Il dessine le procès de Charlie Hebdo et raconte ses croquis d'audience

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Mathilde Durand
François Boucq, dessinateur de bande dessinée, couvre le procès des attentats de janvier 2015 pour Charlie Hebdo. Placé sous les juges, il embrasse la salle d'audience et retranscrit par ses croquis l'ambiance de ce procès historique. "Le croquis d'audience est intéressant car c'est un endroit privilégié, où le dessin est toujours privilégié", raconte-t-il sur Europe 1. 
INTERVIEW

Le procès de Charlie Hebdo se poursuit pour une deuxième semaine et ce mardi, la cour d'assises spéciale de Paris doit entendre les premiers témoignages des rescapés de l'attaque de janvier 2015. Un procès historique, filmé pour les archives, mais que le public ne peut imaginer autrement qu'à travers les croquis d'audience. François Boucq est dessinateur de bande dessinée. Pour Charlie Hebdo, il croque le procès de ces attentats. Une émotion particulière car cette affaire implique "des gens qui ont participé à une tuerie de dessinateurs", confie-t-il sur Europe 1. 

"Un témoignage essentiel pour les audiences" 

"Le croquis d'audience est intéressant car c'est un endroit privilégié où le dessin est toujours privilégié", explique le dessinateur. "Le témoignage par le dessin est un témoignage essentiel pour les audiences." Installé sous les juges, dans un endroit réservé aux dessinateurs de procès, François Boucq a une vision sur ceux qui passent à la barre, les avocats, ou encore sur les boxes vitrés qui abritent les prévenus. "Des fois, des contacts se créent, c'est assez déstabilisant", raconte-t-il mardi matin sur Europe 1, citant la réaction d'un des suspects, qui lui posait des questions sur ses croquis. 

Lundi, les photos de la rédaction après le passage des terroristes ont été diffusées. Un moment difficile pour les parties civiles, mais également pour le dessinateur qui collabore régulièrement avec Charlie Hebdo sous un pseudonyme. "L'aide qu'on a, c'est le dessin. Face aux images que l'on a pu voir hier, c’est-à-dire la scène de crime, qui sont les images faites par le service de police où l'on voit les cadavres des camarades, le dessin permet d'avoir le recul suffisant pour ne pas plonger dans un univers émotionnel trop impactant", confie François Boucq. 

Crayons, aquarelles et personnages masqués 

A l'aide de crayon, d'aquarelle ou de stylos-pinceaux qui permettent d'utiliser de l'encre de Chine, François Boucq capture des instants du procès. "Nous, on est là en observateur, le plus attentif possible, et on essaye de saisir par l'observation ce qu'il se passe. Cela nous oblige presque au silence", raconte-t-il. "Il y a des moments où on voit un truc qui se passe en quelques secondes et il faut le fixer au crayon." 

Crise sanitaire oblige, toutes les personnes assistant au procès doivent porter un masque. Une dispositif de protection nécessaire, qui bouscule cependant les habitudes du dessinateur. En effet, il ne peut se fier qu'aux regards des individus et a parfois des surprises lorsque ces derniers retirent leurs masques. "L'atmosphère est presque fantomatique, mais peut-être aussi que cela participe de ce procès un peu exceptionnel", souligne-t-il. "Finalement, il y a une espèce de nivellement, tout le monde a un masque. On est des êtres humains face à la justice."