Franc suisse : les transfrontaliers moins payés que les Suisses ?

© FABRICE COFFRINI/AFP
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Noémi Marois
CRISE - Alors que le franc suisse a subi une importante hausse, des employeurs suisses envisagent de moins payer leurs salariés français. 

Depuis la hausse spectaculaire du franc suisse le 15 janvier dernier, les Français qui travaillent chez nos voisins helvètes ont gagné en moyenne 20% en pouvoir d'achat. Ils reçoivent en effet désormais 1 euro en échange de 0,75 franc suisse. Mais cela pourrait ne pas durer. Des employeurs suisses envisageraient, selon L'Est Républicain, de verser des salaires moindres à leurs salariés français.

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Indexer les salaires sur le cours du franc suisse. Des employeurs suisses se sont exprimés en faveur d'une indexation du salaire des transfrontaliers sur le cours monétaire du franc suisse. D'autres proposeraient de baisser tout simplement leur salaire afin de "restreindre les différences" de pouvoir d'achat entre leurs salariés suisses et leurs salariés français. 

Les établissements Fournier-Volailles Importation, basées dans le canton de Genève, envisageraient ainsi, selon une source syndicale, de vouloir baisser les salaires des employés français "au prorata de la différence entre le taux plancher et les nouveaux taux qui sont à déterminer". 

Mais pour quelles raisons ? La direction des établissements Fournier-Volailles Importation prévoit "une pression énorme" de ses clients suisses pour "baisser les prix", rapporte Le Temps.

Car si les Français gagnent en pouvoir d'achat grâce à un franc suisse fort, les entreprises suisses, elles, y perdent. Leurs marchandises, sur le marché international, coûtent plus cher et ont moins de chances de trouver des acheteurs. Les employeurs suisses veulent donc se rattraper sur les salaires versés. 

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Une mesure déjà condamnée en 2012. Quand en 2011 et 2012, le franc suisse avait connu les mêmes turbulences, des employeurs avaient déjà appliqué cette mesure… avant d'être condamnés par la justice. "La jurisprudence est claire : de telles mesures discriminatoires sont juridiquement illégales", affirme Ibrahima Diao, juriste de l'Amicale des frontaliers, "et c’est également contraire au principe de la libre circulation des personnes". 

Discrimination. "Les salaires sont fixes", rappelle le juriste, "l’indexation est donc par essence légalement impossible". De plus, modifier un contrat de travail est illégal sans justification économique et sans  l'accord du salarié. Enfin, à travail égal, le salaire doit l'être aussi, sauf à discriminer du coup des salariés en raison de leur nationalité française. 

Il reste cependant deux possibilités aux employeurs suisses. Ils pourraient payer l'ensemble de leurs salariés en euros, mais la mesure serait techniquement compliquée. Enfin, ils pourraient proposer des salaires plus bas à de nouveaux embauchés français. 

Du côté des salariés de Fournier-Volailles Importation, le syndicat Unia appelle à une assemblée générale mardi. La direction, elle, prévient : "la survie de l'entreprise sera rapidement menacée". 
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