Stef a accepté sa bipolarité et trouvé du travail : "On m'a proposé trois CDI"

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Léa Beaudufe-Hamelin
Stef a accepté sa bipolarité et après trois ans de chômage, elle vient de trouver un emploi de chauffeuse poids lourd. Au micro d’Olivier Delacroix, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Stef se réjouit de voir ses efforts pour trouver du travail récompensés et revient sur son parcours d’acceptation de sa maladie.
TÉMOIGNAGE

Stef a été diagnostiquée bipolaire à l’âge de 20 ans et a mis 25 ans à accepter sa maladie. Elle refusait alors de prendre ses traitements. Aujourd’hui, Stef a accepté sa bipolarité et prend un traitement qu’elle a choisi et se sent bien. Après trois ans de chômage, elle vient de trouver un emploi en tant que chauffeuse poids lourd. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Stef évoque son acceptation de la maladie et sa détermination à trouver du travail.

"Ça va très bien : j’ai trouvé du travail et j’ai négocié mon salaire, alors que j’étais au chômage depuis trois ans. J’ai fait des tas de lettres de motivation et j’ai déposé mes CV partout. J'ai forcé des portes, où on ne voulait pas me laisser entrer, parce qu’ils n’embauchaient personne à cause du Covid-19. Donc, je mettais des CV dans des boites aux lettres. J’ai fait des choses folles, mais je suis contente, parce que ça a payé.

J'ai mis 25 ans à accepter que j'étais bipolaire. En 25 ans, je me suis toujours débrouillée pour ne pas prendre de traitements. À chaque fois qu'on m'en donnait, je ne les prenais pas. Donc j’ai eu des hospitalisations, mais je me suis sevrée toute seule. Je suis même allée jusqu'à boire sept litres d'eau par jour quand j’étais hospitalisée, pour que les médicaments ne fassent pas trop effet et pour rester lucide. Je prenais mes médicaments, mais je buvais beaucoup pour éliminer. Je ne sais pas si c’était bien de faire ça, ce n’était pas l’avis des psys.

" Maintenant que j'ai accepté la maladie, j'ai aussi accepté un petit traitement "

On m'a diagnostiquée bipolaire quand j’avais 20 ans. Il y a 25 ans, c'était déjà un mot tabou. Ça l’est toujours d’ailleurs. Je ne le dis jamais, et surtout pas à mes patrons. Il ne faut pas dire qu’on est bipolaire à ses patrons, à ses amis et à certains membres de sa famille, parce que parfois, ils ne sont pas capables de comprendre. Il faut en parler à des gens qui peuvent vraiment le comprendre, parce que ça fait peur. Dans le métier que je faisais avant, si les gens que je transportais avaient su que j’étais bipolaire, ils n’auraient pas pris le car.

Maintenant que j'ai accepté la maladie, j'ai aussi accepté un petit traitement. Mais c’est un traitement que j’ai choisi. J'ai lu beaucoup de livres de psychiatrie pour savoir lequel qui était le meilleur. J’ai creusé et je continue. Je voudrais que demain on dise qu’on a trouvé la solution à la bipolarité. Je suis peut-être rêveuse. Je n’ai jamais eu d'idées suicidaires, heureusement. Mais je me suis mise dans des situations qui auraient pu être très dangereuses pour moi et qui auraient pu être considérées comme suicidaires. Ce sont forcément beaucoup de souffrances, parce que dans ces moments-là, on n’est plus soi. 

Dans la même journée, on m'a proposé trois CDI ! Il a fallu que je fasse le choix entre le transport de voyageurs et le transport de marchandises. En janvier, j'ai passé mon permis poids lourd et je l’ai eu. J'ai directement passé ma FIMO (Formation Initiale Minimum Obligatoire). Puis, j’ai commencé à chercher du travail. Au début je me disais que je n’allais peut-être pas en trouver tout de suite. Mais finalement, au bout de trois semaines, j’ai trouvé ! J’ai tout fait pour, je suis allée chercher les patrons. Je suis contente parce que ça a payé. Alors, j’ai pu négocier mon salaire. 

Mon futur patron m’a dit qu’il n’y avait pas de vestiaire pour moi, parce qu’ils n’ont pas de femme. Dans l'entreprise de transport en commun où je travaillais avant, nous étions très peu de femmes au début. J’avais un patron qui était très en avance sur son temps. Il voulait absolument qu'il y ait une mixité. Donc, quand il embauchait un homme, il embauchait une femme. C’était il y a 20 ans. Le transport de marchandises, c'est encore autre chose. Ça n’a pas évolué de la même façon pour les femmes, mais ça vient tout doucement."