Pourquoi le chocolat pourrait bientôt devenir un bien de luxe

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Jean-Pierre Montanay édité par Antoine Cuny-Le Callet
Selon l’indice des matières premières de Cyclope, le prix du cacao devrait augmenter de 9% l’an prochain. Les prix s'envolent du fait d'une consommation qui augmente et d'une production volontairement limitée par les cultivateurs. Selon notre chroniqueur Jean-Pierre Montanay, le chocolat pourrait bientôt devenir un bien de luxe.

Depuis des lustres, les Cassandre prédisent un avenir noir au chocolat. Ils ont peur que demain, les Chinois en mangent trop : on estime qu'un Chinois en consommera un kilo par an d'ici dix ans, contre 100 grammes seulement aujourd’hui. A titre de comparaison, les Français en consomme eux... sept kilos par an. En somme, la consommation chinoise mettrait le marché sous pression et ferait flamber les prix. Pour l'instant, seuls les riches chinois gourmets sont fans du carré de chocolat.

Si le cours du cacao s’est envolé de 20% depuis août dernier, c’est surtout parce que les deux principaux pays producteurs, la Côte d’Ivoire et le Ghana, se sont mis d’accord pour imposer une sorte d’OPEP du cacao afin de stabiliser des cours qui ont une fâcheuse tendance à faire du yoyo. Les deux pays cherchent à garantir un meilleur revenu aux planteurs. Le message semble bien reçu par les industriels qui savent que si les petits paysans ne peuvent plus vivre du cacao, le chocolat pourrait disparaître.

Impact du réchauffement climatique

La culture du cacao est unique en son genre. Les cacaoyers sont plantés essentiellement sur de toutes petites parcelles familiales, de deux à trois hectares, disséminées dans la forêt, sous le contrôle des multinationale du chocolat comme Mars, Nestlé ou Ferrero. L’arbre est très fragile, sujet aux maladies, et les nouveaux plants ne donnent pas de fèves avant plusieurs années. Il est par ailleurs sensible aussi aux aléas climatiques ce qui fait craindre un impact du réchauffement climatique sur la production à venir.

Si le prix du cacao continue de grimper au même rythme dans les années à venir, deux marchés du chocolat pourraient naître. D’un côté, celui du chocolat noir (au moins 43% de cacao), de plus en plus cher, qui pourrait devenir un produit de luxe. Apparaîtrait alors une clientèle accro, prête à s’offrir des tablettes haut de gamme, certifiées "commerce équitable" et bio, confectionnés à partir de variétés rares, des grands crus de cacao comme dans le vin.

De l’autre côté, on trouverait un produit industriel, de masse, qui ne pourra même plus obtenir l’appellation "chocolat". Il contiendra de moins en moins de cacao pour rester abordable et de plus en plus d’arômes de synthèse pour avoir quand même un peu de goût. Dans l’histoire, c'est le consommateur qui pourrait être chocolat.