L'Opéra de Lyon : le directeur du ballet condamné pour avoir congédié une danseuse devenue maman

© PHILIPPE DESMAZES / AFP
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avec AFP , modifié à
Le directeur du ballet de l'Opéra de Lyon a été condamné à six mois de prison avec sursis.

Le directeur du ballet de l'Opéra de Lyon a été condamné jeudi à six mois de prison avec sursis pour discrimination au travail et harcèlement après avoir demandé le non-renouvellement du contrat d'une danseuse à son retour de maternité. Le tribunal correctionnel l'a condamné en outre à une amende de 5.000 euros, à 20.000 euros de dommages et intérêts à verser à la plaignante et à 4.000 euros à verser au syndicat des artistes musiciens professionnels de Lyon qui s'était porté partie civile également.

"Faiblesse physique et stylistique", "style trop classique". Un verdict conforme aux réquisitions de l'avocat général qui avait estimé que dans ce dossier il y avait "un certain nombre d'éléments objectifs à charge". Les faits remontent à 2014. Karline Marion a 34 ans, elle est CDD à l'Opéra de Lyon depuis cinq ans. Elle se trouve à ce moment crucial où son contrat sera requalifié en CDI s'il est renouvelé une 6ème fois. Mais, deux jours après son retour de congé maternité, une lettre lui signifie son non-renouvellement. Yorgos Loukos, directeur du ballet depuis 33 ans, motive sa décision auprès de la ville de Lyon qui embauche les danseurs du ballet : "Faiblesse physique et stylistique", "style trop classique" pour une danseuse qui a effectué toute une partie de sa carrière au ballet Béjart.

Or, lors d'un entretien quelques jours plus tard, enregistré en cachette par la danseuse, Yorgos Loukos explique : "Je pense que si entre 29 et 34 ans tu as fait pas mal mais pas beaucoup, c'est pas entre 35 et 40 que tu vas faire plus, en plus avec un enfant". A un autre moment, évoquant un déplacement de la danseuse à Bordeaux en tournée pour s'entraîner avec la troupe, il dit : "Tu peux rester à Lyon pour faire ta gym et t'occuper de ton truc". Ce "truc" étant son enfant.

Loukos va faire appel. "Il y a 14 filles dans la compagnie, dix ont des enfants et ça ne pose pas de problème", a tenté de se justifier jeudi Yorgos Loukos, 67 ans, célibataire et sans enfant lors d'échanges tendus avec le président qui lancera à moment : "C'est moi qui mène la danse ici." Des propos "blessants" dira la danseuse, qui n'a pas vraiment rebondi depuis et suit une formation pour pouvoir enseigner la danse. A sa sortie du tribunal, Yorgos Loukos, défendu par Me Frédéric Doyez, a jugé le verdict "ridicule", expliquant que chaque année des danseurs qui ne font pas ou plus l'affaire sont congédiés. Il fera appel. Karline Marion, les larmes aux yeux, a eu elle "le sentiment d'avoir été entendue" après "un chemin difficile et long" au cours duquel elle s'est sentie la porte-parole de nombreuses danseuses qui n'osent pas forcément parler.