La fraude au chômage partielle a atteint les 225 millions, "assez peu" selon le ministère du Travail par rapport aux 30 milliards d'euros du dispostif global. 0:48
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Olivier Samain, AFP, édité par Séverine Mermilliod
Le ministère du Travail a annoncé jeudi que le cap des 50.000 contrôles sur les demandes de chômage partiel avait été franchi, avec un total de 225 millions d'euros de fraude. Plus de la moitié a été récupérée. Les contrôles ont débouché sur 9.500 "suspicions" de fraude et 440 procédures pénales sont en cours. 

Le dispositif de chômage partiel a été ouvert de façon très large dès le début du confinement au mois de mars, pour permettre aux entreprises de ne pas licencier alors que leur activité plongeait. Mais au bout de quelques semaines, les services du ministère du Travail ont engagé des contrôles pour vérifier que les entreprises qui percevaient l'aide de l'Etat ne faisaient pas travailler parallèlement leurs salariés. Et sur 270.000 contrôles effectués - dont 220.000 menés a priori et les 50.000 menés a posteriori (après le paiement) -, la fraude au chômage partiel est évaluée à 225 millions d'euros, a annoncé jeudi le ministère du Travail.

"Assez peu" rapporté aux 30 milliards du dispositif selon le ministère

Plus de la moitié de ce montant a déjà été bloquée ou récupérée, sur un dispositif global de 30 milliards d'euros pendant toute la crise. Cela représente donc moins de 1% du budget total consacré à l'activité partielle, qui a été largement utilisée dans la crise du coronavirus avec près de 9 millions de salariés concernés au plus fort de la crise en avril, un chiffre retombé à 2,4 millions en juillet.

Mi-juillet, la ministre du Travail Élisabeth Borne avait jugé cette fraude "scandaleuse" sur Europe 1. Elle avait indiqué fin juillet que 25.000 contrôles avaient débouché sur 1.400 "suspicions" de fraude. Elle avait anticipé ces 50.000 contrôles avant "la fin de l'été". Le ministère du Travail a souligné auprès de l'AFP que "le montant des fraudes peut paraître important mais au regard des 30 milliards mobilisés, c'est finalement assez peu". "Il y a toujours des escrocs et des gens qui profitent du système", a-t-on ajouté de même source.

"Désastre financier" d'après des agents de l'inspection du travail

L'Humanité et le Canard enchaîné ont fait état cette semaine du message d'alerte d'un agent de l'inspection du travail de Seine-Saint-Denis, après 15 jours consacrés à étudier des dossiers d'activité partielle. Le document de quatre pages, consulté par l'AFP, dans lequel l'agent dit avoir "cessé de dormir" et évoque un "désastre financier", rapporte notamment le cas d'une entreprise ayant perçu environ 147.000 euros "et dont l'argent est déjà parti en Pologne depuis un compte en ligne ouvert sans justificatif de domicile". Il évoque aussi au moins cinq entreprises n'ayant "aucun salarié connu de l'Urssaf" pour lesquelles il a demandé le blocage du paiement.

"On pense que tout cela est massif au niveau national", a affirmé à l'AFP Simon Picou, représentant syndical CGT de l'inspection du travail. "On ouvre une caisse pleine de billets et on dit : 'servez vous'", a-t-il ajouté, déplorant notamment le manque de justificatifs demandés aux entreprises.

Dans un rapport publié lundi, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la fraude sociale estimait pour sa part que le dispositif d'activité partielle "apparaît comme vulnérable à la fraude" et jugeait que les contrôles devaient être "amplifiés".

En cas de fraude, les sanctions vont jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende, et pour ce qui est des sanctions administratives, elles prévoient le remboursement des aides et l'exclusion du bénéfice des aides jusqu'à 5 ans.