L'exposition "Computer Grrrls" retrace l'histoire complexe des femmes dans le monde très masculin de l'informatique. 2:26
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Visible à la Gaîté Lyrique, à Paris, jusqu'en juillet, l'exposition "Computer Grrrls" propose de réétudier l'histoire de l'informatique en s'arrêtant sur des figures historiques méconnues.

Redonner leur juste place à des pionnières des ordinateurs et d’Internet, trop vite oubliées par les livres d'histoire : tel est l'objectif de l'exposition "Computer Grrrls" qui se tient à la Gaîté Lyrique*, à Paris. Créée en Allemagne, elle revisite l’histoire des femmes dans l’informatique, à travers des panneaux éducatifs et des œuvres d'art contemporain réalisées exclusivement par des femmes.

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Des génies oubliées et des petites mains écartées

D'emblée, on est frappé par un panneau retraçant, sous forme de frise chronologique, le développement de l'informatique et d'Internet avec un prisme féminin. Cette entrée en matière montre assez clairement que si l'histoire a retenu les noms d'Alan Turing, Bill Gates, Steve Jobs et Mark Zuckerberg, d'autres sont passés avant eux, notamment des femmes.

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On y apprend, entre autres, que c’est l’actrice Hedy Lamarr qui posa en 1941 la première pierre du wi-fi et du Bluetooth grâce à un brevet révolutionnaire. Que, faute d'hommes disponibles après la Secodne guerre mondiale, les premiers programmeurs étaient des programmeuses. Que le code informatique écrit en langage humaine est l'oeuvre de l’Américaine Grace Hopper. Que si Neil Armstrong a pu marcher sur la Lune en juillet 1969, c’est grâce aux calculs savants de Margaret Hamilton, directrice du département génie logiciel au sein du MIT et autrice en chef du code du système d’alunissage d’Apollo, à seulement 32 ans. Autant de femmes remarquables, autant d’histoires oubliées.

Mais l'exposition ne s'arrête pas aux seules figures marquantes. Son nom fait d'ailleurs référence au titre d'un article du magazine Cosmopolitan ("The computer girls"), paru en 1967 et vantant les opportunités des métiers de l'informatique pour les femmes, qui seraient ainsi "naturellement douées" pour la programmation. En effet, depuis la fin de la guerre, il y avait toute une armée de femmes, des petites mains qui raccordaient les fils et écrivaient des pages entières de code à la machine, travailleuses de l'ombre de l'informatique. Mais c'est pile au tournant des années 1970 que les femmes vont justement être petit à petit écartées de ce business naissant.

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Un art 2.0 au service du militantisme

Mais la place des femmes dans l'histoire de l'informatique n'occupe qu'une partie de l'exposition "Computer Grrrls", qui fait la part belle à l'art. Une vingtaine d'artistes, exclusivement des femmes, ont été sollicitées pour réaliser des œuvres reflétant leur point de vue sur les nouvelles technologies : installations vidéo, impressions 3D, tutos Youtube détournés, etc. C’est de l’art contemporain, parfois un peu déroutant il faut le reconnaître, mais ces œuvres nous interpellent.

Computer Grrrls

Ces femmes portent un regard un peu inhabituel sur les ordinateurs et le numérique, plus méfiant, plus critique aussi. Ainsi va de l'artiste Erica Scourti qui utilise des photos de son corps pour montrer les biais de l’algorithme de Google. Conçu par des hommes, il associe automatiquement les photos de seins à des publicités pour de la chirurgie esthétique. Plus globalement, des photos de plusieurs parties du corps vont de pair avec des suggestions d'amélioration. 

C’est un exemple parmi d’autres des déformations liées au développement extrêmement masculin de l’informatique. Il y en a plein d’autres aussi frappants à découvrir dans cette exposition qui aborde ainsi les nouvelles formes de militantisme féminin comme les mouvements technoféministes ou l'autodéfense sur Internet.

* "Computer Grrrls", à la Gaîté Lyrique, jusqu’au 14 juillet. Horaires : du mardi au vendredi de 14h à 20h, le samedi de 12h à 20h et le dimanche de 12h à 19h. Nocturne le jeudi jusqu'à 22h. Tarif plein : 8€ ; tarif réduit pour les -26 ans, +60 ans, demandeurs d'emploi et accompagnants d'adhérents ; gratuit pour les adhérents et les -12 ans.