Plaintes contre Luc Besson : "Le fil rouge dans cette affaire, c'est l'éventuel abus de pouvoir"

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Anaïs Huet , modifié à
La journaliste Marine Turchi a publié mercredi sur Mediapart une enquête révélant cinq nouveaux témoignages de femmes accusant Luc Besson de gestes déplacés, voire d'agressions sexuelles.
INTERVIEW

Cinq nouvelles femmes ont témoigné auprès de Mediapart de gestes déplacés voire d'agressions sexuelles de la part du réalisateur Luc Besson, après une plainte pour viol déposée par une actrice en mai, révélée par Europe 1, et d'autres témoignages publiés en juillet. La journaliste Marine Turchi, à l'origine de cette enquête, était l'invitée de Matthieu Belliard sur Europe 1 mercredi soir.

"Des similitudes dans ces témoignages". "Les faits que ces femmes dénoncent sont de gravité différente", indique d'abord la journaliste du site d'informations. Deux anciennes employées d'Europacorp, la société de production de Luc Besson, deux anciennes étudiantes de l'école de la Cité du cinéma, fondée par le cinéaste, et une ex-mannequin ont témoigné de comportements inappropriés de la part du réalisateur du Grand Bleu, allant du harcèlement sexuel à des relations sexuelles non consenties, qui se seraient déroulés entre 1995 et 2016, pour l'une d'entre elles. "Il y a des similitudes très importantes dans ces témoignages, avec un côté très répétitif", note toutefois Marine Turchi. 

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Des propos et un comportement "extrêmement déplacés". "L'un des témoignages est celui d'une ancienne mannequin, Karine Isambert (la seule à témoigner de façon non anonyme, ndlr), qui rapporte des faits qui dateraient de 1995, quand elle a rencontré Luc Besson dans un hôtel à Londres. Il avait souhaité la voir car il l'avait repérée dans le book de l'agence City Model dans laquelle elle était à l'époque. Elle explique qu'il n'y a pas eu d'audition, qu'il lui a tenu des propos qu'elle a jugés extrêmement déplacés. Il lui a dit par exemple qu'une actrice, il fallait avoir envie de la baiser pour la recruter. Il a essayé de l'inviter à dîner, elle a refusé. À la fin, elle explique qu'il lui aurait mis une main sur le haut de la fesse, et qu'elle aurait eu un mouvement de recul très brusque", rapporte la journaliste.

"Dire non à l'un des producteurs les plus puissants". Selon Mediapart, une ancienne étudiante de l'école de la Cité du cinéma a témoigné auprès de la police mi-juillet pour dénoncer des faits de "harcèlement sexuel". Ceux-ci se seraient déroulés en janvier 2016 alors qu'elle était étudiante en deuxième année à l'école de la Cité et faisait un stage sur le tournage du film Valérian et la cité des mille planètes. Le cinéaste l'aurait notamment fait "asseoir sur ses genoux" et l'aurait "embrassée dans le cou" à plusieurs reprises, selon son témoignage. "Il y a un fil rouge dans toute cette affaire, c'est la question de l'éventuel abus de pouvoir. Est-ce qu'on peut dire non à l'un des producteurs les plus puissants du cinéma français et européen quand on a 20 ans et qu'on a un début de carrière en jeu", interroge Marine Turchi.

En plus des témoignages, la journaliste de Mediapart s'appuie sur de nombreux éléments matériels. "L'une des accusatrices nous a confiés son agenda, ainsi qu'un mot écrit de la main de Luc Besson que l'on a fait expertiser par une graphologue", souligne Marine Turchi sur notre antenne. 

Le silence de Luc Besson. De son côté, Luc Besson a refusé de répondre aux sollicitations de Mediapart. "On a enquêté pendant six mois, on a essayé de le joindre plusieurs fois", assure Marine Turchi. "Lors de la publication de notre première enquête, il n'avait déjà pas répondu. Son avocat non plus. On a renouvelé nos demandes, mais on n'a pas eu de réponses à nos questions."