"Tu fais un carnage, bim" : quand Adel K. évoquait ses intentions

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ATTENTAT - La correspondance d’Adel K. sur le réseau Telegram indique qu’il avait prémédité son attaque à Saint-Etienne-du-Rouvray.

Un jeune sans casier judiciaire, issu d’une famille stable et impliquée, qui déclare vouloir tourner la page et se réinsérer. Adel K., l’un des deux auteurs de l’attentat dans l’église de Saint-Etienne-du-Rouvray, avait de nombreux arguments pour tromper la justice et les forces de l’ordre. L’enquête sur ce jeune issu de l’agglomération rouennaise montre pourtant qu’il n’avait pas tourné la page du djihadisme. C’est notamment ce que souligne sa correspondance sur la messagerie Telegram, très prisée de l’organisation Etat islamique, que L’Express s’est procurée et dont Europe 1 a eu confirmation.

Un attentat prémédité. C’est le principal enseignement de cette correspondance électronique : Adel K. avait imaginé l'attaque d'une église. Dans un message envoyé le 19 juillet à un destinataire dont on ignore l'identité, Adel K. prend acte du fait qu’il lui sera difficile de rejoindre la Syrie. A la question "plutôt hijra (l’émigration vers une ‘terre d’islam’) ou attentat ?", Adel K. répond qu’il opte pour l’attentat et précise même son mode opératoire : "Tu prends un couteau, tu vas dans une église, tu fais un carnage, bim. Tu tranches deux ou trois têtes et c'est bon c'est fini", déclare-t-il dans un message audio.

Une radicalisation renforcée en prison. A la lecture de cette correspondance, on découvre aussi que le séjour d’Adel K. à Fleury-Mérogis n’aurait pas arrangé la situation et l’aurait encore renforcé dans ses convictions meurtrières. "Il semble qu'il se soit encore davantage radicalisé lors de ce séjour en prison", confiait d'ailleurs jeudi une source proche de l'enquête à l’AFP.

" Tu tranches deux ou trois têtes et c'est bon c'est fini "

Incarcéré dans la même cellule qu’un djihadiste plus chevronné qu’il qualifie de "cheik" et de "guide" dans ses messages, Adel K. écrit notamment que ce nouveau mentor lui "a donné des idées". Ce dernier lui aurait exposé une multitude de méthodes pour mener des attentats les plus meurtriers possibles avec des moyens limités, un mode d’emploi dont le terroriste s’est visiblement inspiré. L’apprenti djihadiste affirme également avoir rencontré derrière les barreaux "un émir d'Al-Qaïda et d'autres frères".

En quête de reconnaissance et de publicité. Cette correspondance permet également de voir qu’Adel K. était visiblement en quête de reconnaissance de la part de la mouvance djihadiste. Il affirme ainsi qu’il souhaite "organiser des choses" et "réunir les frères de Rouen" pour constituer une cellule locale.

La veille de l’attentat, il prend également le soin de prévenir ses contacts qu’il prépare "des gros trucs" et les invite à relayer son message. "Je vous préviendrai à l'avance, trois quatre minutes avant et quand le truc arrivera, il faudra le partager direct", écrit-il sur Telegram. Selon les informations d'Europe 1, aucun élément d'investigation ne permet pour l'instant de confirmer que les deux tueurs de l'église, Adel K. et Abdel Malik P., ont filmé l'assassinat du prêtre Jacques Hamel. Mais selon le témoignage de Sœur Danielle à BFMTV, qui est parvenue à s'échapper au début de la prise d'otages, les assaillants auraient filmé la scène après avoir forcé l'abbé à s'agenouiller. 

Le matin même de l'attentat, Adel K. continue de faire son auto-promotion : vers 8h30, le jeune homme de 19 ans écrit "partager (sic) ce qui va suivre", puis il se connecte une nouvelle fois depuis l’église de Saint-Etienne-de-Rouvray, sans rien envoyer d’après L’Express. Ce sera donc son dernier message avant d’être abattu.