Musique : des centaines de milliers d'originaux ont brûlé dans l'incendie d'un entrepôt d'Universal en 2008

Le 1er juin 2008 au petit matin, un incendie éclate dans un entrepôt Universal à Hollywood. 1:47
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Benoit Clair avec , modifié à
Onze ans après les faits, le "New York Times" a révélé cette semaine la disparition de centaines de milliers d'enregistrements originaux dans l'incendie d'un entrepôt, un désastre dont Universal s'était toujours évertué à cacher l'ampleur. 

Des titres d'Elton John, d'Eric Clapton, de Chuck Berry ou d'Aretha Franklin partis en fumée. C'est le plus grand désastre de l'industrie musicale, il s'est produit il y a onze ans, et sur le moment personne ne l'a su. Une longue enquête du New York Times a dévoilé cette semaine l'incroyable nouvelle, dans une longue enquête intitulée "Le jour où la musique a brûlé" : la maison de disque Universal a caché la disparition de centaines de milliers d'archives sonores. 

Flashback, onze ans en arrière. Le 1er juin 2008 au petit matin, un incendie éclate dans un entrepôt Universal à Hollywood. Plusieurs centaines de pompiers font rapidement face à un hangar transformé en un gigantesque brasier, une épaisse fumée noire et une odeur âcre enveloppent bientôt toute la banlieue nord de Los Angeles. Les journalistes sont tenus bien à l'écart, et Universal Music Group refuse à l'époque de répondre aux questions sur l'ampleur des dégâts. Le service communication ne va pas hésiter à mentir à la presse, parlant de quelques milliers de copies d'enregistrements détruits, et se focalisant sur la perte d'archives cinématographiques. La réalité est hélas beaucoup plus cruelle.

Au moins 500.000 enregistrements perdus 

La vérité vient d'éclater grâce à un archiviste, qui n'a pas pu garder plus longtemps le secret qui le hantait depuis dix ans. Ce sont en fait au moins 500.000 morceaux, dont de nombreux masters - les enregistrements originaux à partir desquels on réalise les copies - des années 1940 à nos jours, qui ont été perdus à jamais, selon un rapport confidentiel de 2009. "Un master est un objet unique, la source irremplaçable d'un morceau de musique enregistré", explique le New York Times

De Ray Charles à Louis Armstrong en passant par Duke Ellington et Billie Holiday, de Cat Stevens à Elton John en passant par Nirvana, John Baez, ou Eminem... Il est impossible d'avoir la liste précise des titres réduits en cendres, mais on sait par exemple que l'original de Rock Around the clock, de Bill Haley en faisait partie. Les masters d'artistes moins connus ont également été perdus, condamnant à l'oubli des dizaines de milliers de titres de gospel, de jazz et de soul. Le montant financier est inestimable, le préjudice culturel l'est bien plus encore.

Vivendi souhaitait vendre la moitié de sa filiale musicale, et Apple, Amazon et le chinois AliBaba étaient sur les rangs. Mais ces révélations pourraient changer la donne. Les artistes qui découvrent le scandale vont aussi demander des comptes.

L'ancien bassiste de Nirvana Krist Novoselic et le groupe REM ont ainsi exprimé leur dépit sur Twitter. 

Universal va désormais devoir rapidement s'expliquer. Mais avec une telle affaire, c'est la pérennité même d'un des géants américains de la culture qui est désormais en jeu.