Vers une taxe Tobin revue au rabais ?

La taxe sur les transactions financière (TTF) sera au menu de la réunion des ministres des Finances de la Zone euro, vendredi.
La taxe sur les transactions financière (TTF) sera au menu de la réunion des ministres des Finances de la Zone euro, vendredi. © Reuters
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FINANCE - La France propose une taxe sur les transactions financières européenne moins large que prévue.

La taxe Tobin est une nouvelle fois sur la table européenne. Cette taxe sur les transactions financière (TTF) sera au menu de la réunion des ministres des Finances de la Zone euro, vendredi. La taxe Tobin, c'est cette mesure censée taxée les échanges d'action et de produits dérivés sur les marchés financiers. En mai dernier, onze Etats européens, l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, l'Espagne, l'Estonie, la France, la Grèce, l'Italie, le Portugal, la Slovaquie et la Slovénie, se sont mis d'accord pour en adopter une version commune en 2016. Mais la France arrive vendredi avec une proposition de dispositif au rabais, au grand dam de l'Allemagne.

La taxe Tobin, c'est quoi déjà ? A l'origine, la taxe Tobin devait ponctionner les échanges d'actions sur les marchées financiers, ainsi que tous les échanges de produits dérivés, sortes de garanties qui assurent l'acheteur contre des risques financiers. Le but principal de la taxe : empêcher que ces produits à risque ne se multiplient à outrance. En deux ans, les échanges en la matière ont bondi de 10%. Au total, plus de 700.000 milliards de ces garanties s'échangent sur les marchés actuellement. En mai, les onze pays cités plus haut se sont mis d'accord pour taxer les échanges d'actions à 0,1%. Mais la question des produits dérivés a été reportée à une date ultérieure.

Que demande la France ? "Je préfère une taxe imparfaite à pas de taxe du tout", déclarait déjà François Hollande, en février. Et dans une tribune aux Echos publiée vendredi, le ministre des Finances français, Michel Sapin, a effectivement détaillé les contours d'une "taxe imparfaite". Paris veut une mesure qui ponctionne les échanges d'action, mais pas tous les produits dérivés. Michel Sapin veut seulement s'attaquer au "Crédit défaut Swap" (CDS), catégorie de produits dérivés les plus à risque. Les CDS, en effet, assure contre le risque de faillite de celui qui les achète.

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En quoi cela pose problème? Le hic, c'est qu'une taxe version Michel Sapin rapporterait beaucoup moins que prévue. Taxer l'ensemble des produits dérivés pourrait rapporter, en effet, jusqu'à 21 milliards d'euros, si leurs échanges restent au même niveau qu'aujourd'hui, selon le cabinet indépendant Sia Partners. Or, les CDS ne représentent que 3% des produits dérivés. "C’est la preuve de ce que nous avancions depuis des mois : le renoncement de la France à une TTF ambitieuse, capable à la fois de réguler la finance et de générer des recettes fiscales massives" pour le développement, dénonce ainsi les ONG Oxfam France, Aides et Coalition Plus, cité par Le Monde. L'Allemagne, également, demande "une assiette large".

Pourquoi la France veut une taxe "imparfaite" ? "Les considérations de rendement sont secondaires", explique Michel Sapin dans Les Echos. En clair, le but est de limiter les échanges financiers à risque, pas de gagner de l'argent. Mais la divergence franco-allemande est aussi due au profil des banques des deux pays. Les banques françaises, notamment la BNP et la Société générale, sont leaders dans les produits dérivés. Les banques allemandes, surtout les banques régionales, très puissantes, sont davantage tournées vers l'économie réelle.

En clair, les débats promettent d'être houleux vendredi. Et ils risquent de ne déboucher, une fois de plus, sur rien du tout. François Hollande, quant à lui, semble de moins en moins vindicatif contre "son ennemi", "le monde de la finance", qu'il dénonçait en 2012, lors de la campagne présidentielle.