Euro : les quatre clés du succès de l'Italie

Mancini Bonucci Italie euro
Le sélectionneur Roberto Mancini dans les bras du défenseur Leonardo Bonucci après la victoire en finale de l'Euro 2020. © CARL RECINE / POOL / AFP
  • Copié
Gauthier Delomez avec AFP
L'Italie a remporté dimanche son deuxième titre européen après 1968. En finale, la Squadra Azzurra est venue à bout de l'Angleterre, chez elle à Wembley, au cours de la séance des tirs au but (1-1, 3 t.a.b. à 2). C'est l'aboutissement de trois années de travail du sélectionneur Roberto Mancini, à qui les Italiens doivent beaucoup.

Il ne fallait pas aller bien loin finalement pour déceler la nation championne d'Europe. L'Italie, victorieuse du match d'ouverture de l'Euro contre la Turquie (3-0 le 11 juin), a refermé la compétition en terres anglaises dimanche en s'imposant en finale contre l'Angleterre à Londres (1-1, 3 t.a.b. à 2). Un résultat qui n'était pas vraiment attendu de l'autre côté des Alpes. L'Italie était en pleine reconstruction depuis son absence très remarquée à la dernière Coupe du monde en Russie en 2018. Reprise par Roberto Mancini, ancien coach de l'Inter Milan et de Manchester City notamment, la Squadra Azzurra s'est transformée pour afficher son meilleur visage durant la compétition. Le tacticien italien lui a redonné les clés pour la mener au sommet du football européen.

Un travail mental hors normes

Cette victoire, l'Italie l'a doit d'abord et avant tout au travail au long court de Roberto Mancini. Vainqueur à plusieurs reprises du championnat italien avec l'Inter, le technicien était l'homme de la situation pour redresser une Squadra Azzurra balbutiante quelques années. Après l'échec retentissant contre la Suède en barrages du Mondial 2018, Mancini, tout juste en poste, a insufflé de la confiance et un nouvel enthousiasme à sa sélection.

Grâce au travail de son staff et notamment de Gianluca Vialli, son grand ami depuis leur aventure commune à la Sampdoria de Gênes dans les années 1980, Roberto Mancini a fait progresser ses joueurs au niveau du mental. D'abord en remettant la sélection sur les bons rails après la débâcle de la non qualification au Mondial 2018, mais aussi en redonnant de la force aux Italiens dans le moment décisifs. C'est ainsi que la Nazionale s'est imposée lors de deux séances de tirs au but dans cet Euro, en demi-finale contre l'Espagne (1-1, 4 t.a.b. à 2) puis en finale, où elle était même menée au score à la mi-temps (0-1).

Une Squadra Azzurra très joueuse

Son résultat n'aurait pas été possible sans une révolution dans son jeu. C'est comme cela qu'a procédé Roberto Mancini alors aux manettes de la sélection. Avec l'aide d'un milieu de terrain travailleur et technique composé de Marco Verratti du PSG, Jorginho de Chelsea et Nicolo Barella de l'Inter Milan, la Squadra s'est mis à développer un jeu collectif et offensif plaisant à contrepied de ce qu'elle produisait jusque-là. Une révolution pour le pays du "catenaccio" qui a tout de même gardé ses automatismes défensifs avec la charnière expérimentée et infatigable Leonardo Bonucci (34 ans) et Giorgio Chiellini (36 ans).

L'Italie est devenue l'une des meilleures attaques de l'Euro avec 13 buts, dont sept en phase de groupes et sans en encaisser durant les trois premiers matches. Des statistiques qui valident l'état d'esprit voulu par Mancini : la Nazionale a conclu dimanche contre l'Angleterre un 34ème match consécutif sans défaite avec le match nul au bout de la prolongation (1-1). La plus grande série de l'histoire de la Squadra Azzurra qui arrive à point nommé pour le deuxième titre européen de l'histoire de l'Italie.

Gianluigi Donnarumma, nouveau héros de l'Italie

Durant l'Euro, l'Italie s'est également découvert un héros en la personne de Gianluigi Donnarumma, jeune gardien de but de 22 ans qui s'apprête à rejoindre le PSG à la rentrée. Porter ce prénom, en tant que relève du charismatique Gianluigi Buffon, vainqueur du Mondial 2006, n'était pas chose facile pour lui. Donnarumma a pourtant montré un mental d'acier dans les situations chaudes, se muant en sauveur de la nation lors des séances de tirs au but. En demi-finale, il a stoppé la tentative décisive de l'Espagnol Alvaro Morata pour envoyer son pays en finale de l'Euro. Le jeune gardien a remis cela quelques jours plus tard, en perturbant la course de Marcus Rashford puis en parant deux frappes, dont celle du jeune Anglais Bukayo Saka qui a finalement donné la victoire à l'Italie.

Comme un symbole, Gianluigi Donnarumma a été élu meilleur joueur de la compétition. Comme un symbole aussi, le jeune gardien est apparu très mesuré sur sa ligne de but au moment d'arrêter le tir décisif et faire gagner son pays. Le signe d'un niveau de maturité considérable à seulement 22 ans. "J'ai une grande considération pour lui", affirme Dino Zoff, l'un de ses glorieux prédécesseurs. "L'évidence, c'est qu'il a des perspectives importantes pour devenir un grand gardien. Ensuite, cela dépendra de lui, mais les possibilités sont immenses", poursuit-il dans un entretien à l'AFP, quelques jours avant la finale. De quoi parler d'un avenir radieux pour Donnarumma, et pourquoi pas dès la saison prochaine avec le PSG.

Des individualités au rendez-vous

Au-delà de Gianluigi Donnarumma, Roberto Mancini a mis ses joueurs de champ dans les meilleures dispositions à l'Euro. Il a d'abord pu compter sur une charnière défensive toujours solide, avec Leonardo Bonucci et Giorgio Chiellini, revanchards de la finale de l'Euro 2012 perdue contre l'Espagne (0-4). Face à l'Angleterre, les deux joueurs ont apporté leur pierre à l'édifice : en égalisant pour Bonucci à la 67ème, en stoppant avec beaucoup de roublardise l'attaquant anglais Raheem Sterling en fin de match pour Chiellini. Deux défenseurs expérimentés très difficiles à perforer pour les Anglais qui ne se sont procurés que quelques occasions dimanche soir.

Le jeu collectif italien a de la même façon fait briller des individualités. Au milieu de terrain, la plaque tournante Jorginho, même s'il a ressenti une gêne, a permis à l'Italie de relancer le jeu grâce à ses interceptions. Des situations dont a largement bénéficié le Parisien Marco Verratti, orientant le jeu à sa guise très régulièrement. L'Italie doit aussi beaucoup à l'explosion de l'attaquant de la Juventus Turin, Federico Chiesa, buteur notamment en demi-finale et auteur d'une partie remarquable encore dimanche, avec deux grosses occasions de but, dont la seconde bien repoussée par le gardien anglais Jordan Pickford (35e, 62e).

Autre signe des individualités au rendez-vous : cinq joueurs italiens - Chiesa, Locatelli, Pessina, Insigne, Immobile - ont marqué deux buts lors de la compétition. Des talents individuels qui se sont mis au service du collectif, et c'est bien cela qui a permis à la Squadra Azzurra de l'emporter en finale. Le technicien Roberto Mancini et son staff ont réussi à administrer une grande dose de confiance, footballistique et mentale, à leurs joueurs en l'espace de trois ans. Un chef d'œuvre prometteur pour la suite de l'histoire de la Nazionale, et notamment la Coupe du monde 2022 au Qatar. Le contrat de Mancini avait été prolongé jusqu'en 2026 avant même le début de l'Euro.