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SAISON 2022 - 2023, modifié à

Découvrez la suite du récit consacré à Magda Goebbels, celle qui fut l’épouse du chef de la propagande nazie Joseph Goebbels. Dès sa première rencontre avec un membre du NSDAP en 1930, la jeune femme comprend que ce qui manque à sa vie, c’est une cause à défendre. Elle rejoint le parti pour participer à ce qu'elle considère comme une épopée héroïque pour l’Allemagne, et y fait la rencontre de Joseph Goebbels, qui devient son époux. Lorsqu’il accède au rang de ministre, Magda Goebbels obtient la vie excitante dont elle avait toujours rêvé. Mais le rôle qu’a en tête pour elle Adolf Hitler, le Führer, est loin d’être celui auquel elle s’attendait... Dans cet épisode du podcast "Au cœur de l’Histoire" produit par Europe 1 Studio, Virginie Girod retrace la vie de ce personnage historique au destin tragique.

"Au cœur de l'Histoire" s'adresse aux passionnés d'histoire mais aussi à ceux qui cherchent à apprendre l'Histoire facilement. Que vous souhaitiez renforcer votre culture générale, ou réviser une leçon d'histoire vue en cours sans passer par les manuels scolaires, ce podcast est fait pour vous.

Pour aider les élèves en préparation du brevet ou du bac d'Histoire-Géographie, "Au cœur de l'Histoire" aborde à travers les destins de divers personnages les grands chapitres du programme scolaire de Troisième ainsi que du programme scolaire de Terminale : Révolution française ; Première Guerre mondiale ; régimes totalitaires dans l'Europe de l'entre-deux-guerres ; Seconde Guerre mondiale, Régime de Vichy, Collaboration et Résistance ; création de l'Union Européenne…

Plus vivants que les fiches de révision, les récits historiques de Virginie Girod vous permettront de mémoriser par l'écoute les enjeux des conflits qui ont marqué la France et l'Europe et d'avoir en tête des exemples de personnages qui y sont reliés.

"Au cœur de l'histoire" est un podcast Europe 1 Studio. 

Ecriture et présentation : Virginie Girod 

- Production : Adèle Humbert 

- Direction artistique : Adèle Humbert et Julien Tharaud 

- Réalisation : Clément Ibrahim 

- Musique originale : Julien Tharaud 

- Musiques additionnelles : Julien Tharaud et Sébastien Guidis 

- Communication : Kelly Decroix 

- Diffusion et rédaction : Eloise Bertil 

- Visuel : Sidonie Mangin

 

Dans l'épisode précédent consacré à Magda Goebbels, l'épouse du ministre de la Propagande a trouvé un sens à sa vie en militant pour le nazisme. Mais elle se voit confier une tâche à laquelle elle ne s’attendait pas.

"Kinder, Küche, Kirche"

Magda, mariée à l'idéologue nazi Joseph Goebbels, est désormais une figure centrale du Troisième Reich. En 1934, au festival d'opéra de Bayreuth, événement prisé des Nazis, Hitler remet les pendules à l'heure. Il adore Magda mais la politique est une affaire d'homme. Les filles peuvent se politiser mais uniquement dans les Jeunesses Hitlériennes. Mais elles finiront par rentrer à la maison pour suivre la règle des trois K. « Kinder, Küche, Kirche » : enfant, cuisine, église.

Les trois K ne sont pas une création nazie, c'est l'art de vivre des conservateurs allemands que les nazis se sont appropriés. Ils ont une vision très conservatrice de la bonne épouse aryenne. En réalité, Hitler a une idée bien précise du rôle qu'il veut donner à Magda : elle va incarner la parfaite épouse nazie, un rôle médiatique de première dame du Reich et de modèles pour les femmes aryennes.

Hitler lui impose de retrouver le mode de vie qui l’avait rendu folle de désespoir chez son premier mari. Mais cette fois-ci, elle sera sous l'œil des caméras. En tant qu’épouse et première adjointe du ministre de la Propagande, elle ne pourra pas se défiler.

En 1932, Magda, âgée de 31 ans, avait déjà mis au monde une petite Helga. Elle comprend qu'en tant qu'égérie du Reich, elle doit avoir beaucoup d'autres enfants, même si ce rôle de mère au foyer n'a rien à voir avec ses ambitions.

Sur ordre de son Führer, Magda retombe enceinte. En 1934, elle accouche de Hildegard. L’année suivante, de Helmut, puis de Holdine, Hedwig et enfin Heidrun, en 1940. Les six enfants, cinq filles et un garçon, portent tous un prénom qui commence par la lettre H, comme Hitler.

La propagande de la famille aryenne

Ces six grossesses ont épuisé Magda, mais elle doit faire bonne figure. Les caméras s'invitent régulièrement à Bogensee, grande ville près de Berlin. La famille Goebbels doit être un modèle de la famille aryenne progressiste pour le peuple allemand. On la filme rentrant de la ville, accueillie par ses adorables bambins blonds. Les caméras sont même là pendant les petits déjeuners. Chez les Goebbels, pas de châtiment corporel, pas de fessée, les enfants peuvent même prendre la parole à table. Les journalistes sont aussi invités à filmer les vacances : les parfaits enfants aryens, à cheval, nageant dans une rivière, mangeant des baies dans les champs.

Toute leur vie de famille sert la propagande nazie. Les épisodes de la parfaite famille aryenne sont projetés au cinéma, dans les actualités qui précèdent les films. Toute l'Allemagne s’émeut devant la magnifique famille du ministre de la propagande et le sourire de la belle Magda. Personne ne semble voir que son sourire si éclatant se fige petit à petit. Sauf sa mère.

Magda se raccroche aux choses matérielles pour continuer à jouer cette comédie qui lui pèse de plus en plus. Un jour, alors qu'elle est dans le jardin de sa villa avec son mari, elle lui fait part de son attachement à Bogensee. Joseph, menaçant, lui répond qu'elle perdra tout ce qu'elle aime si elle ne se comporte pas comme il faut.

Cette attaque gratuite blesse Magda. Leur belle complicité intellectuelle s'est fissurée depuis que Joseph est ministre. Il arpente les plateaux de cinéma, il couche avec toutes les actrices de l’UFA, le studio berlinois. Mais il y en a une qui lui tourne la tête : la Tchèque Lída Baarová.

Magda contre l'amante de son mari

Pour les nazis, les Tchèques sont une race inférieure. Mais on peut faire une exception quand il s'agit d'une actrice à succès avec un très joli visage, qui crève l'écran des films de propagande. De 1936 à 1938 Goebbels suit donc une liaison passionnée avec Lída Baarová. Il s'affiche même en public avec elle.

Magda sent que cette fois, elle a affaire à une vraie rivale. Alors elle l'invite à passer quelques jours à Bogensee. Elle est tellement désespérée à l'idée de divorcer et de perdre son statut qu'elle propose un ménage à trois à l'actrice tchèque. Selon elle, il faut bien deux femmes pour servir un homme aussi extraordinaire que Joseph.

Lída Baarová est terrifiée par cette grande teutonne au regard bleu glacier. Elle fait pression sur Goebbels pour fuir l'Allemagne ensemble. Joseph hésite. Il envisage de quitter Magda et de devenir ambassadeur d'Allemagne au Japon avec sa nouvelle femme. Et si Hitler refuse de lui donner ce poste, tant pis, il deviendra vendeur de cravate au pays du soleil levant avec sa Lída.

C’est la goutte d'eau pour Magda. Elle n'a pas tout sacrifié pour devenir la cocue du Troisième Reich. Elle décide donc de rejoindre Hitler au Berghof, sa résidence secondaire dans les Alpes, et lui expose les faits. De quoi aura l'air le parti nazi si le ministre de la Propagande se sauve avec une actrice ?

Si Hitler ne réagit pas, Magda assure qu'elle prendra les devants et ira exposer sa version des faits dans tous les médias. Mis au pied du mur, Hitler convoque Goebbels. Il aurait alors demandé à son ministre de signer un contrat rédigé par Magda, dans lequel il promet de mieux la traiter, de renoncer à Lída Baarová et d'être plus gentil avec Augusta, sa belle-mère.

Quelques semaines plus tard, en septembre 1939, Hitler envahit la Pologne. Magda est en transe : enfin de l'action ! Son sens du patriotisme lui procure des émotions fortes et surtout, elle va pouvoir sortir de sa maison. La première dame du Reich reçoit une formation d'infirmière, organise des fêtes pour les enfants des soldats, reçoit les militaires les plus méritants en personne, chez elle, sous l'œil avide des caméras. Augusta est atterrée. Comment sa fille peut-elle se réjouir de la guerre ?

Déroute de l'Allemagne et dépression

Magda a fait de ce conflit une affaire de famille. En 1940, elle envoie Harald, son grand garçon âgé de 19 ans, combattre sur le front. Pour lui, pas de passe-droit, il doit faire ses preuves comme tous les Allemands. La mère du Reich est transcendée de joie quand son fils est décoré.

Trois ans plus tard, Harald est blessé. Magda craint de perdre son fils, ça commence à lui déciller les yeux et ce qu'elle voit ne lui plaît pas. La spirale des défaites allemandes vient de commencer. Le soir, quand Joseph rentre, il raconte à Magda en détail la guerre et les camps d'extermination.

Elle sait tout : les déportations et la solution finale. Elle ne peut rien faire, elle ne veut rien faire. Elle n'a même pas réagi quand son beau-père Richard Friedländer a été déporté à Buchenwald, où il est mort en 1939. Tout ça finit par lui peser. La majorité des Allemands n'a pas conscience de la solution finale, le projet d'extermination des Juifs, à moins d'habiter aux abords d'un camp. On ne sait pas vraiment ce qu'il s'y passe.

Magda sent les affres de la dépression l'engloutir à nouveau. Elle écrit à son ami Ello qu'elle sait des choses dont elle ne peut parler à personne. Lucide, elle lui écrit : « Tout ça va mal finir ».

À l'hiver 1944, Magda est une femme brisée. Elle sait que la guerre est perdue à court terme. Elle écrit régulièrement à son ami Ello. Dans une lettre, elle lui dit que si les Allemands gagnent la guerre, Goebbels deviendra aussi puissant qu'elle sera consumée, et il la larguera. Ce sont ses mots. Et si la guerre est perdue, il faudra mourir. Elle sait, comme Goebbels le savait depuis les années 30, que les nazis passeront pour les plus grands criminels de l'histoire. Ni elle ni Joseph ne pourront survivre à la chute du nazisme.

Le bunker de Hitler

En février 1945, alors que les troupes soviétiques avancent inexorablement vers Berlin, Magda confie à sa mère que le Führer ne mourra pas sans Goebbels, Goebbels pas sans elle et elle, pas sans ses enfants. Augusta est horrifiée mais elle ne réussit pas à raisonner sa fille. Magda refuse d'être exfiltrée d'Allemagne, même quand on lui promet une vie paisible aux États-Unis ou en Suisse. Elle voulait une vie intense, une cause, elle ira jusqu'au bout de son fanatisme.

Le 22 avril 1945, les troupes russes sont aux portes de Berlin. Magda réunit quelques affaires, elle dit à ses six enfants qu'il faut se préparer à un grand voyage, comme on en fait au Far West. Ravi, Helmut se déguise en indien. Les enfants montent dans une voiture. Helga, la plus grande, a compris que la destination finale de ce voyage est le bunker de Tonton Hitler, et ses petites sœurs se réjouissent.

Le convoi des enfants Goebbels traverse un Berlin à moitié détruit par les bombes alliées, où les sirènes hurlent sans s'arrêter. Arrivée à la Chancellerie, située au 77 Wilhelmstrasse, la famille descend de voiture et s'enfonce dans le dernier repère de Hitler.

Le bunker de 120 mètres carrés est réparti sur deux étages. Les derniers fidèles, des dignitaires du parti et des domestiques, sont réunis autour de leur maître. Tout le monde s'affole de voir six jeunes enfants dans cette antichambre de l'enfer. Plusieurs fois, on propose à Magda de les exfiltrer. À chaque fois, elle refuse, malgré les supplications de son aînée. Helga ne veut pas mourir. À 12 ans, elle est assez grande pour comprendre la situation est trop jeune pour y échapper par ses propres moyens.

Une semaine plus tard, le 29 avril, Hitler épouse Eva Braun. Le lendemain, il fait ses adieux à son dernier cercle. Il offre à Magda son insigne en or du parti nazi. La première dame du Reich est émue aux larmes, même si au fond d'elle, elle a cessé de croire au génie de Hitler.

Elle le supplie de vivre mais le Führer ne l'écoute pas. Hitler et Eva Braun se retirent pour se suicider. Leurs corps sont immédiatement brûlés dans un cratère de bombe, à l'extérieur du bunker, pour ne pas être profanés.

Joseph Goebbels est maintenant le premier homme d'un Reich en ruine. Magda et son mari sont arrivés au bout de leurs ambitions. Ils sont au sommet de leur monde et le prix à payer pour cette ascension sociale, où les corps ensanglantés des déportés ont servi de marchepied, est la mort.

Infanticide et suicide

Ce soir-là, Magda écrit une lettre à son fils Harald. Elle lui explique le geste auquel elle se prépare, l'infanticide de ses six frères et sœurs. Elle lui donne la même raison qu'elle avait déjà énoncée à sa mère et à Ello : ils sont trop bons pour le monde qui viendra après eux.

Magda s'enferme dans sa lutte nazie : le national-socialisme lui a donné une vie extraordinaire, intense, elle est prête à mourir pour lui. Quant à ses enfants qu'elle aime sincèrement, elle préfère les tuer de peur qu'ils ne soient persécutés ou torturés.

Le 1er mai 1945, après avoir endormi ses enfants avec des somnifères, Magda leur fait ingérer du cyanure. Quelques heures plus tard, le couple, paré de ses plus beaux habits, salue les derniers militaires présents dans le bunker et remonte dans le jardin. Il est 20h30, l'atmosphère est apocalyptique.

Magda et Joseph se regardent dans les yeux. Le chancelier tend une capsule de cyanure à sa femme. Magda l’avale et Joseph lui tire une balle dans la tête, avant de retourner l'arme contre lui. Des SS incinèrent leurs corps.

Le lendemain, l'armée soviétique aligne devant ses caméras les corps tranquilles des six enfants habillés en blanc, et à côté d'eux, ceux calcinés de leurs parents. Une dernière fois, la famille fait l'objet d'un film de propagande. La première dame du Troisième Reich est devenue l'incarnation féminine du mal.

Magda était une ambitieuse et une fanatique. Si elle avait été un homme, elle aurait été un cadre du parti nazi. Mais en tant que femme elle s'est laissée réduire à un rôle qui l’oppressait : celui d’épouse et de mère. Mais celle du Reich.

 

 

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