Lyonnais mais supporters des Verts

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LIGUE 1 - Avant le Derby, dimanche, rencontre avec des fans stéphanois qui vivent à Lyon.
Perrin face à l'OL (930x620)

Le troisième qui reçoit le quatrième. Deux points d'écart, à cinq journées de la fin, et la troisième place qualificative pour le tour préliminaire de la Ligue des champions en jeu. Rarement un Derby n'aura eu un tel enjeu sportif. Ce match, l'un des grands classiques du championnat de France (dimanche, coup d'envoi à 14h), a forcément une saveur particulière pour ceux qui vivent à Lyon, mais dont le cœur vibre pour l'AS Saint-Etienne.

C'est le cas de Xavier, 31 ans. Il vit dans la capitale des Gaules depuis six ans. "J'aime beaucoup la ville de Lyon, je suis très heureux d'y vivre mais même si j'aime beaucoup la ville, je ne peux pas devenir supporter de l'OL, ce n'est pas possible", admet-il. "Ce n'est pas seulement une rivalité entre deux villes proches géographiquement (50 km), Lyon et Saint-Etienne. Ce sont deux façons de voir le football. L'OL, c'est une belle entreprise, bien gérée, avec des supporters principalement à Lyon." Alors que Saint-Etienne, c'est un "club de valeurs", plus humble, et avec des supporters partout, y compris... à Lyon.

Des beaux-frères supporters de l'OL

Thierry, 53 ans, est président de la section lyonnaise (146) des supporters des Verts. "Je suis fan de l'ASSE depuis 1974", insiste-t-il. "Avant, j'étais supporter lyonnais car j'ai toujours habité autour du stade de Gerland. Et puis, on m'a emmené à Geoffroy-Guichard à l'occasion d'un match de coupe d'Europe, en 1974. J'ai été bercé par l'épopée des Verts et c'est vrai que le fait d'aller dans le "Chaudron" m'a donné le virus des Verts." Ce virus des Verts se transmet très tôt. Mathias l'a contracté à neuf ans. Aujourd'hui âgé de 26 printemps, il continue de supporter les Verts, malgré près d'une décennie déjà passée à Lyon. "Je ne me considère pas comme Lyonnais mais comme faisant partie de la diaspora stéphanoise à Lyon", sourit-il. Est-ce difficile d'être supporter des Verts dans la capitale des Gaules ? "Non, ça dépend du milieu social dans lequel on évolue. Si on a affaire à des supporters ultras, comme les Magic Fans ou les Bad Gones, cela peut poser un problème. Mais, parmi mes proches, je n'ai aucun souci. Je me suis même marié avec une Lyonnaise." Supportrice ? "Elle non, mais ses frères, oui."

"On doit vivre sa passion seulement le week-end"

Supporters des Verts à Geoffroy-Guichard (930x620)

Pour Xavier aussi, la rivalité Lyon-Saint-Etienne se vit dans la bonne humeur, le plus souvent à la machine à café. "Au lendemain d'un derby ou d'une défaite, il y a les remarques des collègues, c'est le côté sympa, amical." Mais il n'y a pas qu'une seule façon de vivre sa passion des Verts. Clément, 23 ans, explique ne pas parler foot au travail : "mes collègues de boulot ne sont même pas au courant que je suis abonné (à Saint-Etienne) et que je fais 75% des déplacements. Participer aux discussions de comptoir devant la machine à café sur le match de la veille ne m'intéresse pas. On doit vivre sa passion seulement le week-end, au stade." Clément, qui étudiait déjà à Lyon il y a cinq ans, y a déménagé il y a quatre mois. Jamais tenté de supporter l'OL ? "C'est comme si je te demandais si tu n'as jamais été tenté de préférer ta voisine à ta mère." Pour lui, supporter Saint-Etienne à Lyon n'est "pas compliqué" car Lyon "n'est pas une ville de foot". Pour autant, pas question d'afficher son soutien à "Sainté" trop près de Gerland. "C'est plutôt déconseillé... heureusement d'ailleurs !" Mathias et Xavier ne le font pas non plus, pour d'évidentes "questions de sécurité".

Privé de derby pour raisons de sécurité

Ce sont aussi des questions de sécurité qui vont empêcher Thierry d'assister au Derby, dimanche. En effet, la préfecture a obligé tous les supporters stéphanois (y compris ceux vivant à Lyon, donc) à rejoindre le stade depuis Saint-Etienne en bus, avec distribution des billets in situ. De fait, Thierry a refusé de parcourir deux fois 50 kilomètres quand le stade n'est qu'à 500 mètres de chez lui...

Clément, lui, sera dans le parcage stéphanois mais ne brûle pas d'enthousiasme. "Je fais chaque derby, mais ce sont loin d'être les matches les plus intéressants pour un supporter. Trop de répression, et pas assez de liberté." Xavier et Mathias seront eux dans des tribunes latérales, donc "lyonnaises", avec des proches. Ils vont devoir jongler avec leurs sentiments... C'était arrivé à Xavier en 2010, avec la victoire 1-0 des Verts sur un coup franc de Payet. La joie avait alors dû être un minimum intériorisée. Ce soir-là, le président de l'OL, Jean-Michel Aulas, avait consolé ses supporters en leur faisant remarquer que les joueurs stéphanois jouaient la Ligue des champions "à la Playstation". Mais les choses changent et, dimanche, les deux équipes vont se disputer le ticket pour la jouer dans la réalité...

De longues années de vaches maigres et demain ?

Saint-Etienne maxppp 930620

"Avec la victoire en Coupe de la Ligue samedi dernier, les collègues ont constaté qu'il y a une ferveur qui n'existe pas à Lyon", insiste Xavier, qui, comme tous les autres supporters stéphanois, a "subi" la domination écrasante de l'OL au début du siècle. "Le fait d'avoir gagné une compétition, ça change et ça a permis de montrer la passion qu'il y a autour du club." Thierry l'a remarqué lui aussi. "Il y a un engouement et de nouvelles adhésions dans les sections." Après des décennies à se raccrocher à un "passé glorieux" et au "côté populaire" (Mathias), les supporters "lyonnais" des Verts, sevrés de victoires dans le derby (deux en 20 ans !), croient à nouveau en un avenir radieux. Il passe par une victoire au stade de Gerland, tout près de chez eux.