Sécheresse : un maire de la Côte d'Azur dénonce la consommation d'eau de ses célébrités

Villa - Alpes-Maritimes
La consommation de certains propriétaires est montée à 17.000 m3 d'eau, soit 1.000 m3 par semaine. © RIEGER BERTRAND / HEMIS.FR / HEMIS.FR / HEMIS VIA AFP
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avec AFP / Crédit photo : RIEGER BERTRAND / HEMIS.FR / HEMIS.FR / HEMIS VIA AFP , modifié à
Face à la sécheresse qui touche particulièrement le sud de la France, le maire de Châteauneuf-Grasse, dans les Alpes-Maritimes, a dénoncé vendredi les excès de consommation d'eau de certains de ses administrés VIP. Cependant, il s'étonne d'être le seul maire des 24 communes de la communauté d'agglomération de Sophia-Antipolis à s'en soucier.

Le maire de Châteauneuf-Grasse, dans les Alpes-Maritimes, a dénoncé vendredi auprès de l'AFP les excès de consommation d'eau, en pleine sécheresse, de certains de ses administrés VIP. "En recevant la liste des trente plus gros consommateurs d'eau de la commune, je me suis aperçu qu'il y avait plusieurs grandes propriétés qui y figuraient", a témoigné Emmanuel Delmotte, sans cibler aucun nom.

2.000 m3 d'eau consommés en une semaine

Selon les déclarations de l'élu au quotidien Libération, qui a révélé l'information dimanche, ces particuliers, dont les propriétés s'étendent sur 20 ou 30 hectares, compteraient "des Premiers ministres, des rois, des ministres, d'anciens présidents du conseil, surtout étrangers". Parmi eux, Silvio Berlusconi, l'ancien chef du gouvernement italien, avait confirmé le maire au journal. La période concernée par ces relevés s'étale sur 17 semaines, d'avril à août 2022 : la région était alors en alerte sécheresse, et les arrêtés préfectoraux imposaient aux particuliers des mesures d'économie d'eau drastiques, notamment en matière de remplissage des piscines ou d'arrosage des jardins.

"Pendant cette période, la consommation de certains propriétaires est pourtant montée à 17.000 m3 d'eau, soit 1.000 m3 par semaine", a dénoncé le maire, en comparant avec les "à peine 2.000 m3" de la maison de retraite communale et ses 120 lits. Dans certains cas, leur consommation d'eau hebdomadaire a même atteint les 2.000 m3. Et leur consommation réelle était sans doute supérieure, certains disposant de forages privés non comptabilisés, a précisé l'élu.

"Les amendes ne servent à rien"

Si Albert II, ex-roi des Belges, figure aussi dans cette liste des gros consommateurs, c'est uniquement sur son compteur vert agricole, en tant que producteur d'huile d'olive notamment, mais pas pour son compteur personnel ou le remplissage de sa piscine, a insisté Emmanuel Delmotte. De même, l'ex-souverain belge lui a assuré avoir réparé la fuite sur ses canalisations agricoles. Une certitude : "Pour des gens comme ça, les amendes de 1.500 ou 3.000 euros ne servent à rien", constate le maire. D'où l'idée, en lien avec le délégataire local de gestion de l'eau, le groupe Suez, de discuter directement avec ces gros consommateurs d'eau, pour les raisonner.

"On va voir si ces efforts portent leurs fruits", espère Emmanuel Delmotte, étonné d'avoir été le seul maire des 24 communes de la communauté d'agglomération de Sophia-Antipolis à s'être exprimé sur le sujet : "La liste de tous les gros consommateurs nous a été transmise, à la demande de la préfecture. Comment se fait-il que je sois le seul à sembler m'en soucier ?".  Sophia-Antipolis compte notamment des villes comme Antibes ou Saint-Paul-de-Vence, qui accueillent, elles aussi, de luxueuses propriétés privées.

Cette prise de position de Emmanuel Delmotte intervient alors que le département est, de nouveau, placé au niveau sécheresse, voire "sécheresse renforcée", le troisième des quatre niveaux d'alerte, après le constat d'un déficit pluviométrique de 76% en mars. "L'an dernier, on avait dû couper l'eau à un agriculteur (de la commune, NDLR). Aujourd'hui, toutes mes sources sont déjà taries. Il y aura des coupures à faire si tout le monde ne respecte pas la réglementation. Mais à qui je coupe l'eau ? Au golf ? Aux agriculteurs ? Quand il n'y aura plus d'eau, il faudra la couper pour tout le monde", prévient-il. "Aujourd'hui, on achète de l'eau très cher au syndicat voisin, celui de Cannes", explique le maire de Châteauneuf-Grasse. "Mais ça ne va pas durer, car le lac de Saint-Cassien qui l'alimente se vide. Et au bout d'un moment ils voudront garder l'eau pour eux..."