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SAISON 2020 - 2021

Qui pourrait aujourd'hui revendiquer le trône de France ? Dans ce nouvel épisode du podcast Europe 1 Studio "Au cœur de l'Histoire", Jean des Cars fait le point sur les deux familles dont les descendants se disputeraient la couronne en cas de restauration. 

Malgré la mort, sans postérité, du comte de Chambord et du fils du comte de Paris, deux familles revendiquent encore aujourd'hui la couronne de France. Dans ce nouvel épisode du podcast Europe 1 Studio "Au cœur de l'histoire", Jean des Cars vous présente les deux hommes qui pourraient accéder au trône en cas de restauration : l'arrière arrière petit fils de Louis Philippe, et un Bourbon d'Espagne, descendant de Louis XIV. 

Les descendants de Louis-Philippe 

Le comte de Paris, qui a fini par se mettre d’accord avec le comte de Chambord, est le petit-fils de Louis-Philippe, roi des Français. On les appelle Orléans car ils descendent du frère de Louis XIV, Philippe, duc d’Orléans. Son fils, qui se prénomme aussi Philippe et qui devient aussi duc d’Orléans, est régent pendant la minorité du roi Louis XV. Le fils du régent, Louis-Philippe, est lui aussi duc d’Orléans, mais il est entré dans l’histoire sous le nom de Philippe Egalité. 

Député de la noblesse aux Etats Généraux en 1789, il est l’un des premiers nobles à se joindre au Tiers-Etat. Il fait de sa résidence au Palais Royal un centre d’agitation révolutionnaire. Élu député de Paris à la Convention en 1792, il vote la mort de son cousin, le roi Louis XVI. Arrêté en avril 1793, il est, lui aussi, guillotiné. 

Son fils, Louis-Philippe, qui a pris part aux campagnes de 1792 et participé à la bataille de Valmy, doit, comme la branche aînée des Bourbons, s’exiler pour échapper à la guillotine. Il est le nouveau duc d’Orléans, émigré et fils d’un régicide…

Il voyage beaucoup, de la Suisse à Hambourg, de la Scandinavie aux Etats-Unis, où il séjourne de 1797 à 1799. A son retour en Europe, il s’établit en Angleterre et tente de se rapprocher de ses oncles Bourbon, les frères de Louis XVI : le comte de Provence et le comte d’Artois. Mais ceux-ci se méfient de lui : ils le voient comme un rival. 

En novembre 1809, il épouse Marie-Amélie, fille du roi Ferdinand IV de Naples et part vivre en Sicile, dans sa belle-famille. Pour le prince fils de régicide, trouver une épouse n’a pas été chose facile… Seuls les Bourbon Sicile l’ont accueilli avec bienveillance.

A la Restauration, Louis-Philippe revient d’exil et entre en possession des biens immenses de sa famille. Pendant les Cent Jours, il s’exile en Angleterre mais Louis XVIII, toujours méfiant, ne lui permet de rentrer en France qu’en 1817.

Installé au Palais-Royal, il affecte de vivre comme un simple bourgeois malgré son immense fortune. Il envoie ses cinq fils au Collège Henri IV. Il se met à fréquenter des hommes politiques, des financiers et des écrivains appartenant à l’opposition. En janvier 1830, il est devenu l’espoir de la bourgeoisie d’affaires. 

Il a autour de lui un groupe très actif : le banquier Laffitte, Casimir Périer, Guizot et Thiers. Leur soutien sera décisif lors des Trois Glorieuses, lorsqu’il réussit à faire abdiquer son cousin Charles X et à se faire proclamer lieutenant-général du royaume le 31 juillet, puis roi des Français le 7 août. Il faut noter la nuance de ce titre : contrairement à ses prédécesseurs, il se veut proche du peuple. 

La Monarchie de Juillet (c’est ainsi qu’on appelle le règne de Louis-Philippe) est une période de développement économique pour la France. Le souverain tente une réconciliation avec les Bonapartistes en organisant une impressionnante cérémonie en 1840 pour le retour des cendres de Napoléon depuis Sainte-Hélène et leur installation aux Invalides. Mais cet attachement à la cohésion des Français n’empêchera pas le roi-citoyen d’être la cible de sept attentats.

En 1842, la mort accidentelle de son héritier le duc d’Orléans, qui était très apprécié, porte un coup à la dynastie. Mais la chute de Louis-Philippe est provoquée par le conservatisme du chef du gouvernement, Guizot, qui s’oppose obstinément à toute réforme électorale. La "campagne des banquets", en 1847, prépare une Révolution. Elle éclate le 22 janvier 1848. Louis-Philippe abdique en faveur de son petit-fils, le comte de Paris, mais c’est trop tard. Le roi détrôné est obligé de se réfugier en Angleterre. La reine Victoria met à sa disposition la résidence de Claremont, dans le Surrey.

Ses quatre fils, le duc de Nemours, le prince de Joinville, le duc d’Aumale et le duc de Montpensier l’accompagnent dans son exil. Il s’éteint en Angleterre en 1850. Après la chute du Second Empire, grâce à l’abolition de la loi d’exil, ses héritiers peuvent se réinstaller en France.

La relève des Orléans 

On a vu que le petit-fils de Louis-Philippe, le comte de Paris, n’a pas réussi à s’imposer en 1871. Il en ira de même pour son fils, qui porte le titre de duc d’Orléans, et mourra sans postérité.

Mais le comte de Paris avait un frère, Robert, duc de Chartres. C’est son fils Jean, duc de Guise, qui se retrouve à la tête de la maison d’Orléans après la disparition, en 1926, de Philippe duc d’Orléans, fils du comte de Paris. 

Soumis à la loi d’exil, rétablie entre-temps, le duc de Guise s’installe en Belgique, au Manoir d’Anjou, près de Bruxelles. Il vit aussi beaucoup au Maroc Espagnol, où il possède un immense domaine, Larache. Jean de Guise avait épousé une fille du comte de Paris, sa cousine germaine Isabelle, en 1899. Leur fils Henri, né en 1908, porte le titre de comte de Paris. A la mort de son père en 1940, il est le nouveau chef de la maison d’Orléans.

En avril 1931, Henri, comte de Paris, épouse Isabelle d’Orléans-Bragance, toujours une cousine. Le mariage a lieu à Palerme, en Sicile, au palais Orléans. C’est un mariage extrêmement médiatisé : l’élégance et la beauté des jeunes mariés ont attiré journalistes et photographes. Un grand nombre de royalistes français font le déplacement. 

Dans cette période troublée des Années Trente et devant l’instabilité politique, la monarchie redevient à la mode. Le comte de Paris a été formé à la politique par Charles Benoist, journaliste et diplomate, grand admirateur de Machiavel. Du vivant de son père, avant même de devenir chef de la maison d’Orléans, et malgré son exil, il a toujours manifesté un intérêt passionné pour les affaires françaises. Très tôt, il est convaincu de la nécessité d’adapter les espérances royalistes aux données de la France moderne. 

Estimant que les excès de l’Action française risquent de compromettre un retour de la monarchie, il rompt avec ce mouvement en 1937. Pendant la Seconde Guerre mondiale, lui-même, entre 1939 et 1940, accomplit une mission d’information pour le Deuxième Bureau et prend contact avec le chef du gouvernement du maréchal Pétain à Vichy, Pierre Laval. On lui offre le ministère du Ravitaillement, il refuse. 

Le prince se rend alors à Alger où il a des soutiens fidèles et puissants. Ceux-ci tentent de profiter de l’incertitude qui suit le débarquement allié en Afrique du Nord pour monter un complot où se mêlent gaullistes et monarchistes, qui aboutit à l’assassinat de l’amiral Darlan, en décembre 1944. 

Le comte de Paris n’en tire aucun profit. Les Américains mettent un veto à sa présence dans le futur gouvernement de la France. Il rejoint alors sa famille dans leur propriété de Larache, au Maroc espagnol. Son père, le duc de Guise, meurt en 1940. Désormais, il se considère comme le chef de la maison de France.

La famille s’est considérablement agrandie : Henri et Isabelle ont déjà neuf enfants. Isabelle née en 1932, Henri en 1933, Hélène en 1934, François en 1935, Anne en 1938. Les cinq premiers enfants sont nés en Belgique, au Manoir d’Anjou. Diane naît en 1940 au Brésil où vit la famille de la comtesse de Paris. Les jumeaux Jacques et Michel naissent en 1941 au Maroc, ainsi que la princesse Claude en 1943. La famille séjourne ensuite en Espagne, où naît Chantal en 1946. Cette année-là, la tribu se fixe au Portugal, à la Quinta do Anjinho, à une trentaine de kilomètres de Lisbonne. C’est là que leur dernier fils, Thibaut, voit le jour en 1948.

En 1950, l’abrogation de la loi d’exil de 1886 permet  au comte de Paris de s’installer en France avec sa famille. Ils choisissent comme port d’attache une grande maison nommée "Le Cœur Volant" sur la colline de Louveciennes.

Dès son retour dans l’hexagone, le comte noue de nombreux contacts avec des personnalités politiques de toutes tendances. Il va beaucoup recevoir au Cœur Volant. La famille suscite une grande curiosité et de nombreux reportages lui sont consacrés. 

Le comte de Paris espère bien réussir à restaurer la monarchie en France. Sachant que le général de Gaulle est favorable à l’idée monarchique, garante de stabilité, il le rencontre une première fois en tête à tête le 13 juin 1954 à Saint-Léger en Yvelines. 

Le prince est très favorable au retour du général au pouvoir en 1958. Ils se rencontrent encore à de nombreuses reprises. Il semble que le comte de Paris ait mené plusieurs missions officieuses pour le nouveau président de la République. Mais l’idylle ne va pas durer. Le comte comprend vite que de Gaulle n’envisage nullement d’en faire son successeur. Il en conçoit une immense amertume. 

Au même moment, il a une crise cardiaque qui l’oblige à ralentir ses activités. Désormais, il se consacre à la Fondation Saint-Louis qu’il crée officiellement en janvier 1974. Elle succède à la société civile du domaine de Dreux, créée à la fin du XIXe siècle par la volonté des enfants et des petits-enfants du roi Louis-Philippe. Le but en est d’assurer la sauvegarde du patrimoine historique de la famille, notamment la chapelle royale de Dreux où sont les tombeaux des Orléans et le château d’Amboise, joyau de la Vallée de la Loire. 

Entre-temps, la famille a vécu des jours heureux et un grand malheur. Les jours heureux, c’est le mariage d’Hélène, la première à quitter le nid, celui de l’héritier Henri, comte de Clermont, et celui de Diane en juillet 1960. Un mois plus tard, le comte et la comtesse de Paris sont seuls dans leur quinta au Portugal. Le téléphone sonne. C’est Henri, qui appelle de Paris pour leur apprendre la mort au combat, en Algérie, de leur deuxième fils, François.

La France entière va partager la douleur des Orléans, tout comme elle s’était émerveillée des trois mariages qui avaient précédé cette tragédie. Le prince François avait 25 ans. Il est tombé en haute Kabylie, au matin du 11 octobre 1960. Ses parents se précipitent en Algérie. Une messe de requiem a lieu dans la cathédrale d’Alger. Les obsèques se déroulent à Dreux le 17 octobre. Au cours des années suivantes, les autres enfants se marient. En dehors de Thibaut, "le Cœur Volant" est vide à présent.

Le comte de Paris prend alors la décision de se séparer de son épouse. A partir de 1980, on ne les voit presque plus jamais ensemble. On trouve parfois étrange qu’ils s’embrassent en se retrouvant dans l’église lors du baptême d’un de leurs petits-enfants. Impossible de savoir qu’ils ne se sont en fait pas vus depuis six mois ! La comtesse de Paris en souffre. Elle a toujours aimé son mari et vit désormais dans un appartement rue de Miromesnil. Le prince est à Chantilly dans une modeste maison. Une dame de compagnie veille sur lui et partage désormais sa vie. Il s’éteint en 1999, son épouse quatre ans plus tard. Ils reposent côte à côte dans la chapelle de Dreux. 

Leur petit-fils Jean, actuel comte de Paris, revendique le trône de France sous le nom de Jean IV. Il est marié et a cinq enfants. Il tente de maintenir le flambeau mais la France, qui se passionne tant pour la famille royale britannique, a-t-elle encore la fibre monarchique ? 

Orléans vs. Bourbons

Si les Bourbons de France se sont éteints avec le comte de Chambord, les descendants directs de Louis XIV sont encore nombreux, à commencer par l’actuel roi d’Espagne, Felipe VI. En effet, on sait qu’à la suite de la guerre de succession d’Espagne, le petit-fils de Louis XIV, Philippe, duc d’Anjou, est devenu Philippe V, roi d’Espagne. Celui-ci a eu une abondante descendance qui comprend plusieurs branches, dont les Bourbon Sicile et les Bourbon Parme. 

Mais dans les descendants directs du roi d’Espagne Alphonse XIII, arrière grand-père du souverain actuel, se trouve le prince Alphonse de Bourbon, qui a épousé la petite-fille de Franco. Les légitimistes français l’ont choisi comme prétendant. C’était périlleux car en devenant roi d’Espagne, Philippe V avait renoncé à toute prétention dynastique sur la France, pour lui et ses descendants.

Le destin d’Alphonse de Bourbon est particulièrement tragique. Séparé de son épouse, il cause la mort de son fils aîné Francisco, âgé de 12 ans, lors d’un accident de voiture en 1984. Il trouve lui-même tragiquement la mort le 30 janvier 1989, décapité par un câble en pleine descente à skis, aux Etats-Unis. Les légitimistes français reconnaissent son second fils, Louis Alphonse, comme prétendant. Il revendique aujourd’hui le nom de Louis XX. Marié à une Vénézuelienne, il vit entre l’Espagne et les Etats-Unis avec femme et enfants.

En 2021, la commémoration du bicentenaire de la mort de Napoléon à Sainte-Hélène va mettre à l’honneur la famille impériale. Les Bonapartistes ont aussi leur prétendant, chef de la maison impériale, le prince Jean-Christophe Napoléon, âgé de 34 ans, et marié depuis un an. Légitimistes, orléanistes, bonapartistes, chacun a son prétendant. Comme au XIXe siècle finalement…

 

Ressources bibliographiques : 

Jean-Paul Clément, avec le concours de Daniel de Montplaisir, Charles X, le dernier Bourbon (Perrin, 2015)

Arnaud Teyssier, Louis-Philippe, le dernier roi des Français (Perrin, 2010)

Georges Poisson, Le comte de Chambord (Pygmalion, 2009)

Isabelle, comtesse de Paris, Tout m’est bonheur (Robert Laffont, 1981)

 

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"Au cœur de l’Histoire" est un podcast Europe 1 Studio

Auteur et présentation : Jean des Cars
Production, diffusion et édition : Timothée Magot
Réalisation : Jean-François Bussière
Graphisme : Karelle Villais