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Alain Acco, édité par Jonathan Grelier avec AFP , modifié à
En novembre 2019, Elisa Pilarski perdait la vie dans une forêt de l'Aisne à la suite de morsures d'un ou plusieurs chiens. Un premier devis pour l'analyse des prélèvements ADN a été refusé par la justice. "Qui peut trouver totalement anormal que les magistrats soient animés par un souci de responsabilité de l'engagement des deniers publics ?" défend la porte-parole du ministère de la Justice, vendredi sur Europe 1.

Le 16 novembre 2019, Elisa Pilarski, une femme enceinte de 29 ans, était retrouvée morte dans une forêt de l'Aisne alors qu'elle s'y promenait avec son chien Curtis. Trois mois après sa mort, les analyses ADN devraient finalement bien être menées sur 67 chiens potentiellement incriminés. Il s'agit des cinq animaux de compagnie d'Elisa Pilarski et de son compagnon Christophe Ellul, ainsi que de 62 chiens qui participaient ce jour-là à une chasse à courre dans la forêt. Mais le délai avant l'analyse des prélèvements ADN s'allonge, la juge d'instruction ayant refusé le devis du premier laboratoire sollicité en raison de son coût prohibitif, comme l'a expliqué jeudi une source proche du dossier.

"Un souci de responsabilité de l'engagement des deniers publics"

"Sur cette question [du coût], qui peut trouver totalement anormal que les magistrats soient animés par un souci de responsabilité de l'engagement des deniers publics ? Que les magistrats sollicitent ainsi, dans certaines affaires nécessitant des expertises complexes et coûteuses, plusieurs devis pour trouver le coût le plus bas, avec bien évidemment une même exigence de qualité ?" défend Agnès Thibault-Lecuivre, la porte-parole du ministère de la Justice, vendredi sur Europe 1.

Cette semaine, l'avocat du compagnon d'Elisa Pilarski a pourtant déploré que la justice ne soit pas "en mesure d'avoir le retour des analyses génétiques, trois mois après le drame", alors que le résultat de ces analyses était parfois évoqué avant la fin du mois de février, ce qui ne sera donc pas le cas.

Un devis de 200.000 euros

"Les expertises ADN ne sont absolument pas abandonnées. Elles vont être bel et bien menées. La procédure a juste pris un peu de retard en raison de la cherté du devis présenté par le laboratoire privé initialement sollicité" par la juge d'instruction, a déclaré la source proche du dossier. Le devis, d'un laboratoire privé réputé, mais cher, de Bordeaux, s'élevait à 200.000 euros avec 20 personnes à temps plein pendant deux mois pour analyser tous les prélèvements. La juge a finalement décidé de demander d'autres devis à ce laboratoire et à d'autres pour expertiser non plus tous les prélèvements d'un coup, mais par séquences.

Une procédure plutôt classique

Un cheminement plutôt classique selon Agnès Thibault-Lecuivre : "Le code de procédure pénale distingue les expertises tarifées - les plus courantes, du type expertises psychologique, médicale et toxicologique - des expertises non tarifées, ADN et balistique, pour ne citer qu'elles. Celles-ci peuvent parfois être très coûteuses et répondent à la règle du devis."

"Le magistrat décide d'ordonner un expertise. Il sollicite un premier laboratoire. Il obtient un devis. Le devis est parfois trop élevé, donc il sollicite un autre laboratoire. Si le devis est toujours trop élevé, il réduit la voilure sur le nombre d'actes qu'il envisageait au départ de réaliser" poursuit la porte-parole. "Si l'urgence ne nécessite pas que l'expertise soit délivrée dans un délai très contraint, il peut le prolonger. Dans le raisonnement du magistrat, il y a chaque fois deux choses : l'indépendance juridictionnelle d'ordonner une expertise et la responsabilité de l'engagement des deniers publics. Le tout pour parvenir à la manifestation de la vérité." En 2019, ces frais de justice ont représenté environ 531 millions d'euros.

La piste du chien Curtis

L'avocate de la mère d'Elisa Pilarski, Caty Richard, a, elle, regretté "qu'il ait été déjà, trop et à tort, communiqué sur les expertises ADN et sur les délais" d'autant que ces analyses ADN "ne constituent pas le Graal absolu". "La juge d'instruction est très active dans cette affaire. J'appelle à éviter les communications approximatives, qui donnent ensuite lieu à toutes les hypothèses et thèses complotistes que nous déplorons et dont les premières victimes sont les parents d'Elisa, emportés bien malgré eux dans un tourbillon médiatique qui ne fait que rendre leur douleur plus intense encore", a-t-elle déclaré.

Contactée par l'AFP, une source judiciaire affirme que les tests ADN "pourraient confirmer ce qui apparaît désormais le plus plausible, à savoir que Madame Pilarski a été victime de son chien Curtis".