la Belgique, où il arrive vers 22h15.

Une prostituée partie retrouvée son ami. Les enquêteurs prennent alors la piste d’un commando bis très au sérieux, d’autant que dans un communiqué, l’Etat islamique avait revendiqué des attentats dans le 18eme arrondissement de Paris. Les deux lignes téléphoniques qui ont borné aux endroits des attaques sont placées sous surveillance. L’enquête menée en lien avec la justice belge est fructueuse. La police fédérale connaît bien le propriétaire de la ligne téléphone pour des faits de prostitution. Le numéro est attribué à une femme, une prostituée connue des services de police, rapporte Le Parisien.

Le numéro français, lui, correspond au profil d’un homme de 26 ans, habitant le 18eme arrondissement de Paris. Convoqués par les enquêteurs séparément, le "couple" apporte la même version : ils se sont retrouvés le temps d’un week-end "dans l'une des plus belles villes du monde". Logiquement, la femme est arrivée de Bruxelles, par le Nord de Paris, au niveau du Stade de France. Le duo s’était ensuite donné rendez-vous dans le très fréquenté 11eme arrondissement, avant de regagner le domicile de Monsieur.

 

Une coïncidence qui retire un élément à charge contre Bendaoud :

Cette piste, définitivement écartée par les enquêteurs, permet de retirer un élément à charge pour Jawad Bendaoud. Mais à ce stade, il reste mis en examen pour avoir mis à disposition l'appartement de Saint-Denis où le cerveau présumé des attaques, Abdelhamid Abaaoud, s'était réfugié, avant de mourir dans l'assaut du Raid. Interrogé sur cette ligne téléphonique belge lors de sa garde à vue, Bendaoud avait indiqué tout ignorer de cet interlocuteur, avec qui il avait un contact en commun dans son téléphone. Il était entré "dans une rage folle", jusqu'à casser l'ordinateur du policier qui menait l'audition, selon une source proche du dossier.