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Les Amazones, ce sont ces guerrières scythes considérées comme égales aux hommes durant l’Antiquité. Mais le 18e siècle a aussi ses amazones: des femmes issues de l’aristocratie, combattant auprès de François de Charette pendant la guerre de Vendée, en pleine Révolution française. Alors que républicains “bleus” et royalistes “blancs” s’opposent violemment, certaines Amazones font ainsi entrer leur nom dans l’Histoire. De la Marquise de la Rochejaquelein à Madame de la Rochefoucauld, Clémentine Portier-Kaltenbach vous présente de valeureuses guerrières de l'Ouest.

Quelle est l’origine du mot « Amazone » ? Le mot vient du grec Amazónes, avec un A privatif, ce qui voulait donc dire « privées de mamelles ». Selon la légende, les Amazones se faisaient couper un sein pour pouvoir tirer à l’arc. Mais l’histoire qui suit ne concerne pas les Amazones de l’Antiquité, plutôt les Amazones vendéennes.

Bonnes cavalières et bonnes tireuses

Beaucoup de femmes aristocrates se sont battues dans les guerres de Vendée. Pourquoi ? Souvent obligées par les circonstances. Certaines de ces femmes ont caché des prêtres réfractaires, ont protégé ou caché leur frère, leur mari, leur père, qui combattaient contre la République. Elles se sont mises à se battre pour se venger des Bleus qui avaient pillé et mis leu feu à leur maison ou leur manoir.

Généralement, ces femmes étaient très bonnes cavalières : dans toute éducation de jeune femme dans l’Ancien Régime, il faut savoir monter à cheval. Elles étaient aussi plutôt adroites au tir parce qu’il arrivait qu’elles chassent avec les hommes. Fortes de ces talents, elles ont donc pris les armes et accepté de mener une vie de proscrites, dormir à la belle étoile et risquer leur vie.

A son quartier général de Légé, le chef vendéen François de Charrette est entouré de ses dames et après les combats, il danse le soir avec elles. Un film retrace cette partie de l’histoire : Les Mariés de l’An II avec Jean-Paul Belmondo et Marlène Jobert.

Des femmes à fort caractère

Parmi ces Amazones, il y a une certaine Madame du Fief, aide de camp de François de Charrette. Son mari a émigré mais elle est restée en Bretagne pour venger la mort de son fils. On la voit galoper à la tête de ses troupes, avec un pistolet à la ceinture, ou avec son fusil de chasse quand elle est à pied. Elle survivra aux guerres de Vendée.

Madame Bulkeley, née Talour de la Cartrie, est une femme magnifique et intrépide. Elle conduit ses troupes avec une robe verte et une écharpe blanche à la taille, un pistolet à la ceinture. Elle sera arrêtée et pour éviter la guillotine, usera du même stratagème qu’Olympe de Gouges : prétendre être enceinte. Contrairement à la femme de lettres, Madame Bulkeley sera épargnée. Elle survivra aux guerres de Vendée, aura quatre maris et mourra à 79 ans.

La comtesse de Bruch, elle, était épouse d’officier et se battait à cheval munie d’un sabre. Elle menait avec elle toute une bande de femmes armées de bâtons. Elle aura moins de chance que les deux femmes précédentes. Au cours d’une échauffourée, elle se rend compte que sa selle est mal sanglée, elle tombe de cheval et un hussard la tue.

La comtesse de la Rochefoucauld et la marquise de Rochejaquelein

Mais les deux Amazones les plus connues sont sans doute Adélaïde de la Touche, comtesse de la Rochefoucauld et la Marquise de la Rochejaquelein.

Madame de la Rochefoucauld était surnommée La Dame de la Garnache par les soldats de Charrette, du nom de sa paroisse. On ne sait pas vraiment si les deux combattants ont eu une histoire d’amour. De Charrette était connu pour être séduisant et attirait beaucoup les femmes. Ils étaient aussi tous deux très jeunes, 33 ans. L’âge auquel ils mourront aussi tous deux…

Elle se lance dans la bataille presque par accident. Elle prend la tête d’un groupe de contre-révolutionnaires et d’embuscade en embuscade, elle est trahie et arrêtée à Dompierre-sur-Yon. Le 24 janvier 1794, jour de son exécution aux Sables-d’Olonne, la guillotine ne fonctionne pas après un usage trop intensif. Marie-Adélaïde de la Rochefoucauld est donc fusillée dans les dunes.

Quant à la marquise de la Rochejaquelein, elle n’a pas fait partie des Amazones par un besoin impérieux de se battre. Elle était folle amoureuse de son mari, le marquis de Lescure et l’un des principaux généraux de l’armée catholique et royale. Elle le suivait en carrosse sur les lieux de combat, et fut présente lorsqu’il prit une balle perdue à la bataille de Cholet en 1793. Dévastée par sa mort, elle prend sa place et poursuit le combat jusqu’à la défaite finale de Savenay en 1793. La chronique précise qu’elle portait le pantalon bouffant des Bretons et faisait le coup de feu comme n’importe quel cavalier.

Madame de la Rochejaquelein a laissé des Mémoires derrière elle, ce qui explique pourquoi c’est souvent d’elle dont on se souvient le mieux, ainsi que de son défunt mari, dont elle décrit longuement la mort.

Les aristocrates font partie des noms les plus célèbres parmi les Amazones mais de nombreuses femmes du peuple s’engagèrent aussi dans cette guerre civile. On pense notamment à Renée Bordereau, dite Langevin, qui décide, après la mort de son père tué sous ses yeux par les Bleus, de se battre jusqu’à la mort.