Gautier: "Je me fais plaisir"

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
A la barre du Team Foncia pour la troisième saison sur le Challenge Julius-Baer, circuit disputé sur Décision 35 sur le Lac Léman, Alain Gautier sera samedi, au côté de Michel Desjoyeaux, au départ du Bol d'Or, course de 66 milles réunissant plus de 500 bateaux au départ de Genève. L'occasion pour le Lorientais de nous présenter le support et de faire le point sur son actualité, notamment sur sa collaboration avec Alinghi sur la Coupe de l'America.

A la barre du Team Foncia pour la troisième saison sur le Challenge Julius-Baer, circuit disputé sur Décision 35 sur le Lac Léman, Alain Gautier sera samedi, au côté de Michel Desjoyeaux, au départ du Bol d'Or, course de 66 milles réunissant plus de 500 bateaux au départ de Genève. L'occasion pour le Lorientais de nous présenter le support et de faire le point sur son actualité, notamment sur sa collaboration avec Alinghi sur la Coupe de l'America.Pouvez-vous nous présenter les caractéristiques du Décision 35 ?D'abord, ce sont des engins monotypes, ce qui est intéressant sportivement et financièrement parlant, car ça limite les budgets, il n'y a pas de développement à faire entre deux Championnats. Sinon, c'est un bateau dessiné pour le Lac Léman, avec une grosse surface de voile, parce que le temps sur le Lac est en moyenne léger, un mât de 21 mètres, ce qui est vraiment beaucoup pour des bateaux de 10 mètres. L'envers du décor, c'est que comme ils sont dessinés avec des formes de coque très fines, ils tolèrent moins bien le clapot.Et au niveau de la puissance ?Proportionnellement, le rapport poids-puissance est plus important qu'un trimaran Orma, mais ça en fait un bateau difficile à mener au-dessus de 18-20 noeuds de vent. A côté de ça, c'est agréable de pouvoir se mettre sur une coque dès 5-6 noeuds. Après, comme ils sont très toilés et que le vent est assez instable avec des rafales, ça donne lieu à pas mal de chavirages.Combien d'équipiers ?On navigue avec un poids maximum de 462 kilos qu'on peut atteindre à cinq, six ou sept pour l'équipage féminin de Ladycat. Mais la majeure partie des équipages navigue à six.Peut-on dire que ce Challenge Julius-Baer réussit ce que l'Orma (multicoques de 60 pieds) a longtemps tenté de faire en France, faire régater à armes égales des marins d'horizons différents ?Non, on ne peut pas résumer comme ça, car l'Orma avait ses problématiques bien particulières avec des bateaux qui devaient faire des courses au large, en solitaire notamment, et des Grands Prix. Ce n'est pas facile de gérer ce genre de programme, on l'a vu et c'est en partie pour ça que l'Orma est aujourd'hui dans une situation très difficile. Sur le Lac, ce sont des bateaux de propriétaire, la problématique est totalement différente. On ne navigue que sur le Lac Léman, il n'y a pas de problèmes de logistique ou de budgets qui s'enflamment, tout le monde a les mêmes intérêts et le même attrait pour la série. Après, ces propriétaires font appel à des navigateurs plus ou moins connus, issus de la course au large, du Tornado ou de la Coupe de l'America, ça fait un panachage d'équipages assez intéressant."Un peu en dedans par rapport à nos ambitions"Pour briller, que faut-il prioritairement ?Comme la majeure partie des huit épreuves sont entre trois bouées, mis à part les deux grandes courses que sont la Genève-Rolle-Genève et le Bol d'Or, il faut savoir gérer les situations de contact très proche avec des bateaux qui vont vite. Donc il faut être avant tout un bon régatier et connaître le Lac parce que le vent est assez particulier.Justement, quelles sont les caractéristiques du plan d'eau ?Le Lac, c'est une cuvette entourée de montagnes, ce qui donne des vents très irréguliers, allant de 0 à 20 noeuds très rapidement, il faut être extrêmement vigilant, regarder partout, car le vent peut s'échapper par devant, revenir par derrière, c'est assez complexe. Et le clapot peut se lever assez vite car comme c'est du vent qui tombe de la montagne avec pas mal d'angle sur la surface de l'eau, ça crée des vagues assez abruptes, courtes et qui peuvent être mauvaises.Deux épreuves ont été disputées depuis le début de la saison, quel est le bilan provisoire pour le Team Foncia ?On fait deux fois quatrième, ce qui est un peu décevant par rapport à nos ambitions. Ça fait deux saisons qu'on finit deuxièmes du Challenge Julius-Baer derrière Alinghi et comme on vise la victoire finale, pour l'instant on est un peu en dedans.Le Bol d'Or se dispute ce week-end, pouvez-vous nous en parler ?Ça se dispute sur une seule manche qui fait le tour du lac, avec des vents complètement changeants d'un bout à l'autre. Il y a 500 ou 600 bateaux très différents au départ, énormément de bateaux spectateurs qui lèvent du clapot sur une seule ligne de départ, ça en fait un truc assez incroyable à voir.Pour vous qui avez auparavant beaucoup navigué au large, ce genre d'épreuve, c'est comme une amusante récréation, non ?Non, ce n'est pas vraiment une récréation. J'ai la chance d'assouvir ma passion en vivant de la course, j'ai toujours cherché à me faire plaisir et ça continue maintenant. Naviguer en trimaran Orma, c'était passionnant, là, le niveau est très relevé, donc il faut se donner et quand on ne gagne pas, on est déçu. C'est juste quelque chose de différent, j'aime bien ne pas être tout le temps dans le même domaine, j'ai trouvé ici beaucoup de choses qui me plaisent."Affligeant d'en être arrivé là"Justement, quelles sont vos autres activités, êtes-vous tenté comme d'autres par les records ?Non. Depuis quelques années, on me propose de faire des records sur des grands trimarans, mais les records, ça ne m'a jamais attiré énormément, je préfère la course, voire la course en monotype où on est vraiment tous à armes égales. Sinon, je travaille toujours avec Alinghi pour la défense de la Coupe de l'America, c'est passionnant. On est complètement dessus parce que le bateau va être mis à l'eau dans quasiment un mois, il y aura après tout le développement et la mise au point. Après, pour 2010, on verra, peut-être un Figaro ou autre chose, on va déjà aller jusqu'à la Coupe normalement en février.Finalement, l'absence d'accord entre Alinghi et Oracle sur une Coupe classique est une belle opportunité pour vous, spécialiste du multicoque, de vivre de l'intérieur le Coupe de l'America... J'en suis conscient mais ça ne m'empêche pas de penser que c'est complètement affligeant d'en être arrivé là. C'est un retour de vingt-trente ans en arrière dû en grande partie à Coutts (Russell Coutts, ancien skipper d'Alinghi aujourd'hui sur Oracle, ndlr) et à Oracle. Même si chacun a ses responsabilités, la conséquence, c'est que ça met une dizaine d'équipes sur la touche, je trouve ça extrêmement dommage.Quel a été votre rôle au sein d'Alinghi dans la conception du bateau ?Il y a le Design Team d'Alinghi, rejoint par des gens comme Nigel Irens et Benoît Cabaret (architectes qui ont travaillé sur de nombreux multicoques dont les actuels Sodeb'O et Idec, ndlr), qui a dessiné le bateau, et des consultants comme moi dont le rôle est de donner leur avis lorsqu'on nous pose des questions. Je n'ai jamais été à plein temps, même si ça va être le cas de mi-juin à mi-août pour les premiers essais.Les dimensions de ce multicoque, c'est vraiment 90 pieds sur 90 pieds, un carré ?(Silence). Je ne sais plus trop... C'est marrant, j'ai la mémoire qui bloque !Est-il envisageable de vous voir barrer Alinghi lors de la Coupe de l'America, face, par exemple, à Franck Cammas sur Oracle ?J'espère barrer en essais pour la mise au point, mais il y a peu de chances que je sois à la barre pour la Coupe, encore moins face à Franck Cammas parce que je pense qu'il ne sera pas non plus sur le bateau américain, il y a de grosses compétences dans le Team Alinghi.Pour finir sur les autres courses, vous avez été responsable de la sécurité sur le dernier Vendée Globe, ça ne vous a pas titillé d'y retourner en tant que skipper ?Non, ça ne m'a pas perturbé plus que cela, j'ai été très heureux de travailler avec l'équipe du Vendée Globe, mais le refaire, ce n'est vraiment pas d'actualité. Je sais que c'est une course qui est de plus en plus dure, donc je n'ai ni l'ambition ni l'envie d'aller me confronter à cela.Et la Volvo ?Je crois que je n'ai plus l'envie ni la motivation de faire ça. C'est une course extrêmement dure, en plus l'équipage n'est pas mon domaine de prédilection, et c'est très long, trop long... Donc pour moi, mis à part éventuellement dans le domaine du design, naviguer sur une Volvo, je ne m'y vois pas du tout.