Carrez : "la réserve de précaution n’est pas suffisante"

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Le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale explique ce mécanisme prévu dans le Budget 2016.
INTERVIEW

Accueil des migrants, aides aux agriculteurs... Le Budget 2016 prévoit au moins 600 millions d'euros de dépenses supplémentaires. Où va-t-on les trouver ? "Dans les 'réserves de précaution', comme on dit dans le jargon : des sommes que l'on met en réserve en fonction de l'actualité. En début d'année, on gèle 8% des crédits pour faire face aux imprévus", a expliqué Christian Eckert, secrétaire d'Etat chargé du Budget, invité jeudi d'Europe 1. On a demandé à Gilles Carrez, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, de nous éclairer sur ce point.

Qu’est-ce qu’une réserve de précaution ?

Elle est inscrite chaque année dans la loi de finances et elle fait même l’objet d’un vote spécifique au Parlement. L’idée, c’est que si les parlementaires votent un budget de 100 euros, par exemple, alors l’administration ne pourra en utiliser que 92 et les 8 euros restants iront dans cette ‘réserve’. Ce qui, en soi, est une négation du vote des élus du peuple. Pourquoi ne pas nous faire directement voter sur 92 euros ?

Son montant est-il variable ?

Absolument. C’est au gouvernement d’en décider. Le taux était auparavant de 6%, puis il est passé à 7 et il est désormais à 8%. Cela représente aujourd’hui une somme d’environ huit milliards d’euros. Sauf que sur les 100 milliards d’euros de budget concernés, seulement la moitié est susceptible d’être affectés à cette réserve de précaution. Prenons l’exemple du budget des allocations logement. Et bien ce n’est pas à l’Etat de décider, c’est à chaque Français ! Si quelqu'un a droit à une aide, alors il la percevra. Donc on ne peut pas mettre des crédits en réserve sur ce type de budget.

La réserve vous semble-t-elle suffisante ?

Non, car sur les huit milliards d’euros prévus, seulement quatre peuvent servir à des dépenses non prévues - alors que c’est la raison d’être de cette réserve de précaution. Comme il est impossible de rogner sur les dépenses de personnel, c’est dans les crédits d’investissement ou de recherche que l’on va économiser. Conclusion : ces dépenses d’avenir disparaissent du budget de l’Etat et c’est désormais à la charge des administrations. Et puis j’entends parler du chiffre de 600 millions d’euros de dépenses supplémentaires. Or, je n’y crois pas une seconde, ce sera bien plus que cela !