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Chaque jour, Didier François traite d’un sujet international.

Un an jour pour jour après le déclenchement de la dernière épidémie d’Ebola en République du Congo, la situation ne cesse de se détériorer. Au point que le Rwanda a décidé de fermer sa frontière pendant quelques heures ce jeudi pour tenter de freiner la propagation du virus.

Une mesure plus symbolique d’ailleurs que prophylactique mais qui répond à une véritable inquiétude de toute l’Afrique centrale et particulièrement de la région des Grands lacs. Parce qu’il y a effectivement un an que le patient zéro (le premier malade de cette nouvelle épidémie) a été diagnostiqué. C’était le 1er août 2018 dans un tout petit dispensaire isolé en zone forestière dans la province du Nord Kivu. Seulement douze mois plus tard, loin d’avoir été contenu, le virus a déjà infecté plus de 2.500 personnes et tué plus de 1.800 malades. En augmentation constante depuis le mois de mai, il s’est étendu à la province congolaise de l’Ituri et à l’Ouganda voisin. Une situation épidémiologique extrêmement préoccupante au point que l’Organisation mondiale de la Santé a proclamé il y a quinze jours (le 17 juillet) "un état d’urgence sanitaire mondial" permettant de mobiliser des moyens financiers plus importants pour lutter contre la maladie.

C’est dans ce contexte que trois nouveaux cas ont été diagnostiqués dans la ville de Goma, la capitale provinciale du Nord Kivu mais surtout un centre d’échange économique extrêmement important pour tout le nord du Congo, sur la frontière du Rwanda. Avec une population permanente de plus d’un million d’habitants mais qui peut monter à deux millions avec le passage des gens venus de brousse, donc plus susceptibles d’être porteurs du germe. Vous imaginez la catastrophe si les autorités sanitaires n’arrivent pas à maîtriser la propagation de l’épidémie dans un tel foyer.

Car le virus Ebola a une très forte vitesse de contagion et il est terriblement meurtrier ?

C’est tout le problème ! La maladie est transmise à l’homme par des animaux de forêt comme les roussettes qui sont des chauves-souris fructivores qu’on trouve en quantité dans toute l’Afrique centrale. Elle se développe extrêmement rapidement. La période d’incubation va de deux jours à deux semaines. La moyenne c’est cinq jours, c’est vraiment très virulent et redoutablement létal puisque plus de la moitié des malades infectés vont mourir et qu’il n’y a aucun remède connu à ce jour, seulement des vaccins en stade expérimental et en nombre très insuffisants. La seule solution c’est donc d’isoler les patients contaminés dans des structures de quarantaine, avec des interdictions de circulation. Ce qui est évidemment très mal accepté par les populations locales surtout dans les zones reculées où la survie dépend de sa mobilité, que ce soit sur le plan économique pour la chasse, l’agriculture, le commerce ou parce qu’il faut fuir devant les exactions des divers groupes armés qui écument la province du Kivu depuis 1994. L’autre difficulté importante vient du fait que les corps des victimes d’Ebola doivent être incinérés pour éviter la propagation, ce qui est en totale contradiction avec les rites animistes locaux. Cette pratique a donc provoqué un mouvement de défiance à l’égard des médecins des organisation humanitaires, parfois pris pour cibles par certaines communautés qui cachent leurs malades, ce qui ne rend pas particulièrement aisée l’éradication du virus.