Grégory Allione 2:37
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Edité par Mathilde Durand
Les sapeurs-pompiers sont de plus en plus agressés pendant leurs interventions. Et contrairement aux idées reçues, les violences peuvent prendre plusieurs formes et toucher l'ensemble du territoire français. Grégory Allione, président de la Fédération des pompiers de France dénonce sur Europe 1 les incivilités commises par "Monsieur et Madame Tout-le-Monde". 
INTERVIEW

Face à la recrudescence des agressions contre les pompiers, ces derniers tirent la sonnette d’alarme. 3.411 sapeurs-pompiers ont été agressés en 2018, contre 2.813 en 2017. Des chiffres qui ont explosé en dix ans : en 2008, on décomptait 899 incidents.  Le colonel Grégory Allione, président de la Fédération des pompiers de France, réagit ce matin à ces chiffres de plus en plus exhaustifs grâce à l’obligation imposée par le ministre de l’Intérieur de déclarer les faits à l’encontre des sapeurs-pompiers. Il dénonce des violences de multiples formes contre les soldats du feu.

Et ces dernières ont plusieurs origines. "Effectivement, dans certains quartiers sensibles, il y a de véritables guet-apens depuis les années 2000-2005. Nous avons pour habitude d’entrer dans certains quartiers et de nous faire agresser. Et parler d’habitude est totalement regrettable. Ce sont des endroits où il est difficile de pénétrer. Nous recevons des jets de cailloux, voire des tirs de mortiers."

Des agressions de "Monsieur et Madame Tout-le-Monde"

Mais selon Grégory Allione, le plus inquiétant reste la multiplication des agressions provoquées par "Monsieur et Madame Tout-le-Monde" sur l'ensemble du territoire. "Les gens agressent un service public qui est le premier à répondre sur le territoire", regrette-t-il. "Les soldats du feu sont devenus des soldats de la santé. Avec 7.000 casernes sur tout le territoire, nous sommes les premiers à intervenir pour toutes les détresses de nos concitoyens."

Une tension qui s'explique par le manque de service public. "Lorsqu’on arrive, on est face à des gens exaspérés d’avoir quémandé un service public qui n’arrive jamais." Grégory Allione est favorable à la mise en place d'un numéro d'urgence, le 112, pour faire la distinction entre les soins non programmés, l'assistance, le social et les appels d'urgences, les appels au secours. Un dispositif "réclamé" depuis deux ans par le président de la République Emmanuel Macron, évoque le colonel. "On nous appelle pour tout et n'importe quoi", se désole le sapeur-pompier. 

Prévention et protection des pompiers

Pour enrayer la hausse des agressions, la Fédération des pompiers de France préconise plusieurs axes de travail. "La prévention tout d'abord. Il faut que les gens nous connaissent et se rendent compte que 80% des pompiers sont volontaires", énumère le président. "Il y a aussi des moyens pour nous protéger en intervention comme des caméras, qui permettent de faire baisser la pression ou d'avoir des preuves pour la justice. Mais aussi, des filtres à coller sur les vitres de nos véhicules." 

Le colonel appelle également la justice à durcir les sanctions contre les auteurs de ces agressions. "Quand on remet en cause un professeur, qu'on agresse un infirmier au bloc ou un sapeur-pompier en intervention, c'est tous les pans de la République qui sont agressés au quotidien", dénonce Grégory Allione. "Les condamnations doivent être fermes pour les gens qui agressent le service public." 

Sans minimiser ces agressions, le président de la Fédération des pompiers de France rappelle néanmoins qu'elles ne correspondent qu'à 3.000 cas environ, sur 4,5 millions d'interventions annuelles. Pas vraiment de quoi décourager le volontariat, qui reste un "engagement profond" et "l'avenir" de la profession selon lui.