Emmanuel Macron se rend ce mardi dans les Sables-d’Olonne pour présenter son projet de réforme concernant l’enseignement professionnel. 1:26
  • Copié
Louise Sallé, édité par Laura Laplaud , modifié à
Emmanuel Macron se rend ce mardi dans les Sables-d’Olonne pour présenter son projet de réforme concernant l’enseignement professionnel. Objectif : doubler la durée des stages en entreprise, afin de faire converger la filière vers l’apprentissage. La mesure, qui pourrait entrer en vigueur dès septembre prochain, inquiète certains élèves et professeurs.

Parmi les nombreux chantiers de l’Éducation nationale lancés à l'occasion de cette rentrée : la transformation du lycée professionnel fait partie de la liste. Cela concernerait un tiers des lycéens français, soir près de 630.000 élèves. L’idée : rallonger la durée des stages en entreprise pour se rapprocher d’une formation en apprentissage. Cette mesure vise ainsi à relever le taux d'insertion, qui est d'environ 41% pour les CAP et 53% bacheliers professionnels. Contre plus de 60% pour les apprentis du même âge. Emmanuel Macron se rend ce mardi dans les Sables-d’Olonne pour présenter son projet de réforme concernant l’enseignement professionnel.

De la Seconde à la Terminale, donc, les élèves effectueraient 33 semaines en entreprise, au lieu de 22 actuellement. Et la mesure pourrait entrer en vigueur dès septembre prochain. Mais dans un lycée professionnel parisien du 1er arrondissement, spécialisé dans la vente et le commerce, les avis des professeurs et élèves sont mitigés.

Un basculement trop "précoce" vers la vie professionnelle

Souriant, appuyé contre la barrière sur le trottoir face à l’entrée du lycée, Benjamin, en Première, a entendu parler du projet de réforme sur TikTok. : "On a trois stages de courte durée. Dans un métier, on ne peut pas apprendre tout en deux semaines. Ils essayent de nous apprendre au maximum, mais on apprend juste les bases", déplore-t-il.

C’est l’un des rares élèves de l’établissement interrogés à se prononcer en faveur de cette transformation. Pour Aïcha en revanche, actuellement en Seconde, même si les heures en entreprise pourraient donner lieu à une rémunération, il est trop tôt pour basculer vers une vie professionnelle de cette ampleur. Ses journées de travail ne l’épanouissent pas, elle cherche encore sa voie et les cours l’aident à y voir plus clair.

"Moi, ça me rassure d'être en cours, mais pas d'être en entreprise parce que je ne me sens pas trop à l'aise…", confie la lycéenne. "Vu qu'ils nous prennent vraiment pour des stagiaires, ils ne nous prennent pas encore pour des employés, donc passer deux mois là-bas par exemple, je ne m’y vois pas du tout".

L’apprentissage de la culture générale ou du savoir-être en entreprise passent à la trappe

Shaïma, en Première, est du même avis. D’autant que ces heures de stages risquent d’être prises sur l’enseignement général. C’est en tout cas ce que craignent certains élèves et professeurs. "Ce n'est pas terrible parce que déjà on aura moins d'heures de cours. L'enseignement des maths, du français, des matières en général, ça nous permet d'accéder à l'université. Et j’aimerais pouvoir faire un BTS après mes études, donc c’est essentiel ne pas perdre d’heures de cours dans notre emploi du temps", argumente Shaïma.

Anna*, enfin, professeure d’éco-gestion, ne cache pas son inquiétude. "En cours, les élèves renforcent leur culture générale, apprennent le savoir être en entreprise. Et tout ça, ça passe à la trappe puisqu’on les emmène directement dans des entreprises pour être exécutant. Donc quelque part, on freine un peu l'évolution professionnelle", regrette-t-elle.

Les syndicats enseignants ne rejettent pas tous l’idée de l’apprentissage. Mais si cela se fait au détriment de certains cours, l’allongement de la durée des stages sera difficile à faire accepter. D’après l’Élysée, les ajustements d’emplois du temps pour instaurer plus de stages relèveront de "concertations locales", dans le cadre du Conseil de la refondation, et seront discutés au sein de chaque établissement.

*Le prénom a été modifié pour préserver l’anonymat de la personne interrogée.