Des internes formés à l'étranger exclus pour incompétence

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Les six internes renvoyés de l'hôpital de Villeneuve-Saint-Georges avaient tous fait leurs études en Roumanie. © FRED DUFOUR / AFP
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Mélanie Nunes et Thibauld Mathieu , modifié à
MÉDECINE - Six d'entre eux étaient affectés à l'hôpital de Villeneuve-Saint-Georges, dans le Val-de-Marne. Cette exclusion est une première en France.

Encore marginal, le phénomène n'en est pas moins inquiétant. Huit internes en médecine générale, tous formés à l'étranger, ont été exclus de leurs services pour cause d'incompétence. Six d’entre eux - trois Français ayant fait leurs études en Roumanie et trois Roumains ayant commencé leur cursus dans leur pays - étaient affectés à l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges, dans le Val-de-Marne, pour leur premier stage de six mois. 

"Un danger pour la santé". En novembre, trois avaient été affectés en pneumologie, les trois autres en gastro-entérologie. Mais très vite, leurs tuteurs s'étaient rendu compte qu'ils n'avaient pas le niveau. Ils avaient alors averti le professeur Philippe Jaury, coordonnateur des internes, qui avait décidé de les renvoyer de leurs services. "Ils ne connaissent pas la sémiologie, les signes cliniques. Ils n'ont pas du tout les compétences pour être mis en autonomie comme nos internes qui sont formés en France", explique Philippe Jaury. "Ils ne peuvent pas être de garde dans les hôpitaux, il faut tout vérifier. Je trouve que c'est un danger pour la santé. Vous vous rendez compte que l'interne qui vous soigne, il a eu trois examens classants de fin d'étude. Est-ce que vous pensez que c'est un bon médecin ?", continue le docteur.

Ces étudiants avaient d'ailleurs comme point commun d’occuper les dernières places – entre la 8.688e et la 8.876e sur un total de 8.881 – à l’examen qui permet à tout étudiant en médecine ayant validé un deuxième cycle d’études de faire son internat.

Formés dans d'autres hôpitaux. Renvoyés, les internes ont été placés dans d'autres hôpitaux pour y être formés pendant six mois, afin d'acquérir des compétences médicales, et pour certains, d'apprendre le français. Mais ils continueront à être payés, précise Jean-François Bergmann, qui accueille l'un de ces étudiants roumains, à Lariboisière, à Paris. "On l'a mis un peu dans un statut intermédiaire où il n'a pas la responsabilité de prescrire ou de faire des comptes rendus", explique-t-il. "Il voit les malades, fait des observations, nous les montre. Il essaye d'apprendre à tous les niveaux mais aujourd'hui, il a le niveau d'un étudiant en milieu de cursus de médecine." Pour lui, cet étudiant ne sera jamais au niveau dans six mois.

Deux types de problèmes. Pour pallier ce genre de problèmes, la réforme du troisième cycle, qui doit entrer en vigueur à la rentrée 2017, devrait prévoir une année socle en début d’internat, pour s'assurer que chaque étudiant a les compétences pour poursuivre dans sa spécialisation. Mais pour le Professeur Jean-François Bergmann invité d'Europe Midi mercredi, le problème ne vient pas de là, mais plutôt des examens que passent les étudiants en médecine. "Le problème vient de l'examen national classant que les étudiants passent pour l'internat. Personne n’est recalé, c’est juste un classement. Donc certaines personnes peuvent ne pas être au niveau", explique-t-il avant d'ajouter, "il y a plus de 80% de recalés après la première année, donc l’étranger les attire beaucoup. Et c'est notamment le cas de la Roumanie. Maintenant, il faut vérifier que, quand ils reviennent, leur niveau correspond bien à nos standards".