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Chaque jour, David Abiker scrute la presse papier et le web et décrypte l'actualité.

Couple Balkany, otages français : vrais et faux procès

Dans la presse, des couples. À commencer par les époux Balkany, Isabelle et Patrick dont le portrait fait la Une de Libération avec ce titre qui colle à merveille avec le sourire carnassier du maire de Levallois "Fini de rire". "C’est l’heure des comptes" qui a sonné pour le Parisien-Aujourd’hui en France idem pour Sud Ouest. Mais pour les éditorialistes, "la chute des époux Balkany devrait marquer la fin d’une époque", comme l’écrit Yann Marec dans le Midi Libre et "refermer cet autre monde. Celui des affaires et de la politique. Celui qui a fait tant de mal à la Ve république". Dans la Charente Libre, Jean-Louis Hervois a une pensée pour les absents "tous ceux du RPR d’hier aux Républicains d’aujourd’hui qui ont couvert, conforté, assisté et profité des magouilles et tromperies qui se tramaient à Levallois". Dans Libération, Laurent Joffrin questionne lui les électeurs de Levallois "ce sont eux qui ont fourni à Balkany son assurance vie politique en le réélisant comme des robots". Dans les journaux ce matin, un autre couple, celui formé par les deux otages français libérés vendredi. Eux aussi ont bénéficié d’une assurance vie qui s’appelle l’armée française, eux aussi font l’objet d’un procès, mais sans doute un faux procès qu’il faut lire ce lundi entre les lignes des éditos.

Otages français : sévérité des éditos

"Les soldats français avaient d’autres missions à assurer que de secourir deux touristes mais si c’est le devoir de l’État Français. Aujourd’hui, ce n’est pas le soulagement qui domine mais l’indignation. On ne souhaite plus jamais pareil piège tendu à nos soldats".  De l’indignation à l’indignité pour les otages libérés jugés imprudents, inconséquents par l’opinion des réseaux sociaux. La frontière est ténue au point que Jean-Marc Chevauché du Courrier Picard se demande pourquoi le Président de la République est allé les accueillir à l’aéroport.

Macron à l’aéroport : qu’allait-il faire dans cette galère

"Qu’allait-il faire dans cet galère le président", interroge l’éditorialiste qui estime que "les deux hommes libérés n’avait pas besoin de lui puisqu’ils n’étaient ni des humanitaires, ni des journalistes". Bref, à lire la presse ce lundi matin, il y aurait donc deux catégories d’otages. Ceux dont il faut se réjouir de la libération et ceux qui n’auraient pas dû partir et exposer les soldats aux risques de leur métier. Faire cette distinction, c’est admettre qu’il y a otage et otage, français et français, qu’il est des risques légitimes et d’autres qui le sont moins. Pourtant non, il y a un État qui protège tous ses ressortissants et c’est l’honneur et le devoir de la République et de ses soldats de les secourir sans jugement. L’héroïsme est à ce prix.

Grandeur et décadence des époux Balkany

Il faut ouvrir les journaux ce lundi pour lire ce qui ressemble au scénario d’une série politico-financière que Netflix ou Canal Plus pourrait intituler "Grandeur et décadence des époux Balkany". "Récit d’une chute titre", les Échos, la chute de la maison Balkany, "Les Balkany dans le box la fin d’une époque". Qu’on le veuille ou non ces deux là nous ont accompagné pendant plus de 30 ans. Leur Dallas à eux, c’était Levallois et c’est en ouvrant le Parisien-Aujourd’hui en France qu’on réalise à quel point l’histoire de ce couple a marqué son époque. Sur une double page, voici donc le casting. Un homme et une femme, un mariage qui tient malgré le temps, un mariage dopé par la passion du pouvoir, par le désir de transformer une ville, par le goût des autres aussi cette vocation du service qu’en science politique on appelle aussi le clientélisme.

Biftons et peignoir brodé

Les Balkany dans les journaux c’est aussi un roman photo : les enfants, l’avocat, le directeur de cabinet et Didier Schuller (dont le témoignage sera déterminant en 2013). Et enfin il y a le décor, le moulin de Giverny, le palais oriental de Marrakech, la villa à Saint-Martin et puis les biftons. Ah les biftons, il faut lire dans Libération la place des liasses de 500 euros dans ce décor. Biftons oublié dans un costume envoyé au pressing, biftons échangé dans un super marché pour de plus petite coupures, biftons toujours, repéré par cet employé de maison du moulin de Giverny et que cite les Échos sur la longueur "Je ne sais pas d’où provenaient les espèces, M. Patrick Balkany arrivait au moulin avec son attaché case et sortait une enveloppe marron épaisse qu’il emportait directement dans son coffre au 1er étage. J’ai le souvenir d’avoir par curiosité compté une liasse de billets qui était sur le bureau de leur chambre. Il y avait 8.000 euros. C’était son argent de poche. Il en avait même régulièrement dans les poches de son peignoir". Un peignoir brodé aux initiales PB pour Patrick Balkany.

Montages juridico-financiers

On pourrait sourire en imaginant le maire de Levallois en peignoir avec son cigare, penser même à Jean-Pierre Marielle dans sa sublime robe de chambre fuchsia dans "Comme la lune" de Jean Seriat mais on ne sourit plus en découvrant toujours dans les Échos la complexité des montages financiers et juridiques mis en place en 30 ans pour financer non plus seulement une carrière politique mais un train de vie personnel. "Après six ans d’enquête, énumère Les Échos, Patrick Balkany sera jugé à partir du 13 mai et durant six semaines pour fraude fiscale, blanchiment de fraude fiscale, corruption passive, blanchiment de corruption, prise illégale d’intérêt et déclaration mensongère de situation patrimoniale à la haute autorité pour la transparence de la vie publique. Une liste longue comme une histoire qui parle d’un temps que l’on croyait révolu : celui des affaires, du financement et de la corruption politiques".