Foot : Monaco, du recrutement princier aux transferts bon marché

Bernardo Silva, l'un des fers de lance et des symboles du Monaco nouveau.
Bernardo Silva, l'un des fers de lance et des symboles du Monaco nouveau. © JEAN CHRISTOPHE MAGNENET / AFP
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DU CHIC AU CHEAP - Sous la houlette de son président milliardaire russe Dimitri Rybolovlev, Monaco a d'abord recruté gros en 2013 (James Rodriguez, Falcao) avant de miser sur de jeunes joueurs à bas prix depuis deux ans.

Saignée chez les rouge et blanc. "On peut perdre cinq ou six titulaires, je le sais". Dans l'édition de l'Equipe du 10 juin dernier, l'entraîneur de l'ASM Leonardo Jardim ne se faisait guère d'illusions alors que s'ouvrait le mercato. Bien lui en a pris puisque dix jours plus tard, Dimitar Berbatov en fin de contrat, et Geoffrey Kondogbia, acheté 40 millions d'euros par l'Inter Milan, l'ont déjà quitté. Et ce ne pourrait être que le début d'une saignée dans l'effectif des rouge et blanc, où de nombreux joueurs sont ciblés par des clubs étrangers (Martial par Tottenham, Abdennour par Milan, Kurzawa par l'Atletico et le PSG…).

Un club princier devenu désargenté. Princier dans son recrutement en 2013, Monaco a donc été ravalé en deux ans à peine au rang de simple roturier. A l'époque pourtant, le club moribond sportivement et exsangue financièrement vient d'être racheté par Dimitri Rybolovev, un milliardaire russe qui n'hésite pas à sortir le chéquier. A peine promu en Ligue 1 après son titre de champion à l'échelon inférieur, l'ASM n'hésite pas à dépenser près de 166 millions d'euros dans l'été (aucun club au monde n'a plus investi lors de ce mercato).

Des matches contre Arles Avignon à l'arrivée de Falcao. Pour un casting hollywoodien, puisque le club parvient à attirer des joueurs de niveau international comme Radamel Falcao, James Rodrigues, Joao Moutinho, Jérémy Toulalan ou encore Eric Abidal. Pas mal pour un club qui jouait encore quelques mois auparavant contre Istres et Arles-Avignon. L'investissement s'avère payant puisque Monaco, deuxième à l'issue de la saison, devient le seul club capable de concurrencer le PSG version qatarie.

Rybolovlev change son fusil d'épaule. Sauf qu'à l'été 2014, le grand argentier de cette équipe constituée à coups de millions change subitement de position : "Notre objectif sera de dépenser moins d'argent à l'avenir. On va s'appuyer sur le centre de formation pour avoir une identité. A un moment, parce qu'on arrivait, on a payé des joueurs très chers. Pour démarrer vite, il fallait investir beaucoup. Mais maintenant, c'est le temps des retouches", expliquait Dimitri Rybolovlev dans Libération. Résultat, la vente record de James Rodriguez, brillant à la Coupe du monde (80 millions d'euros au Real Madrid) et le prêt de Radamel Falcao à Manchester United pour 10 millions d'euros.

En concurrence avec Porto plus qu'avec Paris. Le début d'un virage à 180 degrés pour Monaco. Le club ambitionnait de concurrencer les autres formations européennes détenues par des oligarques (le Chelsea de Roman Abrahamovitch, le PSG de Nasser El Khelaïfi ou le Manchester City du Cheikh Al Mansour). Il va désormais jouer dans le même registre que des clubs comme Benfica, Porto ou, dans une moindre mesure, Lyon. Des clubs qui misent sur la formation ou la détection de jeunes joueurs, pour mieux les revendre une fois leur talent révélé. Dans son interview accordée à L'Equipe, Leonardo Jardim insistait d'ailleurs sur ce point : "Nous devons être très bon sur le scouting (le repérage des jeunes pépites, NDLR) pour rester au niveau."     

Une classe-biberon et des grognards. Le succès du nouveau Monaco repose donc sur un savant mélange entre des joueurs expérimentés (Toulalan, Raggi, Berbatov) et des talents juvéniles (Bernardo Silva, Martial, Ferreira-Carrasco) façonnés par Leonardo Jardim. De quoi terminer troisième de Ligue 1 et s'inviter dans le top 8 européen (défaite en quart de finale contre la Juventus Turin), mais définitivement pas de quoi titiller le PSG.

Pourquoi un tel changement de stratégie ? Si le recrutement monégasque ressemble désormais plus à Graine de Stars qu'à un blockbuster hollywoodien, c'est que son grand argentier, le président Robolovlev, a décidé de moins dépenser. Outre la contrainte du fair-play financier, difficile de savoir quel a été le facteur décisif dans cette décision, mais sa rupture avec son épouse Elena -la presse parle de "divorce du siècle"- n'y est peut-être pas étranger. Si la bataille juridique au sein du couple est loin d'être terminée, Dimitri doit pour l'instant 564 millions d'euros à Elena. A ce gouffre financier s'ajoute l'accord entre l'ASM et la Ligue. Echappant aux règles fiscales françaises, le club a accepté de verser 50 millions d'euros de compensation pour rétablir un équilibre avec ses rivaux. Enfin, L'Equipe expliquait également que Rybolovlev, qui n'a toujours pas obtenu le passeport monégasque, refuserait de plus investir tant que sa demande ne serait pas satisfaite.

La conséquence sur la Ligue 1 : difficile de trouver un concurrent au PSG. La saison prochaine, difficile de voir un concurrent crédible à Paris. Marseille, comme Monaco, a besoin de liquidités et nombre de ses joueurs-cadres viennent de partir (Ayew, Gignac, Fanni, Morel). Seul l'OL, fort de sa jeune garde talentueuse et des revenus supplémentaires que lui offre sa qualification directe pour la Ligue des champions, pourrait recruter.