Marc Dugain : "Ces gens qui sont à l’origine de la mort des Kennedy sont ceux qui ont le pouvoir avec Trump"

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Aurélie Dupuy , modifié à
Le romancier revisite les années 60 aux Etats-Unis au travers de son nouvel ouvrage "Ils vont tuer Robert Kennedy", l'un des titres phares de la rentrée littéraire.
INTERVIEW

Après La chambre des officiersUne exécution ordinaire et La malédiction d’Edgar, Marc Dugain revient pour la rentrée littéraire avec un livre qui fait déjà beaucoup parler : Ils vont tuer Robert Kennedy. Le romancier était l'invité de Nicolas Carreau dans l'émission La voix est livre pour présenter son nouvel ouvrage.

Univers de conspiration. Ce qui interpelle de prime abord, c'est le titre. Parce qu’il n’est pas écrit John Kennedy. Parce qu’il n’est pas écrit 'Ils ont tué'. Et parce que ce pronom incertain 'ils' plonge immédiatement le lecteur dans un univers de conspiration. "Le titre est venu très naturellement. Ce n'est jamais mieux que quand un titre résume parfaitement un livre. (...) C’est à la mode le complotisme mais c’est aussi un travail d’investigation", avance le romancier.

Le choix du silence. Et si le titre ne mentionne pas John mais 'Bobby', le livre est bien obligé de revenir sur le choc de Dallas en 1963. "C’est totalement lié. Le premier à défendre la théorie du complot sur l’assassinat de JFK, c’est Bobby. Il sait dans la semaine qui suit la mort de son frère qui a tué son frère. Ils ont une grande discussion avec Jackie Kennedy sur le fait de savoir comment ils vont réagir. Le problème des Kennedy est qu’ils ne sont pas blanc bleu, pas dans l’assassinat mais il y a tellement de révélations qui peuvent être faites sur le clan, sur la famille et sur John qu’ils pensent que le préjudice serait beaucoup plus important que de ne rien dire." Alors c’est la thèse du silence qui est adoptée. "Ils ne commentent jamais", résume-t-il.

Personnage shakespearien. La suite logique est que Bobby "comprend que la balle lui était autant destiné qu’à son frère, même peut-être plus." Marc Dugain décrit alors une lutte intérieure pour Robert Kennedy, un personnage shakespearien. "Il est convaincu qu’il ne faut pas qu’il se présente à l’élection de 1968. Et puis il y a un déclic, qui est toute l’évolution de la société américaine. Bobby est un progressiste, quelqu’un qui pense que la guerre du Vietnam est une folie sans nom, qui pense que la lutte pour les droits civiques est fondamentale et qui devient quelqu’un en quelque sorte d’un peu christique tout en sachant très bien qu’il se fera assassiner."

En substance, soit il ne se présentait pas et aurait pensé n'être personne, soit il se présentait et il savait quel allait être son destin. Le 5 juin 1968 il est assassiné à Los Angeles, officiellement par Sirhan Sirhan. Le romancier avait alors 11 ans et se souvient bien de ce moment d’actualité internationale étourdissant.

 

Un certain Mark O'Dugain. La mort de Robert Kennedy signe aussi la mort du mouvement de contre-culture, analyse Marc Dugain. "La vraie alternative démocrate, on ne l’a plus eu. Et on a pire encore. Je ne dis pas que c’est les mêmes en tant que personnes physiques mais ces gens qui sont à l’origine de la mort des Kennedy sont ceux qui ont aujourd’hui le pouvoir avec Trump." C'est la thèse de Marc Dugain, celle qu'il égrène dans son livre auquel il insert une petite histoire dans sa grande Histoire. Il glisse vers l'assassinat de Robert Kennedy via un narrateur qui se nomme....Mark O'Dugain et qui fait des recherches sur son père, un père qui pourrait être lié à l'assassinat. "L’idée de prendre mon nom tel qu’il est à l’origine en Irlande est à la fois une façon de me rapprocher du sujet et de m’en éloigner. Généralement quand vous écrivez sur vous, vous mettez un nom imaginaire. C’est ce qui est intéressant aussi, sinon ça devient une biographie des Kennedy."

 

 

Chaque samedi, retrouvez toute l'actualité littéraire avec Nicolas Carreau dans La voix est livre, de 15h à 16h sur Europe 1.