Plan d’investissement : la stratégie du gouvernement pour trouver 57 milliards d’euros

Édouard Philippe et Jean Pisani-Ferry ont présenté le plan d'investissement 2018-2022.
Édouard Philippe et Jean Pisani-Ferry ont présenté le plan d'investissement 2018-2022. © CHRISTOPHE SIMON / AFP
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Édouard Philippe a dévoilé lundi matin le plan d’investissement préparé par l’économiste Jean Pisani-Ferry. Au total, 57 milliards d’euros seront alloués sur cinq ans.

Chose promise, chose due : quatre mois l’élection d’Emmanuel Macron, le gouvernement met la main à la poche pour relancer l’économie. Le Premier ministre Édouard Philippe a reçu lundi matin des mains de l’économiste Jean Pisani-Ferry un plan d’investissement de 57 milliards d’euros – contre 50 prévus initialement, étalé sur la durée du quinquennat et répartis sur 25 initiatives. Une somme non-négligeable alors que le budget 2018, présenté mercredi, prévoit de son côté 16 milliards d’euros d’économies pour la seule année prochaine. Pour résoudre ce dilemme budgétaire, le gouvernement a dû innover et jongler avec les milliards.

Des investissements réorientés. Sur les 57 milliards d’euros de ce plan d’investissement, 12,1 milliards proviennent de crédits existants qui vont être redéployés, "afin de servir au mieux les priorités du Grand Plan d’Investissement", affirme le rapport. Priorité est donc donnée à ce nouveau plan, quitte à tailler dans investissements actuels. Le gouvernement ne précise pas quels secteurs seront touchés mais donne un exemple : "10% des crédits de formation professionnelle des agents publics seront mobilisés pour accompagner l’évolution de leurs métiers dans le contexte de développement du numérique".

En plus, 11 milliards d’euros proviendront de "financements qui n’ont pas d’effet sur le déficit public,  comme des prêts, des fonds propres ou des fonds de garantie". Une large partie de volet sera empruntée auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et Bpifrance et la Banque européenne d’investissement seront sollicitées. Le plan intègre également le troisième Programme d’investissement d’avenir (PIA), créé par le précédent gouvernement mais pas financé. Sur les 10 milliards alloués, 6 proviendront de subventions et 4 de fonds propres.

Le gouvernement a ciblé quatre secteurs. © Le grand plan d’investissement 2018-2022, Jean Pisani-Ferry

La responsabilité incombe aux ministères. Toutefois, la majeure partie du plan d’investissement repose sur une nouveauté en termes de financement. Jusqu’ici, pour financer ses plans d’investissement, l’État allait puiser dans des fonds extrabudgétaires. Autrement dit, il s’agissait de dépenses supplémentaires par rapport à celles enregistrées dans les lois de finance annuelles. Cette fois, la distribution de crédits sera beaucoup plus encadrée, puisqu’elle sera intégrée au budget de chaque ministère, à hauteur de 24 milliards d’euros. Concrètement, les administrations ministérielles devront, chaque année, "sanctuariser" une portion de leur budget pour l’investissement. Sont notamment concernés les ministères du Travail, de la Transition écologique, de l’Agriculture, de la Santé, de l’Économie, de l’Action et les comptes publics, des Transports.

Au total, sur les 57 milliards, l’État doit en trouver 30 nouveaux (les 24 des ministères et les 6 de subvention du PIA). Dans son rapport, Jean Pisani-Ferry assure toutefois que ces mesures "sont intégrées à la trajectoire de finances publiques" du quinquennat. Pas de dépenses imprévues au programme, donc. L’ensemble reste néanmoins assez obscur, notamment sur la façon dont les ministères vont devoir élaborer leur part de budget réservée à l’investissement.

Montée en puissance progressive. Quoi qu’il en soit, le plan d’investissement sera lancé en 2018. Mais combien d'argent sera débloqué dès 2018 ? "Il y aura un temps de départ… L'idée est de ventiler sur cinq ans et d'avoir un cinquième qui soit mobilisable chaque année", a expliqué le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner. Plus précisément, la distribution indicative se fera telle quelle : 7,5 milliards en 2018, 10 milliards en 2019, 13 milliards en 2020, idem en 2021 et enfin 11 milliards en 2022. Manquent à l’appel quelques milliards, variable d’ajustement du gouvernement.

Suivi annuel. Par ailleurs, l’attribution des crédits telle qu’elle a été définie par le rapport de Jean Pisani-Ferry n’est pas figée. "Un suivi attentif permettra de faire le point régulièrement sur l’efficacité des investissements. Si l’impact socio-économique des investissements est élevé, ils seront renforcés. S’il est faible, les investissements seront diminués au profit d’autres investissements du Grand Plan", peut-on lire dans ce rapport. Il n’est donc pas exclu qu’en cours de route, certains secteurs voient leurs crédits augmenter ou diminuer.