Pénuries de médicaments : pas de solution "unique et simpliste", selon les fabricants

868 "signalements de tensions ou de ruptures d'approvisionnement" ont été relevés en 2018 dans les hôpitaux.
868 "signalements de tensions ou de ruptures d'approvisionnement" ont été relevés en 2018 dans les hôpitaux. © AFP
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avec AFP , modifié à
Au lendemain de la tribune d'une vingtaine de médecins et professeurs hospitaliers dénonçant les pénuries de médicaments, les fabricants réagissent et affirment qu’il n’y a pas de solution "unique et simpliste" pour y faire face.

C'est un constat de plus en plus partagé : de nombreux médicaments manquent à l'appel dans les pharmacies. Les pénuries sont des phénomènes "pour lesquels il n'y a pas une solution unique et simpliste", ont réagi lundi les entreprises du médicament, au lendemain de la tribune d'une vingtaine de médecins et professeurs hospitaliers dénonçant ces pénuries.

Dimanche, les signataires d'une tribune publiée dans le Journal du Dimanche s'inquiétaient que 868 "signalements de tensions ou de ruptures d'approvisionnement" ont été relevés en 2018 dans les hôpitaux, soit "vingt fois plus qu'en 2008".

"Des phénomènes multi-factoriels"

"La difficulté, c'est qu'il s'agit de phénomènes multi-factoriels, pour lesquels il n'y a pas une solution unique et simpliste à mettre en oeuvre", souligne Philippe Lamoureux, directeur général du Leem, l’organisation professionnelle des entreprises du médicament.

Il cite notamment "la croissance très importante de la demande mondiale", mais aussi "parfois un manque d'union au niveau européen" qui peut empêcher de compenser un manque dans un pays par les stocks d'un autre, et un "phénomène d'exportation parallèle lié aux différences de prix entre la France et nos voisins européens".

"S’interroger sur le juste prix"

En guise de solution, les signataires de la tribune ont proposé trois grandes mesures : imposer aux laboratoires pharmaceutiques titulaires de l'autorisation de mise sur le marché "la constitution et la gestion de stocks" de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM), rapatrier en Europe "la production des principes actifs" et créer un "établissement pharmaceutique à but non lucratif, si possible européen".

Philippe Lamoureux a jugé le premier point "intéressant", mais pointé qu'il était "matériellement impossible de considérer que cette obligation doit s'appliquer à tous les MITM", qui représentent selon lui environ 40% de la pharmacopée. Il préconise de s'accorder sur une "liste de médicaments d'intérêt sanitaire et stratégique", sur lesquels porterait l'obligation de renforcement des stocks.

En outre, les pénuries touchent souvent des médicaments dont les conditions de rentabilité sont fragiles, poursuit-il, en avertissant qu'il faudra "probablement s'interroger sur le juste prix".

Des outils fiscaux pour améliorer la compétitivité

Concernant la relocalisation d'activité en Europe, cela "ne peut être qu'une stratégie européenne" et que cela risque d'être "compliqué pour des raisons de compétitivité économique européenne par rapport aux compétiteurs", Inde et Chine, estime Philippe Lamoureux, plaidant pour la mise en place de plusieurs "outils", par exemple fiscaux, pour améliorer cette compétitivité.

Quant à la dernière proposition, il a jugé qu'il s'agissait plutôt "d'une mauvaise réponse à une bonne question", n'étant "pas sûr" qu'un opérateur public soit "mieux disant" qu'un opérateur privé pour s'approvisionner en matières premières.