Loi El Khomri : ce qui fâche les artisans et les professions libérales

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Le président de l'UNAPL Michel Chassang aux côtés de la ministre du Travail Myriam El Khomri, le 27 novembre 2015 © ERIC PIERMONT / AFP
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Marianne Skorpis , modifié à
Les artisans et les professions libérales sont vent debout contre un article du projet de loi, qui modifie les règles de représentativité des organisations d'employeurs.

Pour les patrons, le projet de loi El Khomri sur le code du travail va "dans le bon sens". Tout le patronat ? Non. Si le Medef et la CGPME (Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises) se félicitent de ce texte, les artisans et les professions libérales y sont rétifs. L’UPA (Union professionnelle artisanale), par la voix de son numéro un Jean-Pierre Crouzet, a appelé mercredi le gouvernement à “revoir sa copie”.

Cette organisation se bat aux côtés de l’UNAPL (Union nationale des professions libérales) contre un volet du texte qui concerne la représentation des entreprises dans les instances paritaires et dans celles de financement du paritarisme, et qui a été occulté par le débat sur les droits des salariés. L’article 20 du texte propose de nouveaux critères de représentativité des organisations d’employeurs qui, s’ils étaient mis en oeuvre, seraient plus favorables aux grandes entreprises qu’aux artisans et aux professions libérales.

>> Ce que prévoit la loi actuelle

C’est aujourd’hui la loi Sapin de 2014 relative sur la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale qui est appliquée dans ce domaine. Elle mesure la représentativité des organisations d’employeurs à leur nombre d’adhérents, sur le principe "une entreprise égale une voix".

>> Ce qui pourrait changer avec la loi

C’est ce principe, plus favorable aux petites entreprises, que l’article 20 du projet de loi El Khomri entend corriger. Selon le texte, le calcul de la représentativité des organisations d’employeurs sera mesuré à hauteur de 20% sur le nombre d’entreprises adhérentes et à hauteur de 80% sur le nombre de salariés des entreprises représentées. Ces nouvelles règles font ainsi prévaloir la taille des entreprises adhérant aux organisations d’employeurs sur le nombre de sociétés qu’elles représentent. Ces organisations doivent prouver qu’elles représentent "au moins 8 % de l'ensemble des entreprises adhérant à des organisations professionnelles d'employeurs" pour être reconnues par le ministère du Travail dans les branches professionnelles et surtout au niveau national et interprofessionnel.

>> Ce qu'en disent les artisans

En résumé, les artisans et les professions libérales craignent que la nouvelle loi ne donne le pouvoir aux grandes entreprises, moins nombreuses mais comptant plus de salariés. Michel Chassang, le président de l’UNAPL, estime que "les TPE-PME sont totalement oubliées dans la loi". Pour Jean-Pierre Crouzet, les membres du gouvernement "crient leur amour pour les TPE-PME (très petites entreprises et petites et moyennes entreprises, ndlr) et (...) dans les faits font presque tout pour les entreprises du CAC 40", représentées par le Medef. L’UPA a d’ailleurs quitté lundi la négociation sur l’assurance-chômage en signe de protestation. Elle insiste sur le fait que l’article 20 de la loi El Khomri est la transcription d’un accord conclu entre le Medef et la CGPME fin janvier.

La loi n’est pas pour l’instant pas figée : elle vient d’être envoyée au Conseil d’Etat et doit être présentée en Conseil des ministres le 9 mars, avant d’entrer dans le circuit parlementaire. L’UPA et l’UNAPL se disent prêtes à faire valoir leurs revendications auprès des députés et des sénateurs si le gouvernement n’accède pas à leur demande.