Ahmed Sylla et Hakim Jemili dans «Ici et là-bas» : «Nous aussi on se sent partout chez nous !»

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Solène Delinger , modifié à
Ahmed Sylla et Hakim Jemili sont à l'affiche d'"Ici et là-bas", une comédie sympathique et familiale dénonçant le racisme et les stéréotypes, en salles ce mercredi 17 avril. Les deux acteurs et humoristes se sont tout de suite identifiés à leurs personnages, Sekou et Adrien, constamment renvoyés à leur couleur de peau. 
INTERVIEW

Il n'a pas fallu beaucoup de temps à Ahmed Sylla avant de dire "oui" pour jouer dans Ici et là-bas, la nouvelle comédie de son ami réalisateur Ludovic Bernard, qui l'avait déjà fait tourner dans L'Ascension en 2017. "C'était une évidence : Ludovic Bernard, un scénario beau, drôle et intelligent. J'y vais direct", nous confie-t-il avec enthousiasme lors de notre rencontre, quelques jours avant la sortie du film, en salles ce mercredi 17 avril.

"J'avais peur d'être rejeté par mes camarades à cause de ma couleur de peau"

On le perçoit dans son regard qui s'illumine à chaque question : Ahmed Sylla est fier de revenir au cinéma avec Ici et là-bas, buddy movie aussi tendre que réjouissant dans lequel il donne la réplique à son ami Hakim Jemili, lui aussi issu du monde du stand up. Dans Ici et là bas, Ahmed Sylla est Sékou, un commercial d'origine sénégalaise installé à Paris avec sa femme et ses enfants. Epanoui dans son travail et dans sa vie personnelle, Sékou a appris à vivre avec le racisme ordinaire, celui qui l'a contraint à se faire appeler Cédric pour décrocher son poste. Quand sa boss lui demande pour la toute première fois d'aller en région pour rencontrer ses fournisseurs, Sékou panique : comment ces artisans vont-ils réagir quand ils découvriront sa couleur de peau ? 

"Le personnage de Sékou m'a parlé à plein d'endroits. Parce que j'ai vécu ses craintes et ses peurs quand j'étais plus jeune, au collège et au lycée. J'avais peur d'être rejeté par mes camarades parce que j'avais une couleur de peau différente et parce que je venais d'un milieu social moins aisé. J'avais honte de ça", se souvient Ahmed Sylla, qui a grandi dans la banlieue nantaise et fréquenté des établissements privés catholiques. A l'époque, le petit Ahmed était prêt à tout pour se faire accepter. "J'achetais des goûters et je ramenais des bonbons pour que les gens m'aiment bien. Je faisais le con plus que les autres pour les faire rire", nous raconte Ahmed Sylla en rigolant, sans aucune amertume. "C'est triste ce que tu racontes parce que j'ai vécu la même chose", réagit son ami Hakim Jemili, franco-tunisien.

"On m'a déjà dit que j'étais un bounty"

Comme Ahmed Sylla, l'humoriste n'a pas eu de mal à s'identifier à son personnage,  Adrien, un cousin éloigné de Sékou, blanc de peau mais se sentant 100% sénégalais. "Je suis marié à une Sénégalaise, notre fils est sénégalais et je me sens sénégalais aussi, tout autant que français et tunisien". Dans Ici et là-bas, le personnage d'Hakim Jemili est expulsé du Sénégal direction la France, son pays natal. Il demande alors à Sékou, son cousin éloigné de l'aider à rentrer chez lui. Sékou accepte mais à une condition : qu'Adrien l'accompagne dans son tour de France. Commence alors leur buddy movie au rythme des chansons de Cabrel dont Sékou est fan. "Tu es plus blanc que blanc", lui lance son cousin Adrien. Une petite remarque à laquelle Ahmed Sylla a déjà eu le droit. "On m'a déjà dit que j'étais un bounty, que j'étais noir dehors mais blanc à l'intérieur. Je ne sais pas si c'est une insulte ou un compliment... En général c'est une insulte, mais ça voudrait dire quoi ? Qu'être blanc est une insulte ?", s'interroge le comédien. Au Sénégal, Ahmed Sylla est en revanche considéré comme français. "Mais ça m'importe peu ! J'ai la chance de beaucoup voyager. Je suis partout chez moi", assure-t-il. Une belle leçon d'humanité à retrouver dès aujourd'hui au cinéma dans Ici et là-bas.