Police République 1:22
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Léa Leostic , modifié à
Le sociologue Michel Wieviorka, spécialiste de l'institution policière, était l’invité d’Europe 1 samedi midi pour revenir sur les violences policières survenues cette semaine. Selon l'ancien président de la fondation Maison des sciences de l'homme, on ne peut pas parler de "cas isolés".
ANALYSE

Quelques jours après la publication des images de l’agression du producteur de musique Michel Zecler dans le 17e arrondissement de Paris, Emmanuel Macron a réagi sur Facebook. "Des images qui nous font honte", a écrit le Président de la République, qui a demandé au gouvernement de lui faire rapidement des propositions pour lutter efficacement contre toutes les discriminations. Invité d’Europe 1 samedi, le sociologue Michel Wieviorka est revenu sur ce qu'il décrit comme des "violences racistes policières".

"Tous les policiers ne sont pas racistes et violents"

"J'utilise les trois mots parce que l'on ne peut pas dire que ce sont trois cas isolés et qu'il n'y a pas grand-chose d'autre part ailleurs, des 'gens qui déconnent', comme le dit Monsieur Darmanin. On ne peut pas dire ça, mais on ne peut pas dire non plus que la police est raciste et violente. Tous les policiers ne sont pas racistes et violents", affirme d'abord l'ancien président de la fondation Maison des sciences de l'homme.

"Il faut poser le problème autrement. Il y a d'un côté une culture policière perméable au racisme, mais pas un racisme qui devient passage à l'acte, sinon exceptionnellement. Le vrai problème, c'est comment on passe d'une culture qui a été perméable au racisme et qui le demeure, à des actes exceptionnels aussi graves que celui dont nous parlons", poursuit le spécialiste.

"Une crise institutionnelle et politique"

Pour Michel Wieviorka, notamment auteur de l’ouvrage Pour une démocratie de combat, ces évènements s’inscrivent dans un contexte de crise politique importante : "On ne parle même plus du virus quand on parle des manifestations d'aujourd'hui, tellement on est dans la crise politique et dans la crise des libertés."

Le sociologue a ensuite abordé l’article 24 de la loi "sécurité globale", qui prévoit de restreindre la possibilité de filmer les forces de l'ordre, ainsi que l'imbroglio entre la demande de réécriture formulée par Jean Castex et le mécontentement des parlementaires qui ont dénoncé le "mépris" de leur travail de la part du gouvernement. "On est dans un pays où, entre l'Élysée, le chef de l'Etat et toutes les institutions intermédiaires, comme le Parlement, les maires, les municipalités, les syndicats, on a le sentiment que le courant passe peu, mal, et très difficilement. Il y a une crise institutionnelle et politique".

Des ministres et des parlementaires "soufflent sur les braises"

"C'est très bien de faire un discours de fermeté et d'apaisement", poursuit Michel Wieviorka, en référence à la réaction d’Emmanuel Macron vendredi soir. "Mais quand on a des ministres ou des parlementaires qui soufflent sur les braises, qui poussent le pays dans un sens ou dans un autre, tout ça crée une situation très, très tendue. Je suis vraiment très préoccupé, parce que ces événements s'inscrivent dans un ensemble beaucoup plus large où on voit se profiler des tendances à l'autoritarisme", a continué Michel Wieviorka.

Samedi après-midi, de nouvelles manifestations contre la loi "sécurité globale" et son article 24 ont été organisées à Paris, mais aussi à Bordeaux, Lyon, Strasbourg, Marseille, ou encore Grenoble.