Banlieues et faubourgs, forcément en dehors de la cité ?

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Une fois n’est pas coutume et entrons dans le vif du sujet en proclamant suffisamment haut et fort pour être entendu que cette idée qui voudrait que les faubourgs ne soient pas de vrais bourgs et que la population des banlieues sujette au bannissement, est une ânerie de première classe.

Une fois n’est pas coutume et entrons dans le vif du sujet en proclamant suffisamment haut et fort pour être entendu que cette idée qui voudrait que les faubourgs ne soient pas de vrais bourgs et que la population des banlieues sujette au bannissement, est une ânerie de première classe.

 

 

D’abord parce que l’étymologie de ces deux vocables le démontre aisément, ensuite que l’histoire de la construction de nos villes impose une toute autre version.

 

Comme nous avons pu le voir au cours d’autres articles sur les agglomérations, nous savons que les villes, bien que souvent délimitées par des enceintes, voire un fossé, ont toujours connu une expansion démographique et immobilière qui les ont conduites à se développer au-delà de leurs murs. Des quartiers entiers, parfois même de véritables bourgs se sont ainsi installés à l’ombre de la cité, lui apportant alors une nouvelle prospérité. Et il ne semble pas qu’il y ait jamais eu, du moins jusqu’à une époque récente, le moindre ostracisme d’une population envers l’autre.

 

 

 

 

Un rappel historique.

 

Afin de comprendre ce qu’est un faubourg, rappelons que le bourg se distinguait du village par son marché, pour lequel une autorisation administrative était nécessaire, mais se démarquait de la ville par la nature rurale de ses habitants. Ainsi en fut-il de ces petites agglomérations qui se développèrent en dehors du périmètre « historique » de la ville car on se doute bien que jusqu’à une époque somme toute récente, les champs entouraient les villes afin d’en nourrir ses habitants (les semi-remorques et autres camions-frigos faisant cruellement défaut en ce temps-là…). Des bourgs avoisinants qui n’avaient donc rien de faux…

 

 

 

 

 

 

Le faubourg.

 

Car le vocable faubourg, qu’on a longtemps orthographié faux bourg, n’est que le résultat d’une formidable altération populaire du mot forsborc, en ancien français, de même sens, composé de fors qui signifie hors de, et de borc, ancienne graphie de bourg. Ainsi, le commun a-t-il rapidement substitué le forsborc en forbourg puis en faux bourg pour finir en faubourg sous l’influence de l’adjectif faux, peut-être par esprit malveillant envers la population extra-muros mais plus probablement par paresse linguistique. Vous aurez donc compris que notre bourg n’a rien de faux mais se situe en dehors des murs, au même titre que la forclusion vous place en dehors de la faculté d’exercer un droit.

 

Par ailleurs, ne pensez pas que les habitants des faubourgs vivaient mal cette distinction car le quartier Saint-Germain, à Paris, qu’on nommait autrefois Le Faubourg, ou Le Noble faubourg, était réputé par le nombre d’hôtels particuliers qu’y possédait l’aristocratie.

 

 

 

 

 

 

La banlieue.

 

Notre banlieue n’a donc aucune raison de se sentir ostracisée, bien au contraire, puisque l’étymologie du vocable nous apprend que le territoire dans lequel les lois et autres décrets étaient proclamées, bien avant que journaux, radios et télévisions n’en assument la charge, s’étendait jusqu’à une lieue de la ville proprement dite. Ainsi, à une lieue à la ronde, non seulement les populations bénéficiaient du même traitement que les citadins intra-muros en recevant proclamations et édits, mais elles étaient également assujetties aux mêmes lois puisque partie d’une même juridiction.

 

Et puis, n’en déplaise aux Jacobins, Paris n’est pas la seule ville à posséder une banlieue, cette dernière se retrouvant dans pratiquement toutes les agglomérations d’une certaine importance. Pour preuve, à Toulouse, on l’appelait gardiage et septaine à Bourges.

 

 

 

 

Un ban ?

 

Or, il se trouve que le hasard de la vie du vocabulaire français a fait se réunir en un même mot, bannir, deux verbes dont l’un signifiait, originellement, convoquer par ban (proclamation) et l’autre exiler, condamner quelqu’un à quitter le territoire. Ce qui a laissé de tristes plaisantins libres de clamer que la banlieue était un lieu de bannissement, peuplé de relégués.

 

Charitable, je vous ferai grâce des subtilités étymologiques qui ont conduit à cette situation, mélange de deux termes franciques et gothiques, bannjan et bandwjan. On notera toutefois au passage que le langage moderne a conservé l’expression Convoquer le ban et l’arrière-ban, perpétuant la référence au suzerain qui convoquait ses vassaux pour une opération de quelque importance.

 

 

 

 

Une lieue ?

 

Afin de comprendre le sens de la deuxième syllabe de notre banlieue, sachez que la lieue formait une étendue qui a énormément fluctué au fil du temps puisque, ancienne mesure gauloise valant approximativement deux kilomètres et demi, elle valait à son apogée, si je puis dire, près de quatre kilomètres. Encore que ces distances variaient sensiblement d’une région à l’autre. En bref, la précision ne régnait pas en la matière…

 

Aujourd’hui, les villes s’étant débarrassées, du moins pour la plupart, de leurs anciennes fortifications, les faubourgs qui formaient la première couronne autour de la ville, ont été absorbés par la cité tandis que la banlieue, ancienne deuxième couronne, s’arrogeait la première place hors les murs devenus imaginaires.

 

 

 

 

 

Les euphémismes de bon goût.

 

A une époque où le politiquement correct l’emporte sur toute autre considération, on ne manquera pas de substantifs pour qualifier ces agglomérations hors de la cité. Ainsi, le quartier a-t-il remplacé la banlieue tandis que le vocable périphérie permet de ne rien préciser du tout, de crainte de choquer le banlieusard. Bref, là où l’étymologie incluait les alentours de la ville à l’intérieur du droit judiciaire de celle-ci, le langage actuel les exclut pour des raisons plus ou moins avouables, faisant de nos banlieues des territoires en dehors de la ville, certes, mais surtout distincts. A tort.

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