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Chaque jour, David Abiker scrute la presse papier et le web et décrypte l'actualité.

Notre-Dame : Mélenchon connaît bien les fondations

"Reconstruire", c’est la Une de La Croix, de la Voix du Nord et de la Charente Libre. "Rebâtir", c’est l’autre mot qui fait la Une des quotidiens ce matin en référence aux bâtisseurs de Cathédrales. L’Est Eclair se fait volontariste "Nous rebâtirons" promet le quotidien. "Nous la rebâtirons tous ensemble" a déclaré hier Emmanuel macron dans son allocution télévisé. Mais on ne peut pas reconstruire Notre-Dame en cinq ans comme le voudrait le Président sans rappeler d’où elle vient et sur quelles fondations elle repose. Et parmi les politiques, c’est peut-être Jean-Luc Mélenchon qui en parle le mieux. Voilà ce que déclarait lundi soir le Président de La France Insoumise "La cathédrale de Notre Dame incarne quelque chose de multiséculaire de l’esprit humain et de la connaissance. Quelque chose qui revient de l’Orient vers notre pays quand à la fin des croisades on a commencé dans l’Europe entière à construire des bâtiments qui pour la première fois ne reposaient pas seulement sur le poids des pierres mais sur la capacité des hommes qui construisaient à imaginer cette élévation des murs, la fabrication des rosaces et toutes ces choses qui étaient si nouvelles et qui marquaient une avancée géante de l’esprit humain, la reconnexion avec le passé profond qui avait permis à la science de se conserver en Orient". Il a planché sur la question Jean-Luc Mélenchon et ressuscite le temps des compagnons et des maçons. Et si on parlait d’architecture ce matin ?

Débats d’experts sur une reconstruction

"Les maçonneries sont réalisées en pierre de taille, du calcaire lutétien et le liant est un mortier de chaux. Ce sont des matériaux qui n’aiment pas la chaleur", explique ce matin dans le Figaro Clément Salviani de l’Institut National d’Histoire de l’Art. Et sous l’effet conjugué de la chaleur et de l’eau, cette pierre devient friable. En une phrase, l’expert dit la complexité des débats techniques qui s’annoncent et toute la difficulté du chantier. Et "le débat sera charpenté", explique Libération car les matériaux utilisés varient selon les époques. Charpente en bois d’origine, en métal comme à Saint-Denis ou en béton comme à Reims, reconstruction de la Flèche à l’identique ou modifications ? Et si on retient la charpente en bois, où trouver des chênes bicentenaires se demande le Parisien Aujourd’hui en France, des chênes français, dont le diamètre avoisine les 2,50 mètres ? Ce ne sera pas simple.

Notre-Dame recrute artisans

Rebâtir c’est aussi recruter les artisans couvreurs, les maîtres verriers, les ébénistes, les doreurs et il faudra en plus qu’ils aient la qualification "Monuments historiques", rappelle le quotidien. "Ce qui est positif c’est que la restauration va susciter des vocations", se réjouit le secrétaire général des compagnons du devoir. Et si les métiers d’arts et l’intelligence de la main étaient enfin reconnus dans cette France où on ne jure que par le numérique ?

Des cathédrales reconstruites, l’exemple nantais

Ce mercredi matin, les journaux s’intéressent à ces édifices qui ont connu eux-aussi des incendies. Ouest France explique comment "basiliques et cathédrales se sont relevées", notamment celle de Nantes ravagées par les flammes en 1972. Ou en 2015, la toiture de la basilique Saint-Donatien dont la charpente est partie en fumée en quelques minutes. Les cicatrices nantaises aideront-elles Notre-Dame de Paris, se demande Ouest France ? Deux ans pour protéger l’édifices, quatre ans minimum pour restaurer, 100 personnes mobilisées chaque jours, 70.000 ardoises à poser pour un budget de 13 millions. C’est sans comparaison avec ce qui attend Notre-Dame mais la ville de Nantes compte bien mettre à la disposition de Pris les acquis de son expérience. Idem dans Le Figaro qui fait la liste des bâtiments sacrés déjà détruits par le passé : le saint-sépulcre de Jérusalem incendié en 1809, la cathédrale martyre de Reims en 1919, la cathédrale de Strasbourg bombardé en 1870 ou encore la cathédrale de Chartres incendiées en 1836. Toutes meurtries, toutes restaurées toutes ressuscités.

La colère du directeur de la Tribune de l’art

Malgré cet optimiste, un homme est en colère ce mercredi matin, c’est Didier Rykner. Pour le directeur de la Tribune de l’art le désastre de lundi aurait pu être évité. Il avait averti de la possibilité d’une catastrophe lors de chantiers de restauration et regrette que la loi ne renforce pas davantage les précautions sur les chantiers. "Je suis exaspéré de constater qu’on trouve de l’argent une fois que Notre-Dame a failli finir en cendres tandis qu’il fallait s’évertuer à implorer de l’argent des mécènes étrangers avant qu’ait lieu le drame" et il propose que 50 millions sur l’énorme somme collectée soit reversée aux églises parisiennes qui sont dans un état lamentable.

L’architecture, patrie artificielle des hommes

Alors dans Libération, on lira ce mercredi matin la tribune du philosophe spécialiste d’esthétique Mikaël Labbé qui tire un enseignement positif de la catastrophe "peut-être que la mise en péril de l’architecture exceptionnelle de Notre-Dame saura nous inciter à prendre soin des espaces et des lieux où se déroulent nos vies, ces lieux monumentaux ou infiniment modestes comme la rue d’Aubage à Marseille". L’architecture, dit-il, c’est la patrie artificielle des hommes, le théâtre de la vie. Et il cite Winston Churchill, l’homme qui gouverna une Grande Bretagne ravagée par les bombardements "Nous commençons par construire des édifices et ce sont eux qui nous construisent ensuite". Relisez bien Mélenchon, le président de la France Insoumise ne dit pas autre chose.