Fleury-Mérogis : comment mieux prévenir les suicides en prison ?

La prison de Fleury-Mérogis fait face à une vague de suicides depuis le début de l'année.
La prison de Fleury-Mérogis fait face à une vague de suicides depuis le début de l'année. © Philippe LOPEZ / AFP
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Thibaud Le Meneec , modifié à
La prison francilienne fait face à une recrudescence de suicides depuis le début de l'année, avec 11 personnes mortes depuis janvier.

C'est une vague de suicides qui agit comme un signal sur le mal-être carcéral : depuis janvier, 11 personnes se sont donné la mort depuis janvier à Fleury-Mérogis, la dernière étant un détenu de 48 ans, retrouvé mort mardi. Au niveau national, il y a eu 64 suicides en détention depuis le début de l'année.

Surpopulation, mauvaises conditions de travail, omerta… Comment expliquer cette recrudescence de suicides en milieu carcéral ? "C'est un ensemble de choses : la surpopulation carcérale, les conditions de travail difficiles pour les surveillants et une omerta sur les suicides en prison", observe dans Europe Soir Cyrille Canetti, psychiatre, ancien contrôleur au CGLPL (Contrôleur général des lieux de privation de liberté). 

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Nos meilleures armes pour lutter contre le suicide, ce sont les conditions de détention correctes, un ou deux détenus maximum

À Fleury-Mérogis, 4.200 personnes sont placées en détention avec, comme dans d'autres prisons, une surpopulation importante. "Elle atteint 150%", appuie Didier Kandassamy, surveillant dans cette prison et secrétaire local adjoint Force ouvrière. "Nos meilleures armes pour lutter contre le suicide, ce sont les conditions de détention correctes, un ou deux détenus maximum, avec un personnel qui a du temps pour s'occuper des détenus", affirme quant à elle Aurélie Pascal, directrice des services pénitentiaires, conseillère nationale au Syndicat national des directeurs pénitentiaires. 

Des détenus fragiles difficiles à repérer ? Il y a, aussi, la question du repérage des détenus fragiles : "Dans ma carrière, 90% des détenus qui sont passés à l'acte n'étaient pas spécialement suivis", confirme Aurélie Pascal. Malgré tout, des dispositifs comme les "codétenus de soutien" restent importants, "où des détenus volontaires vont écouter une personne en détresse afin de rendre compte des difficultés que peut éprouver ce détenu fragile", explique Didier Kandassamy.

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Il faut presque être fou pour ne pas se suicider quand on est prison

Et pour les personnes incarcérées en proie à des crises suicidaires, il existe des cellules spécialisées, que l'on appelle des 'cellules de protection d'urgence', limitée à 24 heures, avec un avis médical. "On y trouve des vêtements spécifiques indéchirables", éclaire Aurélie Pascal. D'autres moyens sont aussi utilisés, comme les draps qui se déchirent ou des rondes effectuées toutes les heures dans certains quartiers pénitentiaires.

Une prévention à réaliser "bien en amont". Mais pour Cyrille Canetti, la prévention doit "se faire bien en amont" : comme l'indique Le Monde, mercredi, les personnes qui se sont récemment donné la mort à Fleury-Mérogis avaient écopé de peines qui peuvent sembler disproportionnées. "C'est là que se loge la folie", juge le psychiatre. "On est dans le grand n'importe quoi dans le prononcé des peines" avec selon lui des individus qui deviennent fragiles psychologiquement en milieu carcéral, environnement profondément anxiogène. Pour lui, "il faut presque être fou pour ne pas se suicider quand on est prison."