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Chaque matin, Michaël Darmon évoque un sujet précis de la vie politique.

Ce mercredi, Bruno Le Maire présente au parlement la taxe sur les Gafa en France.
Une demande qui existait depuis plusieurs mois et qui apparaît aussi dans les contributions du grand débat. Mais est-ce en phase avec le projet européen publié par le président de la République ?

La question se pose en effet. Les Gafa (Google Amazon Facebook et Apple) sont les géants du numérique.
Sans attendre son adoption au niveau européen, le gouvernement Français veut faire adopter la taxe Gafa. La France fait donc figure de pionnier ce qui n’est pas étonnant, on est toujours créatif en France concernant la fiscalité.
Les chiffres d’affaire sont très importants. En 2017, Google a réalisé plus de 300 millions d’euros pour ne prendre que le G de Gafa. La taxe serait à 3% de leur chiffre d’affaires.

Le problème est que cette initiative française vient en contradiction avec l’approche européenne et celle de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) qui évalue les politiques publiques dans le monde entier.
La question est de savoir quel est le meilleur périmètre pour une telle taxe.
L’OCDE préconise d’imposer sur les résultats des entreprises du numérique plutôt que sur le chiffre d’affaires. Or, les Gafa sont installés dans des pays où elles échappent à l’impôt. On est donc loin d’un accord sur le sujet.
En Allemagne, on est encore réticent à une telle taxe. Mais du côté du ministère de l’Économie, on pointe six pays prêts à suivre la France.
Cette taxe Gafa française montre que l’Europe fiscale n’existe pas.
Pour obtenir une décision européenne, il faut changer de mode de vote en Europe.
La règle de l’unanimité empêche de prendre une décision puisqu’un seul véto bloque tout.
Au moment où Emmanuel Macron diffuse son projet européen dans tous les pays, cette taxe montre que le poids des intérêts nationaux reste très fort.

Cette taxe sur les Gafa répond finalement plus à des objectifs de politique intérieure ?

Effectivement ! Bruno Le Maire a mis cette idée sur la table après le 10 décembre, après l’annonce par Emmanuel Macron des 10 milliards. Le ministre, avec les députés de la Commission des Finances, met une taxe Gafa qui doit remplir les caisses de l’État .
Pourquoi Amazon paierait moins d’impôts qu’une boulangerie ? C’est l’argument souvent mis en avant par le ministre.
Cette taxe est aussi un levier politique pour Bruno Le Maire. S’il a discrètement envisage un temps de briguer un poste de commissaire européen, il a renoncé.
Depuis quelques mois, il envoit des signaux au pole social démocrate de la majorité, dans l’éventuelle perspective d’une inflexion plus sociale du gouvernement.

Bruno Le Maire a rejoint En Marche au début du mandat d’Emmanuel Macron, après la réforme de l’ISF. Avec la taxe sur les Gafa, il cherche à se constituer un capital politique pour jouer un rôle dans l’acte de 2 du quinquennat.