Un vétéran du djihad assigné à résidence depuis dix ans saisit la CEDH

Kamel Daoudi, plus ancien assigné à résidence de France, demande à la CEDH la condamnation de la France.
Kamel Daoudi, plus ancien assigné à résidence de France, demande à la CEDH la condamnation de la France. © Capture d'écran Canal +
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avec AFP
Condamné en appel à six ans de prison et à une interdiction définitive du territoire, Kamel Daoudi a saisi la Cour européenne des droits de l'Homme pour faire condamner la France qu'il accuse de l'avoir assigné à résidence "à perpétuité".

Un Algérien de 44 ans condamné pour terrorisme et assigné à résidence depuis 2008 a saisi la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) pour faire condamner la France qu'il accuse de l'avoir assigné à résidence "à perpétuité". En 2005, Kamel Daoudi avait été condamné en appel à six ans de prison et à une interdiction définitive du territoire pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", et déchu de sa nationalité française.

Son expulsion interdite. Membre d'un groupe islamiste affilié à Al-Qaïda, il était soupçonné d'avoir préparé un attentat contre l'ambassade des États-Unis à Paris. La CEDH avait toutefois interdit son expulsion en raison du risque de torture en Algérie, pays qu'il avait quitté à l'âge de 5 ans. "Kamel Daoudi, plus ancien assigné à résidence de France, demande à la CEDH la condamnation de la France", écrit son avocat Bruno Vinay dans un communiqué. "Depuis 10 ans, 5 mois et 17 jours, Kamel Daoudi est assigné à résidence sur décision du ministre de l'Intérieur", poursuit-il. La Cour européenne a confirmé mardi avoir reçu cette requête. 

Il doit pointer trois fois par jour. Selon Me Vinay, Kamel Daoudi ne peut sortir de sa commune, doit pointer trois fois par jour à la gendarmerie et doit respecter un couvre-feu. Après plusieurs déplacements, il a été "transféré" fin 2016 dans une chambre d'hôtel de 9m2 à Saint-Jean-d'Angely (Charente-Maritime), "à 460 km de ses enfants français et de sa compagne", a-t-il expliqué. Pour l'avocat, "l'objectif manifeste est de réduire à néant la dignité d'un homme".

"Une assignation à résidence peut-elle être à durée illimitée ?" Me Vinay a posé deux questions à la CEDH : "Lorsqu'on est sous le régime de l'assignation à résidence, dans les conditions de Kamel Daoudi, est-on privé de sa liberté ou a-t-on juste des restrictions dans sa liberté ?" et "Une mesure d'assignation à résidence administrative peut-elle être à durée illimitée?". "Les juridictions françaises ont toutes rejeté les recours de Kamel Daoudi. (...) Jusqu'au Conseil constitutionnel qui a estimé que son assignation pouvait sans méconnaître notre constitution être perpétuelle", a expliqué l'avocat.

En décembre, le Conseil constitutionnel avait en effet recadré l'assignation à résidence : les sages ont reconnu au législateur le droit "de ne pas fixer de durée maximale à l'assignation à résidence" mais ont demandé un réexamen dans le temps de la situation. La loi prévoit depuis mars qu'il faut motiver la décision au bout de cinq ans.