Procès Cahuzac : "S’il avait été vivant, j’aurais dit la même chose"

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Jérôme Cahuzac s'est expliqué mercredi sur les tribulations de son argent caché à l'étranger, de la Suisse à Singapour. © Benoit PEYRUCQ / AFP
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Caroline Politi, au palais de justice de Paris , modifié à
Au deuxième jour de son procès, Jérôme Cahuzac a indiqué avoir ouvert un second compte en Suisse, en 1993, pour transférer l'argent récolté pour financer le mouvement de Michel Rocard.

"Une mécanique", "une spirale". C'est ainsi que Jérôme Cahuzac a justifié, au deuxième jour de son procès pour fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale, sa décision d'ouvrir un second compte en Suisse, en 1993, en son nom propre cette fois. L'ancien ministre du Budget a expliqué que celui-ci avait dans un premier temps servi à transférer les fonds du premier compte, ceux récoltés pour financer "l'activité politique" de Michel Rocard, selon ses révélations de lundi. Ce n'est qu'en 2000 et 2001, qu'il fera deux transferts de fonds personnels provenant de ses activités chirurgicales. Une version régulièrement mise à mal par les questions insistantes du président et du procureur. 

  • LES TEMPS FORTS DE L'AUDIENCE :

Le procès reprend. Le procès de Jérôme Cahuzac a repris à 9 heures ce mercredi. Même costume gris anthracite pour lui, même tailleur noir et chignon sage pour son ex-épouse, Patricia Ménard, également mise en examen pour fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale. Cette matinée était consacrée au second compte ouvert par l’ancien ministre du Budget, en 1993, en son nom propre. Il est surnommé compte "Birdie", du nom du pseudonyme de Jérôme Cahuzac pour gérer ses fonds occultes.

"S’il avait été vivant, j’aurais dit la même chose". Le procureur souhaite revenir, avant, sur le compte ouvert, selon les dires de Jérôme Cahuzac, pour le mouvement de Rocard. Combien de laboratoires ont financé le parti, l’interroge le magistrat. "Trois ou quatre". Lesquels ? "Je refuse de donner des noms en dehors de Pfizer". Un autre aspect de la version des faits livrée lundi interpelle. Jérôme Cahuzac a affirmé que ce compte servait aux frais de fonctionnement du secrétariat Rocard. Or, il n’y a eu qu’un seul retrait, en décembre 1992. L’ancienne étoile montante de la gauche esquive. Il réaffirme sa version des faits, sans s’expliquer sur ce point. Il assure que son témoignage n’est pas opportuniste, après le décès de l'homme politique, cet été. "Ce n’est pas faire parler un mort ou attenter à la mémoire de Michel Rocard. Je ne lui en ai jamais parlé. S’il avait été vivant, j’aurais dit la même chose". 

 "Je suis dans une mécanique, Mr Le Président, c’est très dur de s’arrêter". En 1993, Jérôme Cahuzac ouvre un second compte dans la banque suisse, en son nom propre cette fois. Nom de code : Birdie. "C’est plus une référence à un joueur de jazz qu’une référence de golf". Ce nouveau compte, explique-t-il, abrite toujours les fonds du mouvement de Michel Rocard, il a transféré l’argent de l’un à l’autre. Pourquoi ? "Par loyauté pour Philippe Péninque [qui a ouvert le compte de 1992, ndlr]. C’est à moi de prendre ce risque, pas à lui". Il se rend donc en Suisse pour faire les démarches et confier le mandat de gestion à Dominique Reyl. "Mon but, ce n’est pas que mon compte enfle, assure l’ancien ministre. Je veux qu’il reste à l’identique. Je veux pouvoir rendre l’argent si on me le demande." 

Fonds personnel. Jusqu’en 2000, assure Jérôme Cahuzac, les fonds sur ses comptes occultes proviennent du financement politique. Mais à cette date, il y dépose 115.000 euros provenant d’opérations chirurgicales réalisées au Proche et au Moyen-Orient. Il est réglé en cash. "Je n’ose pas rentrer en France avec tout cet argent, je ne veux pas donner l’identité de mes patients". Il refuse de donner au tribunal le moindre nom, ni même le pays dans lequel il s'est rendu malgré l'insistance du président. "Mais vous êtes déjà député ?", le tance le magistrat. "Je sais et cela m’accable". Cela ne l’empêchera pas de recommencer l’année suivante. 

Retrouvez le live-tweet intégral du second jour d’audience par notre journaliste Caroline Politi, au tribunal correctionnel de Paris :